“(Re)faire tribu” est la newsletter mensuelle d’Hugo, 24 ans, parti découvrir l’art de faire communauté. Tous les mois, il nous partage des pépites pour cultiver sa communauté : principes pour animer votre communauté ; outils pour les mettre en place ; retours d’expérience de communautés inspirantes et quelques ressources qui vous reboostent et nous montrent toute la puissance du collectif.
UNE EXPLORATION
pour étudier comment APPRENDRE ENSEMBLE
à cultiver une société écologique et sociale
(Re)Faire Tribu :
une newsletter pour explorer l’art de faire communauté
Après un an d’immersions dans une diversité de collectifs en Europe, Hugo a ressenti le besoin de partager ses apprentissages au travers d’un contenu pratique et clé en main. Son objectif : partager les découvertes de ses explorations (passées et présentes) pour se réapproprier l’art de faire communauté.
A 23 ans, il fait le bilan de ses 5 dernières années d’engagement au sein d’initiatives écologiques et sociales. En 5 ans, il a testé différents leviers :
- Académique en coordonnant des coalitions nationales pour la transition de l’enseignement supérieur ;
- Économique en découvrant les rouages de l’Économie Sociale et Solidaire (avec les équipes de Share it et Ticket for Change) ;
- Politique en menant des plaidoyers en France et en Europe (avec les Grandes Écoles de la Transition ou Up for Europe).
Le point commun de ces initiatives : elles reposent toutes sur des communautés. Après avoir épluché des centaines de ressources et rencontré de nombreux experts, voici ce qu’il écrit dans son carnet en octobre 2021 :
Nous vivons dans un monde en pleine mutation qui n’a jamais été aussi mouvant et incertain. Dans ce monde, nous devons faire face à de nombreuses crises qu’elles soient écologiques, sociales ou technologiques.
Ces crises nous demandent des transformations toutes aussi rapides que profondes. Tant à l’échelle collective qu’individuelle.
La force des communautés est de lier ces transformations :
À l’échelle de l’individu : l’émulation collective peut devenir un déclencheur puis un catalyseur de transformations intérieures profondes.
À l’échelle du collectif : leurs impulsions peuvent mettre en mouvement des milliers de citoyens et de citoyennes.
Pour reprendre les mots de Rob Hopkins, fondateur du mouvement des Villes en Transition :
Les communautés sont d’incroyables leviers pour répondre aux enjeux de demain. Mais comprendre la puissance des communautés est une chose. Savoir comment les cultiver en est une autre. Hugo a pris le temps pendant un an d’aller explorer leurs secrets :
- Comment cultiver l’art de faire ensemble dans une société qui nous pousse vers toujours plus d’individualisme ?
- Comment favoriser l’engagement dans les communautés alors que 46% d’entre elles éprouvent des difficultés à impliquer ses membres dans le temps ?
Refaire tribu présente 10 principes essentiels pour animer un collectif
Principe 1 : Remplir une mission pour tendre vers une vision
Pour nous rassembler, nous avons besoin d’une vision commune. Cette vision, c’est l’horizon de votre communauté. Celle pour laquelle vos membres ont décidé de se réunir. Elle est la promesse d’un monde qu’ils veulent voir advenir.
Mais avoir une vision n’est pas suffisant, pour embarquer ses membres vers une direction commune, il faut définir comment y parvenir. C’est la mission de la communauté. Sa raison d’être.
Si la vision donne la direction, la mission trace le chemin.
Sans vision, pas de raison de se rassembler. Sans mission, pas de moyen d’avancer.
LA VISION 🔭
La vision décrit l’idéal vers lequel le collectif aspire à progresser. Elle est souvent inspirante, motivante et représente une image du futur souhaité. Elle permet de savoir pourquoi les membres se rassemblent et ainsi maintenir leur motivation dans le temps.
👉 La vision répond à la question : « Quel est le monde idéal que nous voulons réaliser ? »
LA MISSION 🎯
La mission est la raison d’être du collectif. Pour reprendre la définition de l’Institut des futurs souhaitables : “C’est l’expression de ce qui est vivant en nous à un instant présent pour nous guider vers un futur possible et désirable”.
Elle indique ce que le collectif fait au quotidien pour progresser vers sa vision.
👉 La mission répond à la question : « Que faisons nous concrètement pour atteindre notre vision ? »
Principe 2 : Incarner sa vision du monde.
La meilleure manière de faire advenir votre vision du monde est de l’incarner.
Ce que disait Gandhi pour les individus est tout aussi vrai à l’échelle d’une communauté :
“Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde”.
Au travers de votre communauté, c’est tout un monde que vous pouvez créer, tout un art de vivre que vous pouvez transmettre.
4 étapes peuvent nous guider vers ce chemin.
#1 – Définir ses valeurs
La culture d’un collectif repose avant tout sur des valeurs communes. C’est ce qui définit l’âme de votre communauté.
#2 – Diffuser ses valeurs dans toutes les dimensions de sa communauté
Les valeurs ne sont que des mots si elles ne sont pas incarnées.
#3 – Créer sa propre culture
L’identité d’une communauté ne repose pas uniquement sur des valeurs. C’est toute une culture qu’il faut créer, un ensemble de traits distinctifs qui vont donner de la teneur à vos valeurs.
#4 – Développer un sentiment d’appartenance
Si vos membres se rassemblent autour de la vision et de la mission de votre communauté, ils y restent pour l’aventure collective que vous leur ferez vivre.
Comment transmettre toutes les dimensions de sa culture de manière authentique à ses nouveaux membres ? Afin d’y répondre, nous pouvons nous inspirer d’une méthode ancestrale : “Les rites initiatiques”.
Principe 3 : Écouter ses membres pour guider sa communauté.
La plupart des projets reposent aujourd’hui sur des communautés :
- La Fresque du Climat sensibilise aux enjeux environnementaux grâce à plus de 35 000 animateurs à travers le monde.
- Les Collectifs rassemblent des salariés engagés pour transformer les entreprises de l’intérieur.
- Le logiciel libre Linux (un des systèmes d’exploitation les plus utilisés au monde) se déploie grâce à la contribution de milliers de développeurs et d’une communauté d’ambassadeurs qui ne cesse de grandir.
💎 Définir sa proposition de valeur
Cet équilibre entre le projet et la communauté est défini par ce que l’on appelle dans le “business game” : la proposition de valeur. Concrètement, c’est la promesse que vous faites à vos membres.
Elle répond à la question : Qu’est-ce que votre communauté apporte à vos membres ?
Votre proposition de valeur se situe à l’intersection entre :
- Les objectifs de vos membres : Qu’est-ce que vos membres viennent chercher au sein de votre communauté ?
- Les objectifs de la communauté : Qu’est-ce que vous (en tant que responsable de communauté/organisation) attendez de votre communauté ?
🎯 Objectif de la communauté : le modèle SPACES
Votre communauté est un formidable moyen de développer votre impact. Le secret est de l’intégrer au centre de votre stratégie. Vous pouvez pour cela vous inspirer du modèle SPACES. Développé par CMX, il a initialement été conçu pour les entreprises, mais peut facilement être transposé dans toutes les autres sphères. Il repose sur 6 domaines :
- S – SUPPORT : Vos membres aident les personnes extérieures à s’approprier votre projet et résoudre ses problèmes.
—> Ex : la communauté du Plongeoir apporte des relectures aux articles de Guillaume et vient préciser certaines informations. - P – PRODUCT / INNOVATION : Votre communauté partage ses idées et ses retours d’expériences afin d’améliorer en continu votre projet.
—> Ex : la communauté Decathlon teste les produits en avant-première afin d’apporter des améliorations. - A – ACQUISITION : Faire de vos membres des ambassadeurs qui vont promouvoir vos initiatives.
—> Ex : Team for the Planet mobilise régulièrement ses membres pour des grandes campagnes de communication. - C – CONTRIBUTION : Demander à vos membres de contribuer directement à votre mission.
—> Ex : Blablacar développe la pratique du co-voiturage en rassemblant une grande communauté de covoitureurs. - E – ENGAGEMENT : Renforcer le sentiment d’appartenance de vos membres en nourrissant la vision et la culture de la communauté.
—> Ex : Le média Vert organise des apéros trimestriels pour rassembler sa communauté autour de l’importance des médias alternatifs. - S – SUCCESS : Aider les autres membres à atteindre leurs objectifs grâce à l’entraide et le partage des bonnes pratiques.
—> Ex : la communauté Doctolib aide les professionnels de la santé à prendre en main le logiciel et leur proposer des nouvelles solutions pour les aider dans l’exercice de leur métier.
🙋 Objectif des membres : Être à l’écoute de sa communauté
Principe 4 : Définir ses frontières pour construire des ponts.
“Une communauté doit toujours être ouverte pour y accueillir une diversité de membres”.
C’est cependant en définissant des frontières qu’on accède à une forme de diversité. Dans toutes les communautés, une frontière (physique ou symbolique) délimite l’intérieur de l’extérieur venant nourrir un sentiment d’appartenance essentiel. Le fameux “j’en fais partie”.
Cette membrane permet d’atteindre 2 objectifs vitaux pour un collectif :
- Rassembler les personnes qui pourront pleinement s’émanciper dans votre communauté.
- Délimiter les espaces de coopération avec les autres collectifs.
🤝 Le NOUS se construit AUTOUR d’un EUX.
🚨 Il ne faut pas confondre : se distinguer et s’isoler. 🚨
De plus en plus de collectifs nous montrent l’exemple :
- L’Université du Nous (que je vous recommande chaudement) a collaboré avec la Conférence des Évêques de France sur la transformation écologique de l’Eglise.
- Makesense a mené un consortium avec Article 1, Bondy Blog, Banlieues Climat et AFEV pour développer les emplois verts dans les quartiers.
- Une vente aux enchères caritatives a été porté conjointement par Tinder et le Sidaction (le tout animé par des Draqueens).
Si tout le monde est la famille, personne n’est véritablement la famille.
👉 Comment définir la membrane de sa communauté ?
Principe 5 : Soigner l’accueil.
L’accueil est la quintessence d’une communauté.
Mais pourquoi l’accueil est-il si important ?
✨ FAIRE BONNE IMPRESSION
Ce sont les premiers moments d’une expérience qui en déterminent souvent l’issue. Une première impression qui nous donnera envie de continuer l’aventure ou au contraire de passer notre chemin.
🤝 POSER LES BASES D’UNE RELATION
Être dans un collectif n’est pas qu’une expérience que l’on vit, c’est une relation que l’on noue.
Plus qu’un simple accueil, c’est une 1° rencontre. Une rencontre entre une personne et un collectif.
Une rencontre entre cette personne et les membres de ce collectif.
La sécurité, c’est la base de l’accueil !
La confiance car sans confiance, il ne peut y avoir de coopération.
“écouter c’est permettre à l’autre d’exister”
Le psychiatre français Christophe André
Une première rencontre fait naître les premiers liens de confiance qui viennent se propager à l’ensemble de la communauté.
💡 4 CONSEILS POUR UN ACCUEIL RÉUSSI
1️⃣ PRENDRE SES MEMBRES PAR LA MAIN
2️⃣ RÉVÉLER SA COMMUNAUTÉ EN LA CARTOGRAPHIANT
3️⃣ CRÉER DES PREMIERS LIENS AU SEIN DE LA COMMUNAUTÉ
4️⃣ MARQUER LE COUP
Principe 6 : Alimenter la flamme de l’engagement.
Une communauté ne vit qu’au travers de l’engagement de ses membres.
Les 2 piliers de l’engagement, dans toutes les communautés étudiées :
- La motivation intérieure
- La reconnaissance extérieure
Ne pas valoriser que le FAIRE
mais aussi l’ÊTRE.
🤔 Mais comment valoriser les membres de sa communauté ?
La théorie des 5 langages de l’amour de l’américain Gary Chapman nous apprend que nous avons tous des manières différentes d’exprimer et de recevoir de l’amour (et donc par extension de la reconnaissance). Il en distingue cinq :
- les paroles valorisantes (dire « merci pour …”),
- les actes de service (faire une faveur),
- les cadeaux (offrir un présent),
- le temps de qualité (passer du temps ensemble),
- et le contact physique (une main sur l’épaule).
Pour se sentir valorisé, il est important de comprendre et de parler le langage de l’amour préféré de l’autre. C’est un peu comme apprendre à dire « merci » dans la langue que l’autre comprend le mieux !
💡 3 CONSEILS POUR ENGAGER SES MEMBRES
1️⃣ CRÉER DES ESPACES POUR AFFIRMER SON ENGAGEMENT
2️⃣ PERMETTRE DIFFÉRENTS NIVEAUX D’ENGAGEMENT
3️⃣ NE PAS TOUJOURS ÊTRE EN MODE “ACTIF“
Principe 7 : Proposer un voyage en plusieurs étapes.
L’engagement est indispensable pour une communauté. C’est ce qui lui donne la capacité d’atteindre ses objectifs collectifs.
LES 5 CERCLES DE L’ENGAGEMENT
- 1. L’audience : C’est le point de départ de l’engagement. Ce sont les personnes qui connaissent votre organisation mais sans pleinement la soutenir.
- 2. La foule : Ce cercle regroupe toutes les personnes qui soutiennent votre projet de l’extérieur sans pour autant être membre. Ce sont les curieux qui veulent en savoir plus sur votre vision et vos valeurs, mais qui restent pour l’instant à la périphérie.
- 3. La communauté : Ce sont les membres officiels de votre organisation. Ils ont pris la décision d’en faire pleinement partie.
- 4. Les engagés : Les membres actifs de votre communauté. Ils participent à l’animation du collectif en prenant des rôles spécifiques.
- 5. Le noyau : Ce sont les personnes au cœur de votre organisation, les piliers de la communauté qui assurent le fonctionnement du collectif et l’ADN de la communauté.
LE PARCOURS D’ENGAGEMENT
Principe 8 : Cultiver toutes les échelles de sa communauté.
Les communautés sont vouées à grandir. Pour garder la cohésion et l’ADN d’une communauté, il faut en cultiver TOUTES les échelles.
Les communautés sont fractales 💎
Chaque communauté n’est formée que de sous-communautés.
Nourrir les différentes échelles de sa communauté🪜
Animer une communauté, c’est donc offrir de l’espace pour cultiver toutes ces échelles.
De la communauté entière jusqu’au plus petit dénominateur commun : l’individu.
- Les groupes ne peuvent pas coopérer si les sous-groupes qui les constituent ne savent pas coopérer.
- Et les sous-groupes ne peuvent pas coopérer si les individus qui les constituent ne savent pas coopérer.
C’est pourquoi, il est indispensable de réapprendre à coopérer avec soi pour ainsi mieux coopérer avec l’autre (et à fortiori avec le groupe).
Pour nourrir un sentiment d’appartenance à la communauté qui rassemble les individus :
1️⃣ Développer un socle commun universel à sa communauté.
2️⃣Accompagner les sous-communautés dans l’appropriation de ce socle.
3️⃣ Créer des moments de communion entre les sous-communautés