Libération propose aujourd’hui sa nouvelle formule et parmi les cinq principaux titres développés par le quotidien, un entretien avec Nicolas Hulot qui revient sur le débat qui agite la classe politique, la fameuse Contribution Climat Energie. Car si son principe est acté, ce sont ses modalités d’application qui posent des problèmes et inquiètent les ménages. Deux sondages publiés en fin de semaine dernière indiquent que les Français ne voudraient pas de cette taxe verte. Ils seraient 66 % à y être opposés, selon l’étude de TNS-Sofres publiée jeudi, et 74 % d’après celle réalisée par l’UFC-Que Choisir et CSA, vendredi. Cette dernière met en évidence la raison de ce rejet : 59 % des sondés jugent la taxe carbone « injuste, car elle pénalise ceux qui sont obligés d’utiliser leur voiture tous les jours ». Nicolas Hulot, qui avait porté l’idée de la taxe carbone lors de la campagne présidentielle de 2007, dément dans Libé que cette taxe « c’est 7 centimes de plus à la pompe et c’est inefficace », comme l’affirment ses adversaires, parmi lesquels Ségolène Royal.
« C’est une présentation étriquée et simpliste », explique Nicolas Hulot dans cet entretien publié aujourd’hui dans Libération, ajoutant que « fustiger la Contribution climat énergie dans son principe, après l’avoir soutenue, ce n’est pas très responsable ». « Aucun expert objectif ne doute de l’efficacité du signal prix pour agir sur les comportements », souligne-t-il. « Cela dit, le contexte de la rentrée politique a sans doute pesé, notamment à gauche », a-t-il ajouté en faisant référence à l’opposition de Ségolène Royal. « Ce n’est pas un sujet sur lequel il faut polémiquer », a-t-il jugé. « C’est trop grave, ne faisons pas de démagogie. C’est contraire à l’esprit du Pacte écologique que tous avaient signé », a-t-il dit. « Ce qui est injuste et dangereux, poursuit Nicolas Hulot, c’est de critiquer sans rien proposer de structurant et de livrer ceux qui sont en situation de précarité aux effets d’une crise majeure sans anticiper ». « La contribution climat énergie doit s’appliquer à tous » et son « produit peut permettre d’accompagner les gens en difficulté », a-t-il dit, demandant des mesures d’accompagnement « pour ceux qui travaillent la nuit, qui n’ont pas accès aux transports en commun ». Nicolas Hulot souligne dans cet entretien qu’« il faudra durcir » le marché des quotas qui touche les émissions industrielles concentrées. Par ailleurs, il rappelle que sa Fondation avait proposé de reverser la même somme pour tout le monde, à l’exception des revenus élevés : « Dans la majorité des cas, selon nos modèles, ceux qui ont les revenus les plus faibles allaient recevoir plus que ce qu’ils payaient ». S’il estime « productif qu’on acte le principe de la contribution climat énergie dans la loi de finances 2010 », il propose aussi « que l’on se donne deux mois supplémentaires pour organiser un débat constructif entre la gauche et la droite sur l’affectation des ressources, l’équité de la taxe ».La réponse de Ségolène Royal
Ségolène Royal persiste et signe. Elle se justifie dans un mail adressé à ses partisans : « Vous avez entendu ma position contre la taxe carbone. Sans mon intervention, le débat n’aurait pas eu lieu et les Français seraient sûrement assujettis à un nouvel impôt inefficace et injuste. Il s’agissait de remplir les caisses de l’état sur le dos de l’écologie, puisque des millions de Français n’ont pas le choix. Ma position n’a jamais varié contrairement aux accusations entendues. Au moment de la signature du pacte de Nicolas Hulot j’ai posé des conditions très fermes à la taxe carbone et j’ai proposé une fiscalité écologique intelligente (bonus malus, taxe sur la compagnie pétrolière…) Voir la lettre du 5 Janvier 2007 adressée a Nicolas Hulot 10 paragraphes avant la fin » : « Instaurer une taxe carbone en croissance régulière Une taxe carbone qui s’appliquerait à tous les combustibles fossiles, si j’en ai bien compris la logique, ne me semble pas la meilleure solution dans le contexte énergétique français marqué par une surproduction et une surconsommation d’électricité. Cette taxe risque de favoriser la consommation d’électricité et donne un avantage comparatif indu à la production électronucléaire. Surtout, son caractère indifférencié la rend socialement injuste et difficile à supporter pour les catégories les plus défavorisées de la population auxquelles les responsables politiques doivent garantir l’accès aux énergies et aux technologies propres. Plutôt que de mettre en exergue la taxe carbone, je propose, puisque c’est l’objectif qui compte, de mettre en place une politique énergétique ambitieuse fondée sur les économies d’énergie, l’efficacité énergétique et la promotion des solutions renouvelables diversifiées et décentralisées. J’intègrerai la transformation du secteur des transports dans cette politique énergétique. La fiscalité – dissuasive et incitative – sera un instrument de cette politique. »