Le développement fulgurant de l’énergie éolienne en Chine constitue une solution alternative au charbon mais ne va pas sans poser quelques problèmes …
Le fort sifflement du vent dans les turbines éoliennes à perte de vue n’a rien d’incommodant pour Deng Hui, bien au contraire: «C’est le son de l’argent que l’on imprime», s’esclaffe le directeur général de la China Energy Conservation Investment Corp. Sur ces terres à trois heures de route au nord de Pékin, l’entreprise étatique a transformé l’ancienne petite ferme dotée, il y a deux ans, d’une douzaine de turbines, en un parc de 200 éoliennes, forêt de moulins à vent de 80 mètres de haut, destinés à convertir la force motrice du vent en énergie. La croissance fulgurante de ces installations illustre les efforts d’investissements dans l’éolien faits en Chine, un pays qui veut à tout prix réduire la part de la houille dans sa production d’énergie et accroître celle des sources d’énergie propres et renouvelables. Les centrales au charbon représentaient fin 2008, selon Greenpeace, 75% des 792 GW de capacités installées de production d’électricité dans ce pays qui forme, avec les États-Unis, le duo des pays les plus pollueurs de la planète. Mais le gouvernement a des projets «verts» ambitieux visant à réduire sa dépendance au charbon, via le développement du nucléaire et l’éolien. «On ne parle pas du vent comme d’un objectif dans le futur. C’est déjà la voie qu’empruntent bon nombre de compagnies d’électricité en Chine», relève Yang Ailun, directrice de campagne de Greenpeace. Le rythme de développement du secteur a même dépassé les projections. Le gouvernement, qui avait initialement fixé un objectif de 30 gigawatts de capacité installée dans l’éolien d’ici à 2020, a récemment indiqué que le but pourrait être porté à 100 gigawatts, la capacité installée ayant doublé chaque année au cours des quatre ans écoulés. Partie de presque rien il y a quelques années, la Chine possédait 12,2 gigawatts d’énergie éolienne installée fin 2008, les entreprises énergétiques s’étant hâtées d’augmenter la part du renouvelable dans leurs moyens de production, conformément au souhait de Pékin. Le Global Wind Energy Council (GWEC) estime que le total mondial est de quelque 121 gigawatts, avec trois principales puissances éoliennes en tête: les États-Unis, l’Allemagne, l’Espagne, suivies de la Chine. Plusieurs provinces en Chine ont d’importants projets, notamment celle du Gansu, dans le nord, qui parle d’un «Trois-Gorges du vent», en référence au barrage géant du centre du pays, sur le fleuve Yangzi, et à ses 22,5 gigawatts. Les travaux de construction ont été lancés samedi pour un investissement de 120 milliards de yuans. Sur la route menant à la ferme de Deng et aux marches de la steppe mongole, d’énormes camions transportent des turbines de 40 mètres destinées à de nouvelles installations. Mais ce rythme de développement effréné a son revers: la capacité installée dépasse les possibilités de récupération dans le réseau électrique de cette nouvelle électricité. Une bonne partie de la production de Deng Hui est ainsi perdue. «Le système de distribution est à la traîne, c’était inévitable», dit-il. En outre, les parcs situés dans de vastes contrées isolées sont souvent trop éloignés du réseau. Sur les 12,2 gigawatts de puissance installée fin 2008, seuls 8,9 gigawatts finissaient dans le réseau, selon Qiao Liming, une responsable de GWEC. Par ailleurs, un autre problème est le système de fixation des prix et des tarifs trop bas pour les fermes éoliennes, explique Qiao Liming. Mais Qiao estime aussi que le gouvernement va s’attaquer aux problèmes, inévitables dans une industrie naissante.