Et si par une énigmatique opération, l’homme – mais pas la vie – disparaissait instantanément de la surface du monde ? A partir de cette hypothèse, Alan Weisman construit une enquête écologique riche et originale. Savez-vous qu’un tiers au moins des oiseaux ne s’apercevrait même pas de notre absence… mais d’autres êtres vivants nous pleureraient à chaudes larmes : Pediculus humanus capitis et Pediculus humanus humanus, les poux de notre tête et de notre corps, ne nous survivraient qu’une année, reniflant nos vêtements. D’autres inconsolables finiraient par disparaître de la surface du monde : les acariens qui vivent dans nos cils, les bactéries qui logent dans nos bouches… Mais plus globalement, comment alors notre planète réagirait à notre absence ?
Il faut en convenir, elle réagirait plutôt mal, avec difficulté, tant notre passage a laissé de traces, certaines quasi-indélébiles.
Quid des centrales nucléaires livrées à elles-mêmes ? Que deviennent nos animaux domestiques ? Au bout de combien de temps la végétation, le climat, les mouvements du sol effaceront-ils nos villes ?
Spécialistes en anthropologie, en astrophysique, en climatologie, en éthologie, en biologie, en écologie, etc. argumentent leurs thèses dans cet ouvrage qui se lit comme un roman de science-fiction. Tous sont d’accord sur un point et conviennent de « la façon dont les hommes ont transformé l’atmosphère, la biosphère et la Grande Bleue en une chose que jusqu’à présent seuls les volcans et les chocs des plaques continentales pouvaient produire ».
C’est aussi à cela que l’on mesure notre grandeur, notre capacité à transformer le monde. Certaines de nos réactions, de nos inventions, de nos découvertes nous survivront quelques centaines d’années. Il faut compter en dizaines voire en centaines de millénaires pour que nos pollutions soient résorbées (100 000 ans pour le CO2 , 250 000 pour le plutonium de nos bombes, encore plus pour les plastiques – plusieurs centaines de milliers d’années après notre disparition -, et des milliards d’années pour l’uranium 238).
Si le diagnostic est impitoyable et la démonstration convaincante, l’histoire de la Terre démontre a contrario que la nature a toujours su, jusqu’alors, surmonter les pires cataclysmes.
Savoir que les œuvres de Montaigne disparaîtront au mieux dans quelques centaines d’années mais que l’on pourra danser « la danse des canards » jusqu’à la fin des temps car les ondes radio sont indestructibles et voyagent à l’infini dans l’univers interstellaire, donne un sens relatif à la grandeur humaine.