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Mardi 28 juin 2011 à 20h40 sur Arte

La Malédiction de l’or noir : comment le pétrole détruit notre environnement

Quand la plate-forme pétrolière “Deepwater Horizon” a explosé dans le golfe du Mexique en avril 2010, le monde entier a retenu son souffle. Mais la catastrophe ne représente que la partie émergée d’un scandale d’une ampleur planétaire. Le mardi 28 juin 2011 à 20h40 ARTE montre les documentaires « BP en eaux trouble » et « Carbonisés – Les pétroliers ennemis du climat » – deux rapports sur ​​le pétrole, le pouvoir et la corruption.

20h40 : BP en eaux troubles

Déjà un an après la catastrophe de la plateforme Deepwater Horizon et le déversement de 650 000 mètres cubes de pétrole dans le Golfe du Mexique, BP crie victoire en déclarant que le pétrole a pratiquement disparu. Mais la réalité semble différente de l’affirmation de BP. Depuis 20 ans, l’enquêteur Greg Palast est sur la piste de BP et a trouvé que la catastrophe dans le Golfe du Mexique n’est pas le seul pour lequel BP porte la responsabilité. Globalement, BP est impliqué dans les crimes environnementaux. Depuis le Golfe du Mexique, Greg Palast s’envole pour l’océan arctique pour découvrir que BP y a déversé 750 000 litres de pétrole. Le problème ? BP n’avait pas testé l’état du gazoduc depuis huit ans. La raison ? Un avocat de la partie adverse explique : « BP réduit ses coûts, avec des conséquences désastreuses. » Dans l’ombre, l’un de ceux qui ont programmé l’équipement de test des pipelines utilisé par les compagnies, le PIG, explique que tester 1,5 km de gazoduc peut coûter jusqu’à un million de dollars. BP a peut-être économisé des millions de dollars sur le test de ses gazoducs, mais elle a ainsi empoisonné la dernière région du globe encore intacte. Greg Palast à Prudhoe Bay, Alaska. Greg Palast qui, il y a quelques années, enquêtait sur la catastrophe de l’Exxon Valdez en 1989, révèle qu’en dépit du nom « Exxon » sur le bateau, c’est en fait une compagnie baptisée Alyeska, dont BP est actionnaire majoritaire, qui a été chargée de contenir la marée noire. Il leur a fallu si longtemps pour effectuer le nettoyage que le pétrole a dévasté 2 000 kilomètres de côtes en Alaska. Le pétrole est toujours présent sur les plages, 22 ans après la catastrophe. En Azerbaïdjan Palast a appris par un informateur que BP avait subi une explosion étrangement similaire à celle qui a tué 11 personnes dans le Golfe du Mexique 17 mois plus tôt. BP n’a jamais reconnu l’explosion en mer Caspienne, qualifiée simplement d’« émission de gaz », et n’a pas publié son rapport interne sur cet incident qui a pourtant entraîné la plus vaste opération d’évacuation jamais réalisée sur une installation offshore. Et comme le plus grand investisseur étranger dans le pays, et à l’aide des pots-de-vin, BP n’a rien à craindre dans l’état de la police de l’Azerbaïdjan. A propos du présentateur et réalisateurs de la documentaire
  • Greg Palast est l’un des journalistes d’investigation les plus importants de notre temps. Son livre «The Best Democracy Money Can Buy » a été plus d’un an sur le New York Times bestseller liste. En Grande-Bretagne, il régulièrement rapporte pour la BBC. Pendant ses recherches en 2000, il a découvert la fraude de l’élection à la présidentielle américaine en Floride. Des milliers d’Afro-Américains ont été privés de leurs droits de vote, afin d’assurer l’élection de George W. Bush. Pour le documentation « BP en eaux troubles » il était sur les traces de British Petroleum presque 20 ans.
  • James Brabazon est un journaliste de guerre primé, documentariste et auteur. Il écrit régulièrement pour des journaux britanniques comme The Observer, The Guardian et Independent. Brabazon a été la première et unique journaliste à avoir filmé le groupe rebelle LURD au Libéria, qui se sont battus pour renverser le président Charles Taylor. Pour cette documentation, il a reçu deux nominations aux Emmy Awards.
– Retrouvez plusieurs extraits de ce documentaire en cliquant ici.

21h35 : Carbonisés – Les pétroliers ennemis du climat

Depuis des années, les grands groupes pétroliers comme Shell, Total et BP ont leur part de responsabilité dans la catastrophe climatique. Lors de l’extraction du pétrole, d’immenses quantités de gaz naturel sont rejetées à la surface de la terre. Au lieu d’être utilisées, elles sont le plus souvent brûlées. Chaque année, pas moins de 400 millions de tonnes de gaz à effet de serre sont rejetées, soit l’équivalent des émissions en CO2 de 500 millions d’automobiles. De nombreux pays ont condamné, voire même interdit cette pratique connue sous le nom de « gas flaring ».
Les gaz torches détruisent les récoltes des agriculteurs dans le delta du Niger.
Les gaz torches détruisent les récoltes des agriculteurs dans le delta du Niger.
Le problème de gas flaring Un quart du gas flaring mondial est pratiqué au Nigeria. Depuis plus de 50 ans, les pétroliers brûlent ce précieux gaz dans le delta du Niger, dégageant par là de considérables émissions en CO2. A la pointe de cette pratique désastreuse, on trouve Shell, mais aussi Total. Pour les pétroliers, le gaz naturel, cette ressource si précieuse, ne représente qu’un produit secondaire de l’extraction du pétrole. Les conséquences sur l’environnement et la santé sont alarmantes. Car de nombreux villages sont situés à côté des dix stations de torchage de Shell dans le delta du Niger. La population locale qui respire ces gaz toxiques souffre d’asthme et développe des cancers. Quant aux aliments, ils sont pollués par les métaux lourds et les pluies acides. Chris Cragg, un expert en la matière, parle d’une catastrophe écologique planétaire : « il s’agit là de la plus grande source d’émissions de gaz à effet de serre au monde. Les conséquences sur le réchauffement climatique sont effrayantes. Et le Nigéria n’est pas le seul pays touché, le monde entier est concerné. » Le pétrole, l’autorité et la corruption Et pourtant, au Nigéria, le gas flaring est interdit depuis 1984. En 2005, la haute Cour de Nigeria a déclaré que le gas flaring était illégal. Mais ça ne touche pas Shell. La compagnie pétrolière est presque toujours dispensée des peines quand elle n’est pas condamnée à payer des amendes symboliques. D’autres compagnies comme Total, qui produisent moins de pétrole, se cachent derrière le géant du pétrole. Total détient 10 % de toutes les entreprises de Shell au Nigeria. L’industrie pétrolière a évidemment une grande influence sur le gouvernement nigérien. Pas étonnant alors que le pays tire ses revenus de 80 % de la production pétrolière. Et quand la population manifeste, elle est brutalement réprimée par l’armée ou les forces de sécurité privées. En Russie, par exemple, le torchage n’est même pas interdit. Les pétroliers russes brûlent le gaz en toute impunité. Vladimir Poutine attend 2012 pour entreprendre quelque chose contre cette pratique. Partout dans le monde, les émissions de CO2 provenant du torchage augmentent de plus belle. Car pour subvenir aux besoins planétaires en hydrocarbures, il faut exploiter de nouveaux champs pétroliers. Inge Altemeier et Steffen Weber embarquent pour un voyage sur du monde de l’industrie pétrolière et mettent en évidence le problème du gas flaring et de ses conséquences sur l’environnement. – Retrouvez plusieurs extraits de ce documentaire en cliquant ici.

Une question de profit : entretien avec Nnimmo Bassey – Laureat de Prix Nobel Alternatif 2010

Nnimmo Bassey - Laureat de Prix Nobel Alternatif 2010
Nnimmo Bassey – Laureat de Prix Nobel Alternatif 2010
Né le 11 juin 1958 au Nigeria, Nnimmo Bassey est président de l’organisation environnementale « Friends of the Earth International » et directeur de « Environmental Rights Action » au Nigeria. Le Time Magazine lui a décerné en 2009 le prix du « Héros de la protection de l’environnement » ; en 2010, il a reçu le « prix Nobel alternatif » qui récompensait son combat en faveur de la protection de l’environnement au Nigeria. La marée noire de « Deepwater Horizon » dans le Golfe du Mexique l’an dernier a eu des effets dévastateurs. Cette catastrophe a soulevé des protestations sur la production de pétrole et ses effets sur l’environnement dans le monde entier. Au Nigeria, les dommages perdureront pendant plusieurs décennies. Quelle est la situation actuelle sur le plan environnemental au Nigeria ? Nnimmo Bassey : La marée noire du Golfe du Mexique a été un événement majeur. Elle a montré au monde entier que les marées noires ne peuvent pas être ni traitées ni nettoyées facilement. Il faut au contraire beaucoup d’investissements, une grande persuasion et une grande détermination politique pour que les multinationales prennent en compte les problématiques environnementales. Le delta du Niger a été progressivement pollué par les déversements d’hydrocarbures. Actuellement, nous avons au moins une pollution pétrolière accidentelle par jour. Il existe une agence chargée de repérer les déversements accidentels de pétrole, mais il reste des milliers de pollutions accidentelles par les hydrocarbures et il s’en produit constamment des nouvelles. Le paysage tout entier est pollué par les déversements anciens et les nouvelles pollutions. C’est totalement affligeant. En dehors des marées noires, le Nigeria est touché par un grave problème, celui du brûlage de gaz à la torche, le gas flaring. Bien qu’il soit interdit depuis 1984, le gas flaring reste une méthode couramment utilisée dans le cadre de l’extraction de pétrole. Qu’est-ce que c’est exactement ? Nnimmo Bassey : Lorsqu’on extrait du pétrole d’un puits, le pétrole brut remonte en même temps que le gaz naturel. Avant de pouvoir utiliser le pétrole, il faut le séparer du gaz. Pour les compagnies pétrolières, le gaz naturel n’est qu’un sous-produit inutile et non une source d’énergie, ce qui explique qu’elles le brûlent. L’emploi de techniques adaptées permettrait de recueillir le gaz et de l’utiliser pour produire de l’électricité ou pour un usage domestique, mais cela coûte moins cher de le brûler. Cette technique, qui est devenue la pratique la plus couramment utilisée, remonte à 1958, lorsque Shell a commencé à extraire du pétrole dans le delta du Niger. D’autres compagnies pétrolières continuent de brûler le gaz nuit et jour dans le delta du Niger. Chaque année, 23 milliards de mètres cubes de gaz sont brûlés au Nigeria, et 2,5 milliards de dollars correspondant à la valeur commerciale du gaz naturel s’envolent en fumée chaque année. Le gas flaring contribue également à la dégradation du climat, car des millions de tonnes de gaz à effet de serre sont libérés dans l’atmosphère. Quel est l’impact du torchage de gaz naturel sur l’environnement de Nigeria ? Nnimmo Bassey : Les rejets de gaz naturel se produisent souvent le long de zones peuplées, parfois même au milieu de ces zones, et ont des effets dévastateurs sur les populations, qui souffrent plus fréquemment du cancer et de maladies respiratoires comme l’asthme ou la bronchite. De plus, le torchage du gaz naturel libère des substances chimiques dans l’atmosphère, ces substances retombent sous forme de pluies acides qui détruisent les cultures. Les populations sont touchées par ce phénomène qui nuit non seulement à leur santé mais aussi à l’économie locale. En 1979, le gouvernement militaire du Nigeria a adopté un décret qui prévoyait l’arrêt du torchage d’ici 1984, mais rien n’a changé. Les militaires et les compagnies pétrolières se sont mis d’accord pour poursuivre le brûlage de gaz à la torche ; bien que le torchage ait été officiellement déclaré illégal depuis cette date, et qu’il le soit toujours, les compagnies pétrolières ont préféré payer des amendes très faibles au gouvernement et continuer. Aujourd’hui, elles exploitent une autre faille, celle des crédits de carbone. Vous exigez même qu’on « laisse le pétrole dans le sol » pour ces raisons. Dans une société moderne comme la nôtre, est-ce possible ? Quelle solution autre que le pétrole pourriez-vous soutenir ? Nnimmo Bassey : Je pense que nous sommes arrivés aux limites du pétrole brut. Nous sommes arrivés à une ère de notre civilisation où le changement climatique peut facilement « basculer » et ne plus être contrôlable. Les avantages du pétrole brut prévalent largement sur ses inconvénients pour l’homme et l’environnement. Aujourd’hui, nous faisons campagne pour que les nouveaux gisements découverts restent dans le sol. Les compagnies pétrolières peuvent continuer à forer les puits anciens, mais ne devraient pas être autorisées à faire de nouveaux forages. Depuis 2005 le gas flaring in Nigeria est anticonstitutionnel et nocif pour les populations et l’environnement, et on doit y mettre fin. La situation environnementale au Nigeria s’est-elle améliorée depuis ? Nnimmo Bassey : Effectivement, la Haute Cour a déclaré que le gas flaring est illégal, mais elle ne l’a pas criminalisé. Nous avons besoin d’une loi sans équivoque qui précise que ceux qui pratiquent le gas flaring doivent soit s’acquitter de la valeur commerciale correspondante, soit être sanctionnés d’une autre façon. Le gas flaring est de toute évidence une activité illégale, mais les compagnies pétrolières sont au-dessus des lois. Elles adaptent les lois comme elles le veulent, et c’est un camouflet pour la terre entière. Ces entreprises ne cherchent qu’à faire de l’argent, et ne pensent pas à demain. Leur seul enjeu, c’est de faire des bénéfices, elles ne pensent qu’à aujourd’hui et ne pensent qu’à elles. Elles ne se soucient pas de l’environnement, elles ne se soucient pas des populations. Toutefois, il y a un nouvel espoir pour les Nigérians. En 2008, quatre agriculteurs nigérians ont réussi à assigner Shell devant la Cour de justice. C’est la première fois qu’une multinationale comme Shell se retrouve à devoir justifier devant une juridiction en Europe les crimes contre l’environnement qu’elle a commis dans un pays en développement. Pensez-vous qu’il y a une chance pour que Shell reconnaisse ses crimes contre l’environnement et verse des dédommagements ? Nnimmo Bassey : Je suis certain que Shell ne peut pas éviter ce procès, dont l’objet est la pollution de l’environnement, et je ne vois pas comment elle pourrait affirmer devant la Cour qu’il n’y a pas eu de pollution. Ce week-end, je me suis rendu sur deux des sites touchés par les déversements accidentels de pétrole, et je peux vous dire que les preuves sautent aux yeux. Shell ferait mieux de reconnaître tout de suite sa responsabilité et d’assumer ses actions. Voici de nombreuses années que vous vous battez pour l’environnement. Avez-vous parfois l’impression de lutter contre des moulins à vent ? Nnimmo Bassey : Il est vrai que c’est parfois frustrant. Mais notre lutte pour la justice environnementale s’appuie sur un travail de terrain au plus près des populations. Nous les sensibilisons aux problèmes environnementaux. Il y a un changement, une évolution des idées. Nous n’avons rien, sauf de l’environnement, mais nous ne voulons pas perdre le peu que nous avons. Nous ne nous laisserons pas décourager par les obstacles. Nous gardons espoir pour l’environnement. Nous avons eu pour la première fois des élections crédibles en 2011. Nous espérons que nos législateurs adopteront des lois très strictes et qu’ils auront la volonté politique de les appliquer. Est-ce qu’il y a un changement dans la politique du Nigeria face au pétrole et à l’environnement avec le nouveau gouvernement de Jonathan Goodluck ? Nnimmo Bassey : Après les élections, nous espérions vivement que le gouvernement adopterait de nouvelles priorités environnementales, mais il n’en a rien fait. Nous continuons d’espérer qu’il y aura parmi les politiques plus de gens comme Oronto Douglas, qui est conseiller du président Goodluck, pour essayer de sauver notre environnement. Notre président est originaire du delta du Niger, et chaque fois qu’il retourne dans sa région, il voit la pollution qui résulte des déversements d’hydrocarbures et du brûlage de gaz. La première usine de pétrole, suivie ensuite par des torchères, a été construite à proximité de sa ville natale. Il connaît donc bien les dommages infligés à l’environnement par les compagnies pétrolières. Mais il serait effectivement très dommage qu’on laisse passer cette chance d’agir en faveur de l’environnement.

La face cachée du pétrole, l’enquête d’Eric Laurent

Pourquoi le choc pétrolier de 1973 n’était qu’une manipulation. Pourquoi les chiffres des réserves mondiales de pétrole sont faux, volontairement grossis par les pays producteurs. Comment Washington a utilisé le pétrole saoudien pour provoquer l’effondrement de l’Union soviétique. Pourquoi, six mois avant le 11 septembre, des cartes de l’Irak indiquant les futures explorations pétrolières servaient de documents de travail à un groupe surnommé « la société secrète ». Dans une remarquable enquête, le journaliste et écrivain Éric Laurent démonte une histoire tissée de manipulations et de désinformation. Pour en savoir plus sur ce documentaire et ce livre cliquez ici.

 

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David Naulinhttp://cdurable.info
Journaliste de solutions écologiques et sociales en Occitanie.

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