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Il faudrait deux planètes Terre pour nourrir l’humanité en 2050

Louis-Gilles Francoeur pour Le Devoir du 25/10/06

Si la croissance actuelle de la consommation des ressources biologiques se maintient, il faudra deux planètes Terre pour satisfaire les besoins de l’humanité en 2050.

Le Canada arrive au quatrième rang des pays les plus voraces en ressources vivantes de la planète, derrière, dans l’ordre, les Émirats arables unis, les États-Unis et la Finlande. Notre taux d’utilisation des ressources vivantes équivaut à la productivité biologique de 7,5 hectares par personne alors que le rendement moyen de la planète permet de soutenir la consommation des ressources vivantes de 2,2 ha en moyenne. Globalement, l’empreinte écologique des humains, y compris leur consommation de ressources et le territoire nécessaire pour absorber leur pollution et leurs gaz à effet de serre, équivalait en 2003 à la productivité de 14,1 milliards d’hectares alors que la planète n’en possède que 11,2 milliards.

C’est ce que soutient le bilan bisannuel du Fonds mondial de la nature (WWF) divulgué hier en Suisse et en Chine à partir d’une compilation de l’état de 1313 populations animales, terrestres et maritimes, compilées par un organisme britannique, le Global Footprint Network.

Le bilan biologique réalisé par ce dernier organisme a d’ailleurs servi de base de données à un autre rapport, produit il y a quelques jours par la New Economics Foundation (NEF), qui propose d’importants réaménagements de l’économie mondiale pour assurer sa viabilité.

Le rapport du WWF, intitulé Planète vivante 2006, établit qu’entre 1970 et 2003, la planète a perdu 30% de ses populations animales et de sa productivité écologique globale, un rythme d’atrophie de la vie qu’on estime inégalé dans l’histoire humaine. Un tel rythme ne peut se poursuivre encore pendant un demi-siècle, soutenait hier le Dr Mathis Waskernagel, le directeur du Global Footprint Network. Pour ce dernier, l’humanité vit de plus en plus sur sa carte de crédit écologique.

Le rapport lui-même conclut d’ailleurs explicitement que l’empreinte écologique a dépassé la biocapacité de la Terre en 2003 de 25%. Dans la réalité, la capacité de régénération de la Terre ne peut plus désormais suffire à la demande des humains, qui transforment en déchets les ressources plus vite que la nature peut les régénérer. L’humanité ne vit plus des intérêts produits par la nature mais entame son capital. Cette pression croissante sur les écosystèmes engendre la destruction d’habitats productifs, la détérioration ou la perte permanente de leur productivité, menaçant à la fois la biodiversité et le bien-être des humains.

Un des auteurs du rapport, Johathan Loh, de la Société zoologique de Londres, déclarait de son côté hier à la BBC qu’à ce niveau de déficit écologique, l’épuisement du capital biologique planétaire et l’effondrement des grands écosystèmes de la planète devenait quelque chose de plausible.

Dans les pays tropicaux, où les besoins agricoles forcent les populations pauvres à faire reculer chaque jour davantage les écosystèmes naturels, le rythme du capital biologique a atteint 55% en 33 ans. L’Asie du Sud-Est et ses forêts tropicales ont accusé les déclins les plus prononcés nommés dans ce rapport.

Ce que l’étude appelle l’empreinte écologique des humains sur leur planète est telle que la ponction exigée en nourriture, en territoire et en ressources vivantes pendant un an exige un an et trois mois pour se régénérer. Ce déficit a augmenté de 4% entre le dernier bilan du WWF en 2001 et en 2003. Ce déficit global de 25% en 2003 devrait grimper à 30% à la fin de 2006.

C’est l’empreinte laissée par les émissions de gaz à effet de serre (GES) en raison de l’utilisation croissante de combustibles fossiles qui est la plus importante de toutes parce qu’elle engendre des changements globaux qui dénaturent les écosystèmes et réduisent leur productivité écologique globale. Les émissions de GES contribuent pour la moitié de tous les phénomènes de dévastation ou d’atrophie des grands écosystèmes dont l’humanité dépend pour se nourrir, se loger ou pour son économie. Et c’est aussi le facteur dont la croissance est la plus rapide.

Ressources aquatiques

L’index des 1112 populations des 272 espèces maritimes analysées dans cet énorme inventaire indique un déclin global de 25% de la productivité des mers et des océans en 33 ans. La situation est plus stable dans le Pacifique et les océans Atlantique et Arctique. Mais les déclins sont dramatiques dans l’océan Indien et dans les océans de l’Asie du Sud-Est et du Sud asiatique. Les déclins les plus prononcés frappent des espèces comme le thon et la morue, résultat de la surpêche, en raison de leur haute valeur commerciale.

Les mangroves qui abritent 85% des espèces commerciales de poissons sont présentement détruites à un rythme deux fois supérieur à celui des forêts tropicales. Le bilan réalisé sur les mangroves indique que le tiers d’entre elles ont disparu entre 1990 et 2000 — en dix ans ! — pour faire place à des développeurs immobiliers, aux ports et à des activités humaines de toutes sortes.

Les espèces d’eau douce ne se portent guère mieux, en raison notamment de la pollution des villes, des industries et de l’agriculture. Parmi les 45 000 espèces de vertébrés vivant dans les lacs, les rivières, les ruisseaux et les milieux humides, le déclin global s’élève à 30% en 33 ans en raison de la destruction des habitats, de la surpêche, des espèces invasives, de la pollution et de l’artificialisation des cours d’eau, en particulier par les barrages, qui coupent les voies migratoires et isolent les populations dont le capital génétique s’atrophie.

La construction des barrages, un phénomène familier au Québec, frappe présentement de ses impacts la moitié des grands cours d’eau de la planète : 83% du débit naturel de ces cours d’eau est artificialisé, soit 52% modérément et 31% sévèrement, les pires situations ayant été relevées en Europe et en Australie. L’eau retenue par les réservoirs de toutes sortes dans le monde représente de trois à six fois le débit des rivières qui les alimentent.

Les usages de l’eau par les humains font aussi problème. La planète recèle quelque 35 millions de kilomètres cubes d’eau douce, mais 70% de cette eau est emprisonnée dans les glaciers. Moins de 1% de ce total se retrouve donc dans les lacs et les rivières en voie d’artificialisation et de pollution croissantes. Des 40 000 kilomètres cubes d’eau que distribuent les pluies aux quatre coins du monde, les humains en utilisent 10%, ou 4000 kilomètres cubes annuellement. Mais la répartition de cette ressource vitale, déjà inégale, sera de plus en plus perturbée par les changements climatiques avec toutes les conséquences qui en découlent pour les espèces vivantes.

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