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Décryptage

Les magasins bio face à la crise

On dit que les magasins bio sont en perte de vitesse. A part en région parisienne où l’activité reste stable, de plus en plus de boutiques bio ont un chiffre d’affaire en baisse. La faute à la crise ? Pas seulement. Si beaucoup de clients se tournent désormais directement vers les producteurs indépendants et les Amap, beaucoup d’entre eux sont captés par des offres de plus en plus agressives émanant de la grande distribution à l’image de Auchan qui a lancé en mai une importante campagne de communication sur 50 produits bio à moins d’un euro. Et c’est sans compter sur de nouvelles enseignes qui tentent de s’imposer dans un marché qui résiste, globalement bien à la crise.

Les magasins bio en perte de vitesse ? Depuis plusieurs mois, à l’image du réseau Biocoop, les boutiques spécialisées en distribution de produits biologiques connaissent un net tassement d’activité. Habitués depuis plusieurs années à surfer sur une croissance exceptionnelle, certains magasins font face pour la première fois à une évolution négative de leur chiffre d’affaires. « Ça nous tire depuis six mois. La chute est de l’ordre de – 1 à – 5% et se traduit surtout par une baisse du panier moyen de nos clients », confie au Parisien, Claude Colin, la directrice de la Coopérative d’alimentation biologique d’Anjou (Caba) qui chapeaute trois boutiques Biocoop de l’agglomération d’Angers. « La crise, qui nous avait épargnés ces deux dernières années, nous rattrape. Depuis janvier, nous constatons une régression de l’ordre de 5 à 7% qui se poursuit jusqu’à maintenant », constate également Jean-Marc Lachat, créateur de l’enseigne So Bio dans l’agglomération bordelaise. « Depuis janvier, février, mars et avril, on a dans certaines régions, des magasins qui soufrent d’une baisse d’activité » confirme également Antoine Lemaire du magazine Bio Linéaire. Sur ce sujet, écoutez le reportage de Mila Ta Ninga diffusé sur France Info en cliquant ici. Pas de panique pour autant puisque les mieux organisés s’en sortent tout de même. Par exemple, pour la coopérative Bio Monde, la hausse du chiffre d’affaire est tombée de 15 à 20 % à de 5 à 10 %. Mais même avec cette baisse, les 152 magasins tiennent le coup. Les causes Comment expliquer les difficultés rencontrées par les boutiques spécialisées ? Beaucoup refusent de voir dans ce ralentissement la seule conséquence de la baisse du pouvoir d’achat.

La guerre des prix

Si elle est difficile à quantifier, la concurrence des rayons bio des grandes surfaces est une évidence. AUCHAN propose notamment depuis le début du mois de mai, une offre de 50 produits alimentaires bio à moins d’un euro qui seront vendus toute l’année dans l’ensemble de ses magasins. Le distributeur précise que « ces produits sont tous issus de l’Agriculture biologique, et porteurs soit du logo AB, soit du label bio européen. Une majorité est de provenance française, les autres étant issus de l’Union européenne ». AUCHAN explique sa démarche : « un nombre croissant de consommateurs est attiré aujourd’hui par les produits bio. Cependant, le principal frein à l’achat demeure dans la plupart des cas le prix. Or, en France, le grand commerce représente 42 % de ce marché. L’action des principaux acteurs du secteur est donc déterminante pour permettre à tous ceux qui le désirent de pouvoir consommer ces produits ». Le distributeur a ainsi lancé en 2009 d’n îlot de 8 fruits et légumes à moins de 1 euro toute l’année (bananes, citrons, pommes de terre, tomates, carottes, oignons…). Pour mettre en place cette nouvelle offre qui concerne 50 produits d’usage quotidien (lait, crème fraîche, fromage, conserves de légumes, yaourts, pâtes, chocolat, biscuits,…), AUCHAN affirme avoir « réalisé un effort important en compressant ses coûts afin de baisser le prix de l’ensemble de ses produits en-dessous du seuil de un euro. L’objectif est, selon le modèle de discount qui a permis à la grande distribution au cours de son histoire de rendre accessibles de plus en plus de produits aux consommateurs, de compenser à terme cette baisse de rentabilité par une progression du nombre d’articles achetés par les clients ».

Le succès des Amap

« Des clients ont changé aussi leurs habitudes, analyse Claude Colin dans les colonnes du Parisien. Ceux qui résident le plus loin ont tendance à venir moins souvent. Certains ont trouvé à se fournir près de chez eux, directement chez les producteurs, via des Amap ou sur les marchés. C’est une logique qui a du sens pour nous aussi et qu’on ne va pas condamner. » Mais si le ralentissement enregistré en 2009 n’avait pas outre mesure surpris les responsables de boutiques bio, la situation actuelle les oblige à se repositionner et à communiquer encore. « Pour nous, insiste la responsable des Biocoop angevines, le message à privilégier reste celui d’une production biologique en lien avec son territoire. »

Les nouveaux réseaux de distribution

Les consommateurs connaissaient déjà les Biocoop, La Vie Claire, Bio Monde mais depuis quelques années le nombre de réseaux de distribution spécialisées en bio explosent à l’image de So Bio, Naturéo et dernièrement Biostore. Biostore c’est la dernière nouvelle enseigne spécialisée dans le bio. Avec près de 10 000 références sur une surface de 1 000 m2, dont deux tiers consacrés à l’alimentaire et un aménagement sobre et chaleureux associant mobilier en bois et couleurs franches, Biostore risque de ringardiser beaucoup de petits magasins. Les deux premiers magasins viennent d’ouvrir à Saint-Brice-sous-Forêt (95) et à Chambly (60). Quatre autres Bio Store verront le jour dans les 18 prochains mois : Beauvais (60), Etampes (91) et Avignon (84). Philippe Enjolras, le dirigeant espère ouvrir 20 à 25 points de vente d’ici à 2013, en région parisienne et vallée du Rhône. Il ambitionne de réaliser 3,5 à 4 M€ de chiffre d’affaires par point de vente. Bio Store fait la part belle à l’épicerie et aux marques spécialistes, Bonneterre, Favrichon, Grillon d’or, etc. Seules Alter Eco, Babybio et Vitabio sont communes aux GMS, mais réduites à la portion congrue. L’enseigne propose déjà son offre d’entrée de gamme pour le rayon sec, Biothentic, positionnée sur les niveaux inférieurs. Deux gondoles sont dédiées à la diététique (produits sans gluten, sans sel, sans sucre, etc.). L’assortiment vrac est imposant avec 48 trémies et 28 bacs de céréales, fruits secs, etc. En revanche, le rayon frais se limite aux fromages et à quelques références de charcuterie. La nouvelle enseigne fait l’impasse sur la boucherie. Les surgelés, le frais, les fruits et légumes (tous en meuble réfrigéré) occupent l’allée pénétrante. Bio Store s’illustre par un linéaire cosmétique impressionnant. Le supermarché propose aussi des piles rechargeables, des produits d’entretien écolo, des peintures sans solvant, des poêles en fonte sans revêtement, des garnitures d’oreillers, etc. Un vaste corner textile présente même la dernière collection Petit Bateau en coton bio. S’y ajoute également un coin librairie. Enfin pour fidéliser sa clientèle, Bio Store propose des promotions sous forme de bons d’achat : 10 à 20 % selon les familles de produits, offerts directement sur le ticket de caisse. Si cela vous rappelle les méthodes de la grande distribution, ce n’est pas un hasard… L’initiateur du projet est un ancien du Mouvement Leclerc… Si le réseau de distribution s’étoffe avec de nouvelles enseignes spécialisées en bio, il faut aussi noter que même les jardineries Botanic étendent désormais leur territoire à l’alimentaire bio et aux produits de consommation courante verts. Depuis 2008, en plus de son offre jardinerie, animalerie, maison et décoration, Botanic se lance dans l’épicerie et primeurs entièrement biologiques, les produits d’entretien écologiques, les cosmétiques certifiés, la restauration rapide (« café philo-écolo») la librairie et même la co-édition avec Actes Sud sur le sujet de l’environnement et du DD… L’objectif annoncé de l’enseigne ? Devenir « la première enseigne de produits naturels, biologiques et écologiques ». En conclusion On pourrait aussi répertorier les nombreux sites de vente en ligne… mais comme l’auriez compris, la crise est loin d’être l’unique et principale cause que traversent aujourd’hui certains réseaux de distribution bio. Ce marché très fructueux est désormais extrêmement concurrencé. Encore faut-il savoir si les producteurs et les consommateurs s’y retrouvent en terme de prix et de qualité…

 

Sources de l’article : France Info – Le Parisien – Linéaires – Auchan

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Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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