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3ème rapport des Artisans de la transition sur la politique climatique de la Banque nationale suisse

5d920acf5fca3.png Les Artisans de la transition ont rendu public leur troisième rapport sur la politique climatique de la Banque nationale suisse et aimeraient vous inviter à en prendre connaissance : il n’est pas technique et il est extrêmement instructif. Voici quelques points clefs.

Incompétence

Après avoir opposé un « no comment » pendant plusieurs années à propos du réchauffement climatique, la BNS a enfin livré sa vision des risques climatiques fin 2019. Selon elle, la Suisse n’étant pas en bord la mer, ses biens matériels étant bien assurés, la redondance des centres de calcul des banques étant garantie et l’industrie lourde étant très peu présente dans le pays, les risques que pose le changement climatique à l’économie et au système financier suisses seraient modérés, voire faibles.

Message erroné

Pour prendre les bonnes décisions, les acteurs financiers scrutent les messages des banques centrales jusque dans leurs moindres détails. Sur le changement climatique, le message que la BNS envoie à toute la place financière suisse est très clair : il n’y aurait pas de problème. Et tout indique que les acteurs financiers suivent cette appréciation. Le montant des prêts que Crédit Suisse a accordé à la filière des énergies fossiles dans le monde depuis quatre ans équivaut à 1,7 fois ses fonds propres. UBS a multiplié par neuf ses investissements annuels dans le charbon en 2019. Trois quart des soixante plus grandes caisses de pension suisses n’ont aucune politique climatique.

Mauvaise gestion

Ce manque de vision et d’anticipation se reflète dans la gestion du portefeuille d’actions de la BNS. Pour la troisième fois, l’association Artisans de la transition a analysé les investissements de la BNS dans l’industrie des énergies fossiles. Selon les calculs du prestataire ISS-Ethix, la BNS est responsable de 43,3 millions de tonnes d’émissions de CO2eq par an, soit presque autant que la Suisse entière (47 millions de tonnes de CO2eq en 2017). En outre, 40 % de cet argent sont placés dans des entreprises qui n’ont aucune stratégie pour respecter l’accord de Paris sur le climat. Ce portefeuille favorise une trajectoire de réchauffement de 4 à 6°C d’ici 2100, ce qui rendra la Terre largement inhabitable à l’horizon du siècle.

Bonne nouvelle !

Rapport Artisans de la Transition : « Sur le climat, la BNS égare la place financière suisse »La bonne nouvelle est que de plus en plus d’économistes de haut vol se mettent à défendre une approche radicalement différente des risques liés au réchauffement du climat. Ces personnes qualifiées appellent à aplatir la courbe des risques climatiques. Le rapport des Artisans de la transition documente leurs prises de position, ainsi que l’initiative de la Banque centrale européenne (BCE) d’inclure les risques climatiques au coeur de son action.

Cinq propositions

Les Artisans de la transition adressent en conséquence des recommandations à la BNS et à la Finma, l’autorité de surveillance des acteurs financiers. Plus largement, ils demandent la création en Suisse d’une coordination finance-climat au sein de la Confédération pour respecter l’accord de Paris. La place financière suisse a une telle taille qu’elle peut largement aider à faire la différence. – 1) Après un long immobilisme sur le changement climatique, la Banque nationale suisse (BNS) a rejoint, en avril 2019, le Réseau des banques centrales et de superviseurs pour le verdissement du système financier. En novembre, elle a fait connaître sa vision des risques dus au changement climatique. – 2) La redondance des centres de calcul des banques, le filet de sécurité des assurances, la situation du pays loin du littoral marin et une économie très peu dotée en industrie lourde amènent la BNS à juger modérés les risques liés au changement climatique pour l’économie et le secteur financier suisses. – 3) Cette évaluation profondément défaillante induit la place financière suisse en erreur et l’expose à de très graves conséquences. De 2016 à 2019, Credit Suisse a prêté 75 milliards de dollars à la filière des énergies fossiles dans le monde, soit 1,7 fois ses fonds propres. UBS a multiplié par neuf ses investissements annuels dans le charbon en 2019. Trois quart des soixante plus grandes caisses de pension suisses n’ont aucune politique climatique. Or, des politiques climatiques ambitieuses jointes à l’évolution du marché vers des énergies moins intensives en carbone pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris sur le climat entraîneront une dépréciation massive de ces actifs. – 4) La BNS est très en retard sur la réflexion au sein des banques centrales en Europe pour comprendre et tenir compte de la gravité des risques climatiques. Réunis sous l’égide de la Banque des règlements internationaux basée à Bâle, un groupe d’éminents économistes explique très bien pourquoi : « L’accumulation de CO2 atmosphérique au-delà de certains seuils peut conduire à des impacts irréversibles, ce qui signifie que les causes biophysiques de la crise seront ensuite difficiles sinon impossibles à supprimer, écrivent-ils. Alors que, dans une crise ordinaire, il est possible [aux banques centrales] de sortir d’affaire les banques en détresse, cela sera beaucoup plus difficile avec des économies rendues non viables à cause du changement climatique. » – 5) Les risques climatiques soumettent les démocraties à un choix qui rappelle leur face à face avec la pandémie de Covid-19 : réorienter leur économie pour endiguer le plus vite possible les émissions de CO2 en acceptant de mettre à mal des pans entiers d’activités qui dépendent des énergies fossiles ou laisser filer leur trajectoire actuelle et causer des dégâts physiques tellement énormes qu’ils ne pourront que détruire l’économie ? Si elle veut garder une chance de pouvoir gérer les chocs à venir pour sauver l’économie, la BNS doit se joindre aux voix qui appellent en urgence à « aplatir la courbe des risques climatiques » pour éviter l’effondrement des économies.

A vous de jouer !

Prenez le temps de lire ce rapport et d’en parler autour de vous, faites le circuler le plus possible. Il sera peut-être de nature à suggérer de nouvelles pistes d’action et de mobilisation pour enrayer la crise climatique. Rapport Artisans de la Transition : « Sur le climat, la BNS égare la place financière suisse »Télécharger le rapport 2020  (pdf)

Pourquoi un rapport sur la BNS au moment où la Suisse est confrontée à la pandémie de Covid-19 ?

Parce que la BNS tiendra son assemblée générale le 24 avril et parce que la crise sanitaire aiguë actuelle ne doit pas masquer aux yeux des Suisses la poursuite de la crise chronique bien plus grave qui affecte le climat et bouleversera les conditions de vie des humains pendant les siècles à venir. L’arrêt momentané forcé d’une partie importante de l’économie implique la mise sur pied prochaine de plans de relance, qui devront absolument tenir compte de la donne climatique et écologique. Pour élaborer ces plans, la BNS sera mise à contribution. Or, il y a de fortes chances qu’elle n’aidera pas à en écarter les composantes de l’économie qui gonflent la courbe des risques climatiques alors qu’il est impératif de l’aplatir. D’où l’intérêt éminent d’alerter, dans un langage accessible à tous, sur ce problème aigu en cette période cruciale. Ce rapport montre le poids de la BNS au sein de la place financière helvétique et mondiale, son retard marqué dans la compréhension des risques climatiques sur les autres banques centrales européennes, en particulier la BCE, le risque que cela représente pour l’économie suisse et l’influence positive et peut-être décisive que la BNS pourrait avoir sur la dynamique économique helvétique si elle changeait sa vision des risques climatiques.

La BNS a le pouvoir d’influencer le cours du changement climatique

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