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Neutralité carbone de l'Europe

Analyse des investissements nécessaires pour atteindre la neutralité carbone de l’Europe à horizon 2050

Le rapport Road to Net Zero de l'Institut Rousseau compile le travail de 150 chercheurs et experts de toute l'Europe

À une semaine des élections européennes, et alors que s’ouvre à Bonn la préparation de la COP29 de décembre en Azerbaïdjan, le rapport Road to Net Zero (« En route vers la neutralité climatique ») de l’Institut Rousseau compile le travail de 150 chercheurs et experts de toute l’Europe. Il analyse et chiffre les investissements publics et privés nécessaires pour atteindre la neutralité carbone de l’Europe à horizon 2050. L’Ademe évalue les coûts d’adaptation aux changements climatique à 260 milliards d’euros par an, pour la France seulement, en cas d’inaction. 

UNE TRANSITION GLOBALE, ÉCONOME ET AMBITIEUSE

Les niveaux de gaz à effet de serre atteignent des niveaux record. Les températures mondiales atteignent des niveaux records. L’élévation du niveau de la mer atteint un niveau record. La glace de mer de l’Antarctique est à un niveau record. C’est une cacophonie assourdissante de records battus.

Professeur Petteri Taalas, Secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale, 2023

LES BESOINS D’INVESTISSEMENTS CLIMAT SELON L’INSTITUT ROUSSEAU VS. COM UE1

Sources : Rapport RtNZ (2024) et Impact assessment « path to climate neutrality by 2050 » de la commission UE (2024) en euros 2022 et 2023 sur les 4 principaux secteurs étudiés.

Dans l’étude de la Commission européenne, le sur-investissement est même estimé à plus de 640 milliards d’euros par an mais les années considérées pour évaluer la « dépense actuelle » sont antérieures à celles du rapport Road to Net
Zero (2019-2022), qui correspond à 1040 milliards d’euros d’investissements dans ces 4 secteurs (contre 1160 milliards en ajoutant l’agriculture, la R&D et les puits).

Comment décarboner tous les secteurs de l’économie ?

Combien d’investissements cela nécessite-t-il, par secteur, par pays, par mesure ?

À l’heure de l’austérité budgétaire, comment financer la transformation nécessaire de notre économie ? 

Pour répondre à ces questions, l’Institut Rousseau a observé en détail sept grands pays – la France, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas, la Pologne et la Suède – pour évaluer les investissements publics et privés nécessaires pour atteindre les objectifs de neutralité carbone à l’horizon 2050. L’ensemble de ces résultats sont compilés au sein du rapport Road to Net Zero qui étudie dans le détail 37 leviers de décarbonation et plus de 70 politiques publiques.

En parallèle, la Commission européenne a récemment publié son étude d’impact2 « L’objectif climatique de l’Europe à l’horizon 2040 et la voie vers la neutralité climatique d’ici 2050 pour construire une société durable, juste et prospère ».

Chacune de ces deux études constate que des investissements supplémentaires substantiels, par rapport à ceux prévus sur la même tendance (“les investissements tendanciels”), sont absolument nécessaires.

En revanche, la comparaison entre ces deux études met en exergue une différence d’approche notable : le scénario de la Commission européenne préconise une “simple” décarbonation des usages quand l’Institut Rousseau propose une transition écologique plus globale intégrant des mesures de réduction des consommations énergétiques.

De cette différence d’approche découle un triple constat. La transition écologique globale couplée à des mesures de réduction des consommations énergétiques que propose l’Institut Rousseau est :

Deux fois moins coûteuse pour l’ensemble de l’économie par rapport aux scénarios reposant principalement sur l’électrification des secteurs énergivores.

Possible, car s’appuyant sur des politiques déjà mises en œuvre dans certains pays ou régions d’Europe.

Synonyme d’une bien plus grande souveraineté économique pour les pays de l’UE, en réduisant largement leur dépendance aux importations, de fossiles et de matériaux critiques à court terme, et de gaz verts à plus long terme.

UNE TRANSITION POSSIBLE ET SOUHAITABLE

Les politiques publiques nationales et locales étudiées dans le rapport prouvent qu’il est possible de réorienter la stratégie de l’Europe vers une transition globale limitant les investissements supplémentaires grâce à des efforts mieux ciblés.

Dans le secteur des transports, l’exemple de l’Autriche et du Danemark ont démontré que doubler les parts modales du ferroviaire (fret et voyageurs) et du vélo (dans les agglomérations) était réalisable en investissant massivement dans les infrastructures. L’extension de ces modèles permettra de réduire progressivement les flottes d’automobiles et de camions et leurs coûts associés (de l’achat des véhicules aux carburants).

Dans le secteur des bâtiments, des expérimentations locales en France et l’exemple de l’Allemagne démontrent qu’il est possible d’atteindre des rythmes de rénovation performante compatibles avec les objectifs climatiques (et dépasser les 2% du parc immobilier rénové chaque année) à la double condition :
– De centrer les aides sur les rénovations globales (incluant l’isolation) et non sur les changements de systèmes de chauffage, comme c’est très majoritairement le cas actuellement.
– De fournir un accompagnement technique systématique et gratuit aux propriétaires des logements (les aides sont aujourd’hui distribuées sans accompagnement, ce qui mène à des travaux non optimaux voire à de la fraude).

D’autres exemples de « politiques exemplaires » (encadrées dans le rapport principal) ont été utilisés pour préciser les soutiens publics nécessaires dans les différents domaines, avec des besoins relativement limités dans certains secteurs (notamment l’Énergie) et nettement plus importants dans d’autres (comme l’Agriculture).

Investissements dans le secteur des puits de carbone

Les besoins d’investissements supplémentaires et de modification des soutiens publics actuels sont très disparates en fonction des pays : de 2 fois moins que la moyenne de l’UE (+1,6% du PIB) pour l’Italie et -25% pour l’Allemagne à près de 2 fois plus pour la Pologne.

Au-delà de la nécessité de renforcer les investissements, le scénario détaillé par le rapport Road to Net Zero est également conditionné à la transformation des soutiens publics actuels, notamment dans leurs modalités. Ainsi, si l’Allemagne et l’Italie ont un besoin de dépenses publiques supplémentaires moins élevé, les modalités de leurs soutiens publics actuels doivent malgré tout être fortement modifiées.

Ces différences et leurs explications sont détaillées dans les « Synthèses pays » de l’Institut Rousseau et les principaux écarts entre pays sont résumés dans son « rapport synthétique en français ».

FOCUS SUR LA FRANCE

UNE TRANSITION AU SERVICE DES ENJEUX DE SOUVERAINETÉ DE L’UNION EUROPÉENNE

Outre l’économie de nouvelles dépendances aux gaz verts, la stratégie de transition globale mise en avant dans le rapport Road to Net Zero permet, contrairement aux politiques actuelles ou aux autres scénarios évoqués (comme par exemple celui de la Commission européenne), une réduction des dépendances extérieures nettement plus rapide et importante.

  1. L’étude de la Commission européenne n’intégrant pas les investissements dans les infrastructures ferroviaires et cyclables (environ 100 milliards par an dans le rapport Road to Net Zero), l’Institut Rousseau a ajouté les investissements prévus sur le seul réseau « Trans-européen », estimés à au moins 65 milliards par an dans l’étude d’impact « réseaux de transports » de 2021 de la Commission (pour l’essentiel ferroviaires). ↩︎
  2. Europe’s 2040 climate target and path to climate neutrality by 2050 building a sustainable, just and prosperous society ↩︎

 

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