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Communiqué de l'association BLOOM, la Fondation Nicolas HULOT et le WWF

Pêches profondes : le double jeu de l’Europe

La décision du Conseil des ministres de l’Union européenne d’une baisse minimale sur les quotas de pêche pour les espèces d’eau profonde en 2011 et 2012 révèle l’incapacité de l’UE à remplir ses obligations internationales et à assurer une gestion durable des stocks de poissons. En effet, estiment Bloom, la fondation Nicolas Hulot et le WWF, les quotas de pêche pour les espèces profondes sont plus élevés que les limites pourtant déjà biaisées proposées par la Commission. Cette décision donne la possibilité aux flottes françaises, espagnoles et portugaises de continuer à surexploiter les stocks en feignant d’ignorer les avis scientifiques selon lesquels 100% des captures de poissons profonds se trouvent « en dehors des limites de sûreté biologique».

L’Union européenne enfreint ainsi l’engagement qu’elle a pris devant la communauté internationale de protéger les espèces et les écosystèmes profonds dans l’Atlantique Nord-Est. Fin 2009, l’ONU appelait les nations à « prendre d’urgence les mesures suivantes (…) : adopter des mesures de conservation et de gestion (…) afin d’assurer la durabilité à long terme des stocks des grands fonds et des espèces non ciblées et la reconstitution des stocks épuisés [[Paragraphes 119 et 120 de la résolution 64/72 de 2009.]] » et à « faire en sorte que les navires cessent leurs activités de pêche de fond tant que ces évaluations n’auront pas été effectuées ». La résolution onusienne oblige également l’UE à s’assurer que ses navires ne s’engagent pas dans la pêche de fond tant que des études d’impact des pêches profondes n’auront pas été réalisées et demande aux Etats « d’interdire les activités de pêche de fond tant que de telles mesures n’auront pas été adoptées et mises en œuvre ». En vertu de l’accord de l’ONU sur les stocks chevauchants de 1995, les résolutions onusiennes concernant les stocks profonds (qui sont « chevauchants ») s’appliquent aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des eaux communautaires. La situation dicterait l’application sans plus tarder de l’approche de précaution, ainsi que l’avait noté la Commission européenne à propos des pêches profondes : « Les TAC et les limitations de l’effort ont été fixés de manière quelque peu arbitraire. Pour appliquer dans toute sa rigueur l’approche de précaution, il aurait fallu les établir à des niveaux beaucoup plus bas, voire fermer les pêcheries concernées. » En outre, « La proposition de la Commission datant du 6 octobre rappelle explicitement qu’il n’existe pas assez de données scientifiques pour évaluer le statut, ni même la taille, des populations de poissons profonds. Cela signifie que la pêche en eaux profondes continue à être réglementée de façon arbitraire et à être conduite à l’aveugle, sans aucune garantie de durabilité pour les stocks ou d’innocuité des méthodes de pêche pour les écosystèmes profonds. Ceci, avec l’adoubement des ministres qui ont pour mission, ose-t-on le rappeler, de protéger le bien commun contre les intérêts à court terme de certains. Cette décision est une farce qui coûte cher à la société » a déclaré Claire Nouvian, présidente de l’association BLOOM. Rappelons que l’activité défendue par le ministre français Bruno Lemaire à Bruxelles ne concerne qu’environ 12 navires industriels français [[12 navires industriels capturent plus de 90% des poissons profonds débarqués par la France.]] et que plus de la moitié d’entre eux appartient au groupe Intermarché. « On peut se demander pour qui travaille le ministre » commente Claire Nouvian. Ces activités destructrices sont lourdement subventionnées par l’Europe et l’Etat français. « Après la position désastreuse de la France sur le thon rouge, Bruno Lemaire s’impose définitivement comme le ministre de la pêche industrielle destructrice en soutenant les pêcheries chalutières de grands fonds » commente Charles Braine du WWF. Une bonne nouvelle émerge de cette décision décevante : le Conseil a convenu de fixer à zéro les quotas de prises accessoires de requins profonds, mais étant donné que les pêches profondes sont autorisées pour d’autres espèces, cela signifie que les requins, dont certaines espèces sont en danger critique d’extinction dans l’Atlantique Nord-Est, continueront à être capturés. « Si les ministres des pêches avaient été sérieux quant à l’application des avis scientifiques et des engagement pris par l’Europe, ils auraient décidé de fermer les pêcheries profondes jusqu’à ce qu’une gestion durable des stocks soit garantie, des études d’impact menées et les écosystèmes profonds protégés » continue la présidente de BLOOM. « Cette décision fragilise l’engagement de la France de gérer les pêches selon une approche écosystémique ainsi que l’engagement présidentiel de fonder la totalité de nos décisions publiques de gestion des ressources marines sur la base d’avis scientifiques fiables, indépendants et partagés » constate Ludovic Frère de la Fondation Nicolas Hulot. Une « rupture fondamentale » que le Président de la République avait proposée au Havre « à tous pour les années à venir »… et qui a fait long feu. En 2011, l’Assemblée Générale des Nations Unies passera en revue les actions prises par l’UE et les autres nations de pêche profonde en haute mer pour appliquer la résolution de 2009.

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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