Une simple éruption volcanique en Islande et c’est tout le système qui s’enraye. En quatre jours près de 70 000 vols ont du être annulés dans une trentaine de pays européens. C’est un rappel à l’ordre de la nature : un nuage de cendres et c’est au delà de la plus grande paralysie du trafic aérien, la démonstration de la fragilité de notre système mondialisé dont les conséquences économiques, nous dit-on, seront énormes.
Mais la vraie inquiétude des vulcanologues ne repose pas uniquement sur les gigantesques colonnes de fumée qui s’échappent actuellement du Eyjafjöll. Un autre volcan à quelques kilomètres de là est surveillé de près par les autorités islandaises. Le Katla fait partie de la zone volcanique dans le Sud de l’Islande où se situe l’Eyjafjöll. Il est considéré comme lié à l’Eyjafjöll, qui s’est lui-même réveillé après 187 ans de repos provoquant le chaos dans le ciel européen. Or le Katla est l’un des volcans les plus actifs et les plus destructeurs par le passé d’Islande. Si la dernière éruption de Katla remonte à 1918, et si le géant endormi ne montre aucun signe d’activité, les Islandais savent en effet que ses éruptions ont souvent par le passé suivi un an ou deux après une première éruption de l’Eyjafjöll. « Ce n’est pas vraiment la question de savoir s’il va entrer en éruption, mais plutôt quand (…) Et là, on aura un vrai problème », a confié ce week-end un islandais à un journaliste de TF1. Le Laki, le volcan qui aurait déclenché la Révolution française « La nature est en interaction avec la vie des humains, même si ceux-ci tentent d’en diminuer les effets », rappelait ce week-end La Tribune de Genève. Et la nature est mondialiste depuis longtemps : le volcan islandais Laki, conjointement au volcan japonais Asama entré en éruption en 1783, a influencé tout l’hémisphère nord pendant des années. Le quotidien suisse nous rappelle ainsi que le Laki situé dans la même zone que le volcan actuellement en éruption aurait eu d’énormes conséquences géopolitiques notamment en France… La Tribune de Genève revient donc sur une page d’histoire : « L’éruption du Laki commença le 8 juin 1783. Au début elle fut explosive, puis elle continua en émission de lave pendant des mois, jusqu’en février 1784. Les cendres recouvrirent l’île, et de 50% à 80% des animaux d’élevages moururent. La famine qui suivit décima environ 20% de la population islandaise. Mais ce n’est pas tout. En cet été 1783, un anticyclone puissant et centré durablement sur le nord de l’Atlantique envoya les fumées vers le reste de l’Europe, comme ces jours. Il faut savoir que l’«on estime que 122 millions de tonnes de dioxyde de soufre furent émis dans l’atmosphère, l’équivalent de trois fois les émissions industrielles annuelles en Europe et l’équivalent d’une éruption comme celle du Mont Pinatubo en 1991 tous les 3 jours. L’émission de dioxyde de soufre coïncidant avec des conditions climatiques inhabituelles provoqua un épais brouillard sulfuré qui se répandit à travers l’Europe occidentale, provoquant des milliers de morts durant 1783 et l’hiver 1784. Un nuage de poussière recouvrit les 2/3 de la France et se déposa en partie au sol. Les années qui ont suivi l’éruption du Laki en 1783 furent marquées par des phénomènes météo extrêmes, dont des sécheresses et des hivers très rigoureux, puisqu’on disait que le pain et la viande gelaient sur la table de la cuisine et les corbeaux en plein vol. On vit une accentuation du petit âge glaciaire. La ligne de grain orageux qui traversa la France du sud au nord, en été 1788, détruisit presque toutes les récoltes du pays. On pesa des grêlons de 10 livres (5 kgs). La situation des paysans fut si désespérée que la révolution éclata en 1789. Ces modifications climatiques et le volcan Laki ne sont peut-être pas seuls en cause, mais les historiens admettent que leur influence fut considérable dans les événements politiques qui mirent fin à la royauté. On estime que le nuage de cendre modifia le régime des moussons en Afrique, faisant baisser le niveau du Nil et l’irrigation de la plaine céréalière d’Egypte ». Pour l’instant, nous n’avons encore aucune raison de nous inquiéter au-delà du désagrément qu’occasionne l’éruption du Eyjafjöll. Emmanuel Bocrie, ingénieur prévisionniste à Météo-France, interrogé par Le Point précise : « Si l’éruption s’arrête demain, elle n’aura eu aucune conséquence. En revanche, si les émissions continuent pendant plusieurs mois, les météorologues percevront une baisse de la luminosité et de l’ensoleillement au sol pendant un à deux ans, ainsi qu’une baisse des températures de 0,2 à 0,4 degré pendant la même durée, ce qui a été le cas pour l’éruption du Pinatubo en 1991. Mais « monsieur Tout-le-Monde » ne s’en apercevra même pas… »VIDÉOS
Épais nuage de cendre en Islande. Le no comment d’EuroNews : L’éruption du volcan Eyjafjöll vue du ciel. Images de l’éruption filmée, par les gardes-côtes islandais:Pour aller plus loin
Je vous invite à découvrir le site « VOYAGE AU CŒUR DE LA CLIMATOLOGIE » qui répertorie les différentes éruptions volcaniques et leurs effets sur le climat. Vous découvrirez ainsi que l’éruption du Pinatubo (philippines) en 1991 aurait entraîné une baisse de la température de 0,10 à 0,50°C et 1,50°C aux latitudes élevées pendant environs 3 ans. Des chercheurs supposent que l’effet atmosphérique de cette éruption pourrait avoir eu pour conséquences les ouragans Andrew et Iniki à l’automne 1992, de même que les pluies abondantes dans le Midwest américain à l’été 1993. Autre exemple donné par ce site, l’éruption du krakatoa en 1883 : Avec une puissance équivalente a 10.000 fois la bombe d’Hiroshima, l’explosion a été entendue jusqu’à 5.000.km. En Europe il a été enregistré une baisse de 10 à 20 % de la transparence atmosphérique pendant 3 ans. Cette baisse de la luminosité dû aux aérosols a fait chuter la température moyenne mondiale d’environ 0,30°C. A cause des cendres dans l’atmosphère, pendant 3 ans lors du coucher du Soleil le ciel devenait rouge aussi bien aux États-Unis, qu’en Europe… pour en savoir plus, cliquez ici.Prisonniers du paradis, par Hervé Kempf
Hervé Kempf a publié une chronique dans Le Monde (édition du 21 avril 2010) qui a retenu mon attention. Il écrit : « Ayons une pensée émue pour les milliers de voyageurs dont les plans ont été contrariés. Pensée émue. Et goûtons la surprise toujours renouvelée du torrent de la vie, qui bouscule l’ordonnancement des flux et des êtres, rend possible l’impossible et réel l’inimaginable. Un volcan explose, et les avions s’arrêtent. Qui l’eût crû ? » […] « Et même si l’avion est devenu un transport de masse, il reste l’apanage d’une minorité : 15 millions de Français montent à bord d’un aéronef chaque année (selon la Direction des transports aériens, « Note de synthèse et d’actualité », n° 14, juillet 2003). Un habitant sur quatre. Pendant quelques jours, les trois autres ont discrètement souri ». Pour ce billet dans son intégralité cliquez ici.