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Les députés souhaitent interdire le bisphénol A dès janvier 2015

C’est peut être la fin d’une longue bataille. L’assemblée nationale a adopté en deuxième lecture, mercredi 28 novembre, le principe de l’interdiction du bisphénol A dans tous les contenants alimentaires. Fortement suspectée d’être un perturbateur endocrinien, cette substance chimique très répandue a déjà été interdite dans les biberons en 2010. (Paradoxalement, cette disposition ne s’appliquait pas aux biberons utilisés dans les maternités ! La ministre de la Santé a promis de « corriger cette situation inacceptable ».)

« La nocivité du bisphénol A ne fait plus vraiment débat, se réjouit l’auteur de la proposition de loi, le député PS Gérard Bapt. Nous ne rencontrons plus de position de déni de la part des industriels, bien conscients désormais qu’il sera difficile de commercialiser des produits contenant du bisphénol A ». En revanche, le débat se cristallise aujourd’hui autour de la date d’entrée en vigueur du dispositif. Pour les produits alimentaires destinés aux enfants de moins de trois ans, ce sera dès la promulgation de la loi, en 2013. Mais pour le reste des contenants alimentaires, le désaccord persiste entre sénateurs et députés, et au sein même de l’Assemblée nationale. Lors d’une première lecture adoptée en octobre 2011, les députés avaient fixé la date butoir au 1er janvier 2014. Les sénateurs l’ont repoussée au 1er juillet 2015. Mercredi, les députés ont raccourci ce délai, ramenant la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2015 avec l’accord du gouvernement. En cause derrière ce débat : la mise au point de substituts au bisphénol A, aussi efficaces d’un point de vue industriel qu’inoffensifs pour la santé. Le bisphénol A a deux usages principaux. Il sert à fabriquer un plastique – le polycarbonate – qui était utilisé notamment pour la fabrication des biberons. Cet usage est dorénavant interdit, le polycarbonate ayant été facilement remplacé par un autre plastique, le polypropylène. En revanche, la question des grosses bonbonnes d’eau reste en suspens, le prolypopylène n’étant pas assez résistant pour cette utilisation. Le problème principal concerne aujourd’hui l’incorporation du bisphénol A dans les résines époxy qui servent à fabriquer les vernis qui tapissent l’intérieur des contenants alimentaires métalliques (boîtes de conserve, canettes, etc). Ces vernis évitent que le contenu alimentaire ne soit en contact avec le métal et le protège de tout type d’agression. « Le vernis expoxy est le vernis parfait pour l’alimentation, car il convient à tous les types d’aliments », assure Michel Loubry, représentant de PlasticsEurope, qui regroupe les fabricants de plastiques. Difficile donc de lui trouver un substitut universel, même si les industriels de l’agroalimentaire et de l’emballage y travaillent depuis plusieurs années. Des chercheurs de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) à Montpellier ont cependant déjà réalisé des travaux importants qui pourraient permettre de créer de nouveaux composés non toxiques. Ces travaux, publiés dans la revue PNAS (comptes rendus de l’académie des sciences américaine) doit permettre, dans les années à venir de créer de nouvelles molécules avec les mêmes propriétés mais sans les inconvénients : « Il va falloir trouver une multitude de solutions différentes, en fonction des aliments », explique de son côté Patrick Lévy, médecin-conseil de l’Union des industries chimiques. « Les fabricants d’emballages métalliques et les industries agroalimentaires travaillent d’arrache-pied depuis deux ou trois ans mais nous n’aurons pas de résultats avant 2016 », assure Michel Loubry. Dominique Gombert, directeur de l’évaluation des risques à l’Agence de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) temporise. Dans un entretien qu’il a accordé au journal LE MONDE, il explique : « En juin, nous avons rendu un avis dans lequel nous avons identifié 73 substituts possibles au BPA, que nous avons classés en grandes familles d’usages : des substituts pour les polycarbonates, pour les résines époxy ou pour les usages plus marginaux de type tickets de caisse, etc. » Concernant les délais : « Nous ne sommes pas capables de dire si telle ou telle molécule est utilisable ou non, par les différents métiers qui utilisent aujourd’hui le BPA. C’est une question compliquée. Par exemple, lorsqu’on prend les substituts possibles pour les papiers thermiques [tickets de caisse, etc.], nous en avons toute une palette qui sont soit d’autres bisphénols, soit des produits avec des noyaux phénoliques sur lesquels nous n’avons que des connaissances très imparfaites. Pour les utilisations dans les résines époxy [gainage intérieur des boîtes de conserve, etc.], il y a également de nombreux points à vérifier au plan toxicologique. En revanche, lorsqu’on regarde les substituts possibles dans le cadre de l’utilisation dans les polycarbonates, on trouve des substances beaucoup plus familières comme des polyesters, le polyéthylène, le polypropylène, etc., qui devraient logiquement poser moins de problèmes ». La ministre de la santé Marisol Touraine a considéré pour sa part mercredi que « deux ans étaient un délai suffisant ». Le texte doit revenir en deuxième lecture devant les sénateurs, plus attentifs aux demandes des industriels. « Nous pourrons toujours prévoir des délais supplémentaires, au cas par cas, pour les contenants – notamment les plus acides – qui n’auraient pas encore trouvé de substituts », assurait jeudi le député Gérard Bapt, prêt au compromis.

Réaction des ONG : un an de trop et un débat mal posé

Les associations signataires de cette tribune
Les associations signataires de cette tribune
A l’issue du vote d’hier, la loi ne satisfait pas entièrement les associations Rassemblement Pour la Planète (RPP) – Réseau Environnement Santé (RES) – Générations Futures – Ecologie sans frontières (ESF) – Agir Pour l’Environnement (APE) – Association Toxicologie Chimie (ATC) – WECF France – Santé Environnement Rhône Alpes (SERA) – CRIIGEN – Appel de la Jeunesse – SOS MCS – Comité Développement Durable en Santé (C2DS) – CNMSE – Non au Mercure Dentaire (NaMD) – WWF France – CNIID : – L’échéance d’interdiction des contenants alimentaires comportant du bisphénol A, fixée initialement au 1er janvier 2014 et reportée par le Sénat au 1er juillet 2015 a été finalement ramenée au 1er janvier 2015, soit 6 mois de gagnés, ce qui ne répond que partiellement au vœu exprimé par les 45 000 signataires de la pétition lancée sur la plateforme d’action change.org par les associations, il y a 15 jours [[La pétition a été remise hier au député Jean-Louis Roumegas et au groupe EELV porteur d’un amendement de rétablissement de la date originelle du 1er janvier 2014 qui n’a pas été retenu par les députés, faute d’un soutien de la Commission des Affaires Sociales et de la ministre Marisol Touraine.]]. Ci-dessous la vidéo réalisée à cette occasion : – Le champ de la loi a été restreint aux matériaux en « contact direct » avec les aliments, ce qui, pour les associations, introduit un flou juridique dont elles espèrent que les consommateurs et les porteurs d’alternatives 100% sans BPA ne pâtiront pas. Les futurs décrets d’application sur le message d’avertissement aux femmes enceintes et allaitantes ne doivent pas laisser d’ambiguïté sur la présence ou l’absence de BPA dans la totalité de l’article de consommation, pour que cette disposition assure pleinement son rôle de protection de la santé publique et d’incitation des industriels à l’adoption de substituts 100% sans BPA. – En revanche, le projet de loi inclut désormais les collerettes de tétines et de sucettes et les anneaux de dentition, et corrige une aberration : la précédente loi sur les biberons ne couvrait pas jusqu’à ce jour ceux utilisés en maternité qui relèvent du Code de la Santé Publique. – Le DEHP, un phtalate classé CMR [[Cancérigène, Mutagène, Reprotoxique]] et perturbateur endocrinien reconnu, sera interdit dans toutes les tubulures en usage dans les services de pédiatrie, de néonatologie et de maternité, dans l’attente d’un élargissement de cette mesure à d’autres substances dangereuses et d’autres dispositifs médicaux. Tout en se félicitant que les parlementaires réaffirment leur attachement unanime à ce projet de loi, les associations déplorent un débat qui a laissé une place trop grande aux préoccupations motivées par les intérêts à court terme des entreprises de conserverie et n’a pas pris la mesure de l’urgence sanitaire qu’imposent les données disponibles sur la toxicité du bisphénol A. « Si la cohérence et la nécessité de l’amendement tétines/anneaux de dentition a bien été saisie, cette loi nous laisse sur notre faim. Les parlementaires ne vont pas au bout du raisonnement : comment justifier que les 830 000 enfants amenés à naître chaque année d’ici le 1er janvier 2015 seront mieux protéger de 0 à 3 ans qu’avant la naissance ? L’exposition courante au Bisphénol A et à d’autres perturbateurs endocriniens produit jour après jour des impacts significatifs en termes de santé publique avec leurs conséquences humaines et économiques. Une année supplémentaire d’autorisation du bisphénol A dans le contact alimentaire, c’est une année de trop » commente Elisabeth Ruffinengo de WECF France. Pour les associations, le débat sur le bisphénol A illustre la nécessité d’une stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens et d’autres substances dangereuses prioritaires qui permette de sortir de la crise sanitaire par le haut : « L’interdiction et la restriction des perturbateurs endocriniens doivent s’accompagner de moyens accordés à la recherche en santé environnementale et à l’expertise des agences mais aussi à la mutation du tissu industriel par le développement des procédés et des filières de substitution » déclare Yannick Vicaire du Réseau Environnement Santé, « la loi sur le bisphénol A doit être un tremplin vers une transition écologique pensée aussi en termes d’empreinte sanitaire réduite et s’appuyant, pour son financement, sur le principe pollueur-payeur ». Dans le cas du BPA, deux unités de recherche françaises sont ainsi porteuses d’alternatives aux résines epoxy à partir de ressources végétales et pourraient conduire au développement de filières vertes, franco-françaises et créatrices d’emploi alors que le bisphénol A et ses composés ne sont pas produits sur le territoire français. Sans l’action des associations, les travaux de ces chercheurs seraient restés dans l’ombre, preuve que l’on continue de ne penser les enjeux santé-environnement qu’en termes de contraintes économiques et pas d’opportunités. Les associations demandent aux sénateurs, aux députés et au gouvernement de mettre un terme rapide au feuilleton de l’adoption de la loi BPA, sans plus en affaiblir la portée et en reculer l’échéance. « Nous réitérons notre soutien au rétablissement de l’échéance initiale du 1er janvier 2014 et notre hostilité à tout nouveau délai dans cette ultime phase de discussion du projet de loi » conclut Nadir Saïfi, du Rassemblement pour la planète, « La loi BPA n’est qu’un premier pas et la France doit s’engager dans une politique globale de réduction de l’exposition aux perturbateurs endocriniens, comme d’autres Etats membres de l’Union européenne tels que le Danemark. Des actions nationales seront décisives pour impulser une politique européenne qui réponde efficacement aux enjeux des perturbateurs endocriniens».

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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