Devant le refus obstiné de certains professionnels de s’engager vers l’instauration d’une véritable corégulation de la publicité en France, l’Alliance pour la Planète a décidé de mettre un terme à sa participation au groupe de travail post-Grenelle sur la réforme de la régulation publicitaire.
Lorsqu’en 2006, l’Alliance pour la planète (coalition de plus de 80 ONG) a entamé sa campagne de dénonciation de l’utilisation abusive faite par la publicité de l’argument écologique (greenwashing), peu d’observateurs auraient pensé que la campagne rencontrerait l’écho qu’elle a connu. Reprise au niveau européen par le réseau Friends of the Earth et aux Etats-Unis par des sites comme greenwashingindex, cette campagne a permis la prise de conscience générale que l’on ne pouvait pas dire n’importe quoi sur l’engagement environnemental d’une entreprise. Elle a pointé aussi l’inefficience du système d’autorégulation incarné par le Bureau de Vérification de la Publicité (BVP).
Près d’un an après le lancement de cette campagne, un sondage LH2/Libération publié le 24 octobre 2007, montrait que 73% des français interrogés exprimaient leur désir de voir interdire aux entreprises peu respectueuses de l’environnement de faire des publicités sur ce sujet. Conscient du rôle de la publicité dans le développement d’une consommation responsable, Jean-Louis Borloo, à l’issue du Grenelle de l’Environnement, avait pris deux engagements : encadrer de façon plus stricte la publicité dans son utilisation de la thématique environnementale et faire évoluer le système de régulation publicitaire vers une logique de corégulation avec une nouvelle instance.
Après trois réunions du groupe de travail « publicité responsable » – alors que les ONG ont plusieurs fois réclamé une refonte du système passant par la création d’une haute autorité indépendante ou au moins la mise en place d’un système partenarial donnant aux représentants de la société civile une place pleine et entière – les pouvoirs publics ont réduit les solutions possibles au seul projet présenté par l’actuel BVP.
Pour Jacques-Olivier Barthes, directeur de la communication du WWF-France « le chantier de la règlementation des déclarations environnementales semble aller dans le bon sens mais en ce qui concerne le dossier de la corégulation publicitaire on constate un réel blocage, voire une régression par rapport aux décisions issues du Grenelle ». En effet, le projet du BVP « d’autorégulation de la publicité ouverte et concertée » n’offre aucune des ruptures permettant l’émergence d’un système de corégulation innovant comme cela avait été décidé dans les conclusions du Grenelle de l’Environnement. Comme à chaque fois qu’il doit affronter une remise en cause du principe d’autorégulation, le BVP propose des aménagements marginaux qui n’ont pour unique finalité que d’occulter l’essentiel : la remise en cause de la gouvernance actuelle de la régulation publicitaire et la place nécessaire à accorder à la société civile. L’Alliance pour la Planète a donc décidé de mettre un terme à sa participation à un groupe de travail qui s’est orienté délibérément dans la mauvaise direction.
Pour Serge Orru, directeur général du WWF-France, les ONG ne sauraient se satisfaire de ce statu quo sur l’autorégulation publicitaire : « Au WWF-France, nous travaillons en confiance et en intelligence avec les entreprises depuis plus de dix ans. Nous observons au quotidien une vraie volonté d’avancer plus en avant avec les ONG sur les questions de communication responsable. Nous ne comprenons pas l’attitude frileuse de certains membres du BVP ». L’Alliance pour la Planète relancera dans les prochaines semaines son observatoire indépendant de la publicité (OIP) au sein duquel elle souhaite associer associations de consommateurs, annonceurs, agences et média ayant en commun l’envie et la volonté de concilier esprit d’entreprise, respect du consommateur et préservation de la planète.