Garder le cap en pleine tempête !
«L’actualité sur le développement durable se précipite aux niveaux national et européen. Le débat parlementaire bat son plein autour des projets de loi Grenelle I et de finances 2009. Sur le plan européen, le Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement des 15 et 16 octobre derniers a précédé la communication, le 17 octobre, de la Commission européenne sur le paquet Forêt, pour lutter contre le commerce illégal du bois et la déforestation. Toutefois, la crise financière a éclipsé ces événements et l’on peut se demander s’il ne faut pas craindre un ralentissement de la dynamique lancée par le Grenelle, d’une part, et par la présidence française de l’Union européenne, d’autre part.
Sur le plan français, indéniablement il y aura l’avant et l’après-Grenelle. Ce processus a enclenché une très forte prise de conscience du développement durable. Des filières se sont engagées : aéronautique, publicitaire, grande distribution, industrie chimique. Certaines entreprises ont anticipé les mesures-phares, considérant les investissements en matière de développement durable comme un facteur de compétitivité voire d’accès au marché. De leur côté, les collectivités territoriales sont déjà plus de quatre cents à avoir mis en place un Agenda 21, cadre leur permettant d’intégrer le développement durable dans leur politique.
Toutefois, certains objectifs semblent difficiles à atteindre, notamment la mise aux normes des bâtiments et l’absence de financement correspondant. Il risque d’en être de même pour l’approvisionnement en produits biologiques de la restauration collective, à hauteur de 20 % d’ici à 2012.
Par ailleurs, on peut regretter que le Grenelle se soit focalisé sur l‘environnement, d’une part, et sans tenir compte des enjeux internationaux, d’autre part. L’accessibilité des handicapés dans les bâtiments ne représente-t-elle pas un enjeu aussi important que la qualité environnementale ? En outre, de nombreuses multinationales se sentent peu concernées par le Grenelle quand elles ne réalisent que 10 % de leur chiffre d’affaires sur le territoire français. Cela prouve en tous cas que la dynamique du Grenelle peut continuer sur la base de nouveaux sujets !
Sur le plan européen, les enjeux sont importants ; si la présidence française considère les paquets Climat et Forêt comme prioritaires, c’est qu’elle voit là le seul moyen pour l’Europe d’être prête pour la suite du Protocole de Kyoto lors de la Conférence de Poznan fin 2008, préalable à celle de Copenhague fin 2009. Il s’agit de placer l’Union européenne comme leader des négociations. Parmi les trois objectifs fixés par la Commission européenne, ceux qui induisent des investissements (énergies renouvelables) ou qui mettent en jeu des quotas des émissions de gaz à effet de serre sont moins acceptés par certains Etats (comme l’Italie ou la Pologne) qui, en ces temps de crise financière, peuvent brandir le spectre de la délocalisation de leurs entreprises. C’est oublier le troisième objectif, l’efficacité énergétique, dont les retombées en termes d’économies sont immédiates.
Au milieu de ce chaos, Thierry Raes (PricewaterhouseCoopers) nous conseille, tel un capitaine au long cours, de garder le cap en pleine tempête.»
Dorothée Briaumont – directrice générale du Comité 21