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Dommage environnemental : la prescription devient un obstacle à la réparation

Le 6 mai dernier, l’Assemblée Nationale a adopté, en première lecture, une proposition de loi portant réforme de la prescription en matière civile. Dans un communiqué de presse du 14 mai 2008, France Nature Environnement s’inquiète de ce texte, bientôt soumis au vote en seconde lecture au Sénat, qui comporte des dispositions floues voire des régressions du droit à réparation de l’atteinte à l’environnement.

Le projet de texte instaure également un régime particulier pour la réparation des dommages causés à l’environnement, qui conduit à la réduction de l’accès à la justice en la matière, et dont la réduction est sources d’insécurité juridique.

Jusqu’à présent, en matière industrielle, la jurisprudence administrative s’est accordée sur un délai de trente ans, à compter de la cessation d’activité (lorsque cette dernière a été régulièrement portée à la connaissance de l’administration, sauf cas de dissimulation de dangers ou inconvénients), au cours duquel cette dernière peut demander la remise en état du site. Ce délai de trente ans, après des débats importants, a bien été inscrit dans la loi et élargi à d’autres domaines.

Mais :

– Le texte vise expressément les obligations financières liées à la réparation des dommages causés à l’environnement. Ceci signifie-t-il que la réparation en nature, comme la remise en état des lieux, en est exclue ?

– Ce régime d’exception ne vise que les installations, travaux, ouvrages et activités régis par le code de l’environnement. Quid par exemple des produits phytosanitaires réglementés par le code rural ?

– Le délai le trente ans commence déjà à courir à compter du fait générateur du dommage. Que se passera-t-il, par exemple, si l’auteur de l’atteinte à l’environnement a dissimulé une pollution ou ne s’en est pas rendu compte, en cas de pollution souterraine ou d’enfouissement de déchets qui n’auraient pas été portés à la connaissance de l’administration ?

– Le texte ne prévoit ni aménagement en matière de charge de la preuve ni possibilité d’accès à une aide financière à l’expertise. Ce sera donc à la victime de faire faire les analyses souvent coûteuses nécessaires pour prouver la pollution et son origine, à ses frais, pour pouvoir enfin exercer ses droits. Autant dire que ces conditions vont considérablement filtrer les actions en justice sur des critères illégitimes.

« Jusqu’à présent, en cas de dommage environnemental causant un préjudice à une personne, celle-ci avait 10 ans pour saisir le juge civil et demander réparation, à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation », explique Raymond Léost, vice-président de FNE, en charge des affaires juridiques, avant de continuer : « Le point de départ du délai est crucial, comme souvent même l’administration n’est pas au courant des pollutions engendrées par certaines activités et que plusieurs années peuvent s’écouler avant que l’atteinte à l’environnement et la santé publique ne soient connues ».

« Ces nouvelles dispositions vont d’une part être sources de contentieux, car mal rédigés, d’autre part réduire la possibilité de demander réparation devant le juge. Cette réforme est contraire à l’esprit de la Convention d’Aarhus et France Nature Environnement ne peut qu’appeler les sénateurs et députés à rectifier le tir afin que le droit français prenne sérieusement en compte l’importance de garantir l’accès à la réparation du dommage causé à l’environnement et les spécificités procédurales que cela implique », conclut Raymond Léost.

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