Dans cet article, on revient aux origines qui ont amené à proposer François d’assise comme patron des écologistes. Un autre article suivra sur 2 aspects très populaires de sa vie : la prédication aux oiseaux et son cantique des créatures. Enfin, on fera le lien avec le développement durable et le titre de cette rubrique : ‘fraternité’.
La proposition de prendre François d’Assise comme modèle a été faite par un scientifique américain, Lynn White, professeur d’histoire médiévale dans plusieurs grandes universités américaines (Stanford, Princeton, UCLA), dans un article paru dans la prestigieuse revue Science, en 1967 . Au début de son article, Lynn White, s’en prend à la tradition judéo-chrétienne, pensant que cette tradition a incité à l’exploitation du monde naturel, et cela pour les raisons suivantes : – La Bible affirme la domination de l’homme sur la nature (Gn 1, 28 : ‘emplissez la terre, soumettez-la, dominez sur les poissons, les oiseaux, … tous les animaux). – Elle fait une différence entre l’homme (formé à l’image de Dieu) et le reste de la création qui n’a ni âme, ni raison et se trouve donc dans un statut inférieur. Un accroissement de science et de technologie, poursuit-il, n’aidera pas à résoudre la crise écologique ; ce sont les idées fondamentales sur le rapport entre l’homme et la nature qui doivent changer. Il faut abandonner les attitudes supérieures, méprisantes qui nous font user de cette terre pour nos plus petits caprices. Il en vient alors à suggérer d’adopter François d’Assise comme modèle pour promouvoir une ‘démocratie’ de la création dans laquelle toutes les créatures seraient respectées et l’autorité de l’homme sur la création serait délimitée . Cet article célèbre, souvent cité, a donné naissance à de nombreuses réponses. 1- Au sujet de la tradition judéo-chrétienne, les critiques ont porté sur les points suivants : – Il ne faut pas faire du seul verset de Gn 1, 28 un pont surchargé d’interprétations sans les mettre en vis-à-vis avec d’autres textes de la Bible traitant du rapport homme / création. – Une étude exhaustive sur l’interprétation historique de Gn 1,28 a montré qu’à aucun moment, ce verset n’a été interprété pour justifier l’exploitation de l’environnement de manière égoïste … – Plus récemment, une attention nouvelle portée au contexte immédiat des 2 récits de la création dans le livre de la Genèse, fait apparaître une relation homme/ création qui n’est pas celle d’une ‘gestion’, voire d’une ‘soumission’, mais de ‘compagnonnage’. Dans cette perspective, le verset central n’est plus Gn 1,28, mais Gn 2, 18 : ‘Il n’est pas bon que l’homme soit seul’. C’est la raison pour la création des bêtes sauvages et des oiseaux (Gn 2,19). Le monde naturel n’est pas simplement prévu pour sa soumission aux êtres humains, mais aussi pour être leur compagnon… On n’est pas loin du titre de la rubrique de ce site : ‘Fraternité’. Aujourd’hui, ce thème du ‘compagnonnage’ a été noyé dans celui de ‘l’intendance’, de la ‘gestion’. Il faut le retrouver : Il implique une mutualité ; il exclue la réduction de l’un ou l’autre côté de la relation à un outil en faveur des buts de l’autre. 2- Au sujet de sa proposition de prendre François d’Assise comme modèle pour une ‘démocratie’ de la création, Jean-Paul II y donna suite 12 ans plus tard, le 29 novembre 1979, présentant au monde catholique, et à tous ceux qui voudront l’accepter, st François d’Assise comme ‘patron des écologistes’ n y ajoutant ses propres motivations. Dans un prochain article, je voudrais présenter 2 ‘zooms’ sur des événements de la vie de François d’Assise, qui l’ont rendu si populaire : sa prédication aux oiseaux, et son cantique des créatures. On verra alors le lien avec la perspective d’un développement durable. A la semaine prochaine ! François Fine, Avignon, 18 mai 2009.