Ce jeudi matin, une délégation d’associations et ONG environnementales françaises a été reçue à sa demande, à l’Élysée, par le cabinet d’Emmanuel Macron. La délégation était composée d’un « défenseur de l’eau » (chef de la tribu Esto’k Gna, qui lutte contre les projets d’infrastructures fossiles aux États-Unis) et de représentants de 350.org, Alternatiba, les Amis de la Terre, Attac France, Oxfam France et du Réseau Action Climat.
Alors que le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris, adopté à l’issue de la COP21, pourrait être officialisé après le G7 (qui se tient ce week-end), la délégation a remis une lettre exhortant Emmanuel Macron à « faire preuve de volontarisme, c’est à dire d’exemplarité, de solidarité et de fermeté« , pour tenir les engagements pris à l’issue de la COP21.
Pour les signataires de la lettre, il s’agit en effet de ne pas rater le début de la séquence internationale qui, du G7, nous mènera à la COP23 (à Bonn fin 2017), dont la présidence est cette année assurée par les Fidji.
G7 : premier test climatique pour Emmanuel Macron
Le G7 qui se tiendra en Italie du 26 au 27 mai 2017 constitue la première occasion pour Emmanuel Macron, président de la République, d’assoir le leadership de la France en matière de lutte contre le changement climatique sur la scène européenne et internationale. Emmanuel Macron s’est engagé à plusieurs reprises à poursuivre les efforts de la France en matière de transition énergétique. L’Accord de Paris a d’ailleurs été au cœur des premiers échanges diplomatiques avec les présidents Donald Trump et Xi Jinping ou encore le président du Conseil européen Paolo Gentiloni. Le WWF France appelle Emmanuel Macron à se saisir de ce premier grand rendez-vous international pour honorer ses engagements et positionner la France comme un acteur incontournable de la lutte mondiale contre le changement climatique.« Le temps où les Etats-Unis pouvaient dicter le tempo de l’action climatique est révolu. 42 pays ont ratifié l’Accord de Paris depuis l’élection de Donald Trump et un cinquantaine ont déjà annoncé qu’ils iraient au-delà des engagements pris à la COP21. Les émissions de CO2 liées à la consommation énergétique ont stagné pour la 3e année consécutive. Emmanuel Macron doit saisir l’opportunité du G7 pour se positionner comme un leader de cette action climatique mondiale notamment en réaffirmant comme président de la République l’annonce faite comme candidat : interdire tout nouveau permis d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures en France. Pour cela, il devra en particulier étendre l’interdiction qui existe déjà pour les eaux françaises en Méditerranée et sur la façade Atlantique aux eaux d’Outre-mer et donc en Guyane où le sujet est d’actualité. »Pascal Canfin, directeur général du WWF France Le WWF attend des membres du G7 qu’ils réaffirment l’engagement de mettre en œuvre l’Accord de Paris et appelle Emmanuel Macron à former une « coalition de l’ambition », avec l’Allemagne et la Chine notamment, pour qu’ils aillent au-delà de cet engagement afin de maintenir la hausse de la température mondiale bien en-dessous de 2°C voire 1,5°C. Le G7 devra aussi fixer un cap clair vers une économie décarbonée et la fin des soutiens aux énergies fossiles et aboutir à des objectifs ambitieux en termes de financement de l’action climatique et un appui aux pays les plus vulnérables. A propos Le WWF est l’une des toutes premières organisations indépendantes de protection de l’environnement dans le monde. Avec un réseau actif dans plus de 100 pays et fort du soutien de 5 millions de membres, le WWF œuvre pour mettre un frein à la dégradation de l’environnement naturel de la planète et construire un avenir où les humains vivent en harmonie avec la nature, en conservant la diversité biologique mondiale, en assurant une utilisation soutenable des ressources naturelles renouvelables et en faisant la promotion de la réduction de la pollution et du gaspillage. Depuis 1973, le WWF France agit au quotidien afin d’offrir aux générations futures une planète vivante. Avec ses bénévoles et le soutien de ses 220 000 donateurs, le WWF France mène des actions concrètes pour sauvegarder les milieux naturels et leurs espèces, assurer la promotion de modes de vie durables, former les décideurs, accompagner les entreprises dans la réduction de leur empreinte écologique et éduquer les jeunes publics. Mais pour que le changement soit acceptable il ne peut passer que par le respect de chacune et chacun. C’est la raison pour laquelle la philosophie du WWF est fondée sur le dialogue et l’action. – Retrouvez toutes nos actualités sur www.wwf.fr
Lettre à Emmanuel Macron
« Monsieur le président de la République, Au cours de la campagne électorale, vous avez à plusieurs reprises fait part de votre détermination à respecter les engagements de la COP21. Les jours qui viennent sont décisifs pour le devenir de l’Accord de Paris. Notre capacité à tenir l’ambition d’un maintien du réchauffement climatique au plus près de la limite de 1,5°C est mise à l’épreuve. Donald Trump pourrait en effet annoncer dans les prochains jours le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris – et même s’il renonce à ce projet, nul ne doute qu’il fera peu de cas des engagements pris par son prédécesseur. L’heure n’est pourtant plus aux atermoiements. Les impacts des dérèglements climatiques se font chaque jour plus destructeurs. La crise alimentaire qui sévit actuellement en Afrique de l’Est, touchant près de 13 millions de personnes, est exacerbée par le changement climatique. Les pays les plus vulnérables, qui sont, vous le savez, les moins responsables des émissions de gaz à effet de serre, exhortent la communauté internationale à orienter les financements vers les énergies renouvelables et les économies d’énergie ainsi que vers l’adaptation au changement climatique – assurément pas vers les activités qui contribuent au dérèglement du climat. Les membres du Climate Vulnerable Forum, une coalition de pays vulnérables aux impacts des changements climatiques, se sont engagés eux-mêmes à passer à un mix-énergétique 100% renouvelable d’ici à 2050. La France peut jouer un rôle moteur dans la mise en œuvre comme dans l’élargissement de cet engagement. Pour y parvenir, nous devons geler le développement de tout nouveau projet d’infrastructure fossile – gaz inclus, sous peine de nous engager irrémédiablement sur la trajectoire d’un réchauffement supérieur à 2°C. Ce gel n’aura de sens que s’il est conçu comme une première étape, dans la sénescence programmée de l’industrie fossile. Faire preuve de volontarisme, signifie aujourd’hui faire preuve d’exemplarité. Alors qu’il nous faut organiser la sortie des énergies fossiles, de nouveaux projets d’infrastructures fossiles sont développés dans le monde entier, y compris en France, en Europe et dans le reste des pays membres du G7. Alors qu’il est du devoir des pays développés d’engager en premier leur transition vers du 100% renouvelable, et de soutenir celle des pays en développement, les bailleurs publics et privés continuent de financer la construction de nouveaux projets fossiles. La France ne fait malheureusement pas exception : des institutions telles que la CDC, dont la BPI (et au niveau européen la BERD), des entreprises comme Total ainsi que les grandes banques sont impliquées dans de nombreux grands projets d’infrastructures de transport fossile. La France doit aussi faire preuve de solidarité vis-à-vis des pays en développement en renouvelant l’engagement d’augmenter ses financements climat, notamment pour les pays les moins avancés et pour l’adaptation aux impacts du changement climatique. Faire preuve de volontarisme implique également de faire preuve de fermeté. Aux Etats-Unis, l’administration Trump relance des projets auparavant abandonnés pour leurs risques sur le climat et les populations, à commencer par les peuples autochtones en première ligne de leurs impacts. Monsieur le Président, nous vous demandons de ne pas manquer l’opportunité unique que représente le premier G7 de votre quinquennat de prendre des mesures et positions fortes pour le climat et les populations, comme contrepoids aux renoncements de Donald Trump. Nous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre très haute considération. »