La consommation du bio en France est en baisse de 3,1% en valeur selon une étude de l’Institut de recherche et d’innovation publiée en février 2022. Sans doute à cause de la baisse du pouvoir d’achat. Mais, alors que c’est aujourd’hui que la planète a consommé toutes ses ressources disponibles pour l’année, nos choix ne sont pas anodins : l’alimentation de demain se prépare aujourd’hui, comme le rappelle le récent rapport de la Cour des Comptes sur l’agriculture biologique. Guy Deberdt, directeur général de Kaoka, spécialiste du cacao bio et éthique, a rédigé un avis d’expert sur le sujet, mettant notamment en avant que la déforestation et le pouvoir d’achat forment une spirale infernale.
Face à l’inflation provoquée par la guerre en Ukraine, le pouvoir d’achat est devenu la préoccupation majeure des Français. Soumis à des arbitrages budgétaires, les consommateurs ont tendance à se détourner des produits bio, qui ont la réputation d’être plus chers. Or, choisir un produit conventionnel moins cher, au détriment d’un produit bio, n’est pas sans conséquence sur la planète et l’avenir de notre alimentation.UN CHOIX COURT-TERMISTE
En choisissant un chocolat conventionnel, dont on ignore les conditions de culture du cacao, on prend le risque d’encourager l’utilisation des pesticides, destructeurs pour la biodiversité locale, pour la qualité de l’eau, etc. Mais surtout, si les producteurs de cacao ne sont pas accompagnés pour faire face aux difficultés rencontrées (vieillissement des plantations, appauvrissement des sols, sécheresse), ils sont poussés à étendre leurs zones de culture au détriment de la forêt pour maintenir leur production et donc leurs revenus.DÉFORESTATION ET POUVOIR D’ACHAT : UNE SPIRALE INFERNALE
Le rôle des forêts est primordial dans l’évolution de notre climat. La déforestation aggrave le phénomène de dérèglement climatique et ses impacts : catastrophes naturelles, canicules, sécheresse, etc. Le dérèglement climatique a un impact direct sur les récoltes de matières premières du monde entier, entraînant des pénuries, et donc une hausse des prix des denrées alimentaires, pénalisant au final encore plus le pouvoir d’achat…QUELLES SONT LES SOLUTIONS ?
Suite au dernier rapport du GIEC, alarmant, et à l’heure où chacun se pose la question du “comment agir”, il est indispensable, pour assurer la nourriture d’aujourd’hui et de demain, d’accompagner les producteurs dans un mode de production respectueux de l’environnement et régénérateur de biodiversité. Les industriels doivent jouer leur rôle en menant une politique de soutien aux producteurs : comprendre leurs problématiques (baisses des récoltes, vieillissement des plantations, sécheresse, etc), les accompagner sur le long terme avec des solutions durables et bien sûr, leur garantir un prix rémunérateur. Car ce sont bien des revenus insuffisants qui poussent des milliers de cacaoculteurs à étendre leurs cultures, au détriment de la forêt, pour augmenter leur production, aggravant ainsi le phénomène de déforestation. Par conséquent, l’amélioration de la productivité de leurs plantations est un enjeu majeur. Si dans l’agriculture conventionnelle, le recours aux engrais chimiques est usuel, cette pratique, dépendante des énergies fossiles, nocive pour l’environnement et coûteuse pour les producteurs, ne peut plus perdurer, d’autant que des solutions d’agroécologie performantes existent. Ainsi, recréer dans les plantations un système agroforestier complexe permet de mieux résister à l’apparition de maladies, à la sécheresse, à l’érosion des sols. La redensification et la rénovation des arbres vieillissants permettent d’améliorer la productivité des plantations de manière significative, tout comme la restauration des sols, appauvris par des cultures intensives. À titre d’exemple, en Equateur, la production moyenne d’une plantation vieillissante est de 350kg/ha, contre 1250 pour une plantation rénovée. C’est l’ensemble de ces pratiques agro-écologiques qui doivent être sérieusement menées pour permettre aux cacaoculteurs de mieux vivre et de mieux produire en respectant la planète. Tous à notre échelle, industriels comme consommateurs, nous avons la capacité de changer les choses en commençant par se poser des questions sur la provenance, les modes de culture et en choisissant un produit ou une matière première qui répond aux exigences des défis sociaux et environnementaux de notre siècle. Car acheter un produit labellisé agriculture biologique – plutôt qu’un produit conventionnel – assure aux consommateurs un meilleur retour sur investissement, comme le souligne le rapport de la Cour des Comptes de juin 2022 : « L’impact favorable de l’agriculture biologique sur l’environnement est également bien documenté », rappelant ses effets positifs sur la qualité de l’air, de l’eau, la fertilité des sols et le respect de la biodiversité. « La littérature scientifique reconnaît ses bénéfices sanitaires et environnementaux ». Fort de ce constat, l’Etat doit impérativement soutenir les producteurs bio pour réaliser ses objectifs en matière de transition écologique. Et c’est d’ailleurs ce qu’a souligné la Commission Européenne fin mars, en s’inquiétant du projet français qui s’apprêtait à subventionner au même niveau la certification biologique et le label Haute Valeur Environnementale (HVE), alors que ce dernier est beaucoup moins contraignant. Chacun a donc son rôle à jouer, producteur, industriel, consommateur, sans oublier l’Etat. Chez Kaoka, nous avons cette conviction : au-delà des modes de production sans intrant, une agriculture biologique exigeante, ou plus largement une agroécologie au service d’entreprises engagées, est la seule à réellement assurer aux consommateurs un modèle d’alimentation durable et accessible pour tous.