A quelques semaines de la COP 22 qui vise à concrétiser engagements pris et changements à adopter par la communauté internationale et tous les acteurs de la société en matière de changements climatiques, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a souhaité mettre en avant un enjeu figurant désormais dans le préambule de l’Accord de Paris, celui de « justice climatique ».
Les impacts du changement climatique et les capacités à s’y adapter ne seront pas les mêmes pour tous dans la société. La recherche de justice climatique engage les décideurs à limiter des inégalités déjà existantes ou nouvelles générées par le réchauffement planétaire et, au-delà, à construire l’adaptation avec une société plus juste. La France est aussi concernée.
L’avis « La justice climatique : enjeux et perspectives pour la France » rapporté, au nom de la section de l’environnement, par Mme Agnès Michelot (Personnalité associée) et M Jean Jouzel (Groupe des personnalités qualifiées), explique cette notion nouvelle qui ne figure pas encore au cœur des politiques françaises, y compris climatiques. Il apporte ensuite des préconisations concrètes pour inscrire le sujet à l’agenda politique national et international et contribuer, pour la France, à des politiques publiques visant à limiter ou réduire les inégalités sociales et économiques générées par le traitement politique du réchauffement planétaire.
L’avis a été soumis au vote de l’assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental, le 27 septembre 2016 et adopté avec 151 votes pour, 15 contre et 15 abstentions.
Avis rapporté par M. Jean Jouzel et Mme Agnès Michelot, au nom de la section de l’environnement présidée par Mme Anne-Marie Ducroux.
Le caractère presque universel de l’Accord de Paris ne doit pas masquer le fossé persistant entre les engagements des États et l’effort de réduction des émissions de gaz à effet de serre à réaliser d’ici à 2030 pour garder la possibilité de limiter le réchauffement climatique nettement en-dessous de 2 °C.
Même limité à 2 °C, le réchauffement aura des conséquences auxquelles notre société devra s’adapter. Le risque que ne se creusent les inégalités entre celles et ceux qui disposent de moyens pour le faire et celles et ceux qui n’en disposent pas est réel.
L’objectif de la justice climatique est de tout faire pour que le réchauffement n’accroisse pas les inégalités. Elle est apparue comme une thématique centrale au moment de l’ouverture de la COP 21. Revendication forte de la société civile à l’échelle internationale depuis 2003, elle est également utilisée en amont des négociations par les responsables politiques des pays en développement.
Le CESE soutient la lutte contre toutes les formes d’inégalités. L’avis souhaite contribuer par ses propositions à des politiques publiques qui permettront à l’échelle nationale de limiter et si possible de réduire les inégalités sociales et économiques générées par le réchauffement planétaire.
IDENTIFIER ET PRENDRE EN COMPTE LA VULNÉRABILITÉ SOCIALE
Les principes d’égalité et de solidarité sont à la base de la justice sociale. Le CESE recommande la réalisation d’études sur le lien entre pauvreté et changement climatique en France et sur les trajectoires de vulnérabilité des territoires les plus exposés aux risques climatiques, notamment ultra-marins. Il souhaite la mise en place de stratégies d’adaptation climatique qui prennent en compte ces vulnérabilités et l’intégration de la justice climatique aux autres politiques publiques. Il souhaite que des objectifs de réduction des inégalités environnementales de santé soient inscrits dans les plans régionaux de santé environnement en y intégrant le réchauffement climatique. Il préconise la réalisation de travaux de santé publique sur la question des extrêmes climatiques. Parallèlement, le Conseil souligne l’importance de faire bénéficier les populations les plus défavorisées de formations et de créations d’emplois liées à la mise en oeuvre de la transition écologique.« La justice climatique est une revendication forte de la société civile depuis 2003. Cet objectif doit guider de manière transversale toutes les politiques afin d’éviter que les effets du changement climatique n’accentuent les inégalités. Ne pas s’en préoccuper aujourd’hui reviendrait à ne pas répondre à des attentes sociétales prioritaires. Cela constituerait un déni de démocratie », soulignent Agnès Michelot et Jean Jouzel