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Note de synthèse 246 - Octobre 2011

Les aides publiques dommageables à la biodiversité

Un rapport du Centre d'Analyse Stratégique

Le Centre d’analyse stratégique vient de publier un rapport « Les aides publiques dommageables à la biodiversité ». Le rôle de la biodiversité dans le fonctionnement des équilibres naturels et dans la capacité des écosystèmes à produire des services d’intérêt pour l’homme est encore mal identifié par le grand public. Elle nous apporte pourtant de la nourriture, des combustibles, des matériaux de construction. Elle permet également la purification de l’eau, la stabilisation et la modération du climat de la planète, la régulation des inondations et des sècheresses, etc. Au sein de l’Union européenne, la France possède une richesse et une responsabilité particulières, non seulement par la très grande diversité de ses écosystèmes sur son territoire métropolitain, mais aussi par celle de ses collectivités d’outre-mer qui, à elles seules, abritent 3 450 espèces de plantes et 380 de vertébrés endémiques, soit plus que toute l’Europe continentale. Or, en France comme dans le monde, le rythme d’extinction des espèces est globalement très supérieur au rythme naturel depuis plusieurs dizaines d’années. Certains avancent même l’idée selon laquelle une nouvelle phase d’extinction massive (la sixième à l’échelle des temps géologiques) serait en cours. Cette perte de biodiversité, essentiellement d’origine humaine, résulte de la destruction et de la dégradation des habitats naturels ou semi-naturels, de la surexploitation des ressources naturelles renouvelables, des pollutions, du changement climatique et de la diffusion d’espèces exotiques envahissantes. Depuis le Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, la réduction de la perte de la biodiversité est un objectif récurrent des instances internationales aussi bien que nationales. La dernière Conférence des parties à la Convention des Nations unies sur la diversité biologique, qui s’est déroulée à Nagoya en octobre 2010, a notamment débouché sur l’adoption d’un plan stratégique pour lutter contre la perte de biodiversité d’ici à 2020. Parmi ses différentes cibles, la réforme, la suppression ou la réduction des incitations publiques nuisibles à la biodiversité a été confirmée comme une priorité : elle constitue l’objet de cette note, centrée sur le cas français. Au sommaire : – La biodiversité, pilier du développement durable – Un capital exceptionnel mais menacé – Une prise de conscience politique – Réviser les aides publiques dommageables à la biodiversité – Les cinq grandes causes d’érosion de la biodiversité – Quelques propositions de réforme des aides publiques dommageables Auteurs : Géraldine Ducos, département Développement durable et Guillaume Sainteny, maître de Conférences à l’École polytechnique, président du groupe de travail sur les aides publiques à la biodiversité. Avec l’aide de Jean-Michel Salles, directeur de recherche au CNRS, ainsi que de Dominique Auverlot et de Jean-Luc Pujol, département Développement durable

Avant-Propos

Vincent CHRIQUI - Directeur Général du Centre d'Analyse Stratégique
Vincent CHRIQUI – Directeur Général du Centre d’Analyse Stratégique
Le débat public a parfois eu tendance à assimiler la préservation de la biodiversité au sort emblématique de certaines espèces en voie d’extinction. Nous savons désormais que c’est l’ensemble de la faune et de la flore qu’il importe de protéger, non seulement dans quelques « points chauds » du globe mais jusque dans nos prairies et nos pelouses. L’enjeu, c’est bien sûr la variété des espèces – et avec elle le patrimoine génétique de la planète –, mais aussi la richesse de leurs interactions (par pollinisation, prédation, symbiose) et toute l’ampleur des « services rendus » à l’homme. Car même s’il n’en a pas toujours conscience, l’homme bénéficie d’immenses services gracieusement fournis par les écosystèmes. Il y puise sa nourriture mais aussi des combustibles et des matériaux de construction. Au-delà de ces biens « appropriables », la biodiversité assure la purification de l’eau, la stabilisation et la modération du climat, la régulation des inondations, des sécheresses ou des épidémies. En un mot, la biodiversité nous est vitale. Or, partout dans le monde, on constate qu’elle décline à un rythme accéléré depuis plusieurs dizaines d’années, ce qui fait redouter de profonds bouleversements de notre environnement. Victime potentielle de ce déclin de la biodiversité, l’homme en est aussi le premier responsable. Les principaux facteurs de la dégradation des habitats naturels sont d’origine anthropique : l’artificialisation croissante des sols, que les routes, parkings, aéroports couvrent de revêtements imperméables ; la fragmentation des habitats terrestres causée par les infrastructures de transport et par l’intensification des pratiques agricoles ; la surexploitation des ressources naturelles renouvelables, au premier rang desquelles les stocks halieutiques et l’eau douce ; la pollution par les nitrates, les pesticides et autres métaux lourds ; l’introduction d’espèces exotiques envahissantes et le changement climatique … Autant de pressions qui réduisent peu à peu la biodiversité. Tous les secteurs ou presque de notre économie sont concernés : l’industrie, l’agriculture, les activités de forage et de carrière, le transport, le tourisme, le logement, les activités récréatives de proximité, etc. Alors que tous ont d’ores et déjà entrepris des efforts notables pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, leurs actions en matière de préservation de la biodiversité demeurent en retrait. Les pouvoirs publics ont le devoir de contribuer à combler ce retard. Or ils disposent d’un champ d’investigation encore peu exploré : par souci de vertu autant que d’efficacité, ils peuvent scruter à la loupe toutes les aides publiques qui, par leurs effets secondaires ou pervers, pourraient se révéler préjudiciables au maintien de la biodiversité. Une telle révision a été jugée prioritaire par la Convention sur la diversité biologique, qui s’est tenue à Nagoya en 2010. La Commission européenne, dans sa communication du 20 septembre 2011, demande également que d’ici 2020, on supprime « les subventions dommageables à l’environnement, en tenant dûment compte des incidences sur les personnes les plus démunies ». Au niveau national, cet objectif figure parmi les engagements pris lors du Grenelle de l’environnement et dans la Stratégie nationale pour la biodiversité présentée le 19 mai 2011 par la ministre de l’Écologie. Les travaux du groupe de travail présidé par Guillaume Sainteny s’inscrivent dans ce contexte. Les experts réunis ont reçu pour mission d’inventorier les aides dont le lien de causalité avec le déclin de la biodiversité est démontré, et de proposer des pistes de réforme. Je tiens à remercier chaleureusement le président et tous les membres de la mission, qui ont pris à bras-le-corps cette tâche aussi vaste que complexe. D’abord parce que les aides publiques sont d’origines multiples – elles proviennent de l’État, des collectivités territoriales, de l’Europe – mais aussi de nature diverse – il peut s’agir de subventions, de dépenses fiscales, d’une exonération ou d’une application partielle de la réglementation … Ensuite, et surtout, parce que l’impact sur la biodiversité n’est pas toujours aisé à prouver, encore moins à évaluer. Le groupe de travail a le mérite d’ouvrir de très nombreuses pistes de réforme, qu’il s’agisse d’orientations générales ou de recommandations concrètes, réalisables à court terme. Chacune oblige les décideurs publics à modifier leur regard, et chacune pose la question de la difficile conciliation entre la défense de la biodiversité et les exigences économiques et sociales. Gageons donc que ce travail, qui s’inscrit dans la lignée du rapport de référence de Bernard Chevassus-au-Louis sur la valeur de la biodiversité[[Centre d’analyse stratégique (2009), L’approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes, rapport de la mission présidée par Bernard Chevassus-au-Louis, Paris, La Documentation française, 400 p.]], fournira matière à de nombreux débats et réformes ces prochaines années.
Vincent CHRIQUI – Directeur Général du Centre d’Analyse Stratégique

Sommaire

Introduction Synthèse Recommandations Chapitre 1 – Définitions, méthodes, limites 1 Définitions 2 Éléments méthodologiques 3 Tentative de caractérisation du lien de causalité entre aides publiques et biodiversité 4 L’approche retenue Chapitre 2 – Les cinq principales causes d’érosion de la biodiversité en France 1 Un capital exceptionnel mais menacé 2 La destruction et la détérioration des habitats : un impact prépondérant et multiforme 3 La surexploitation des ressources naturelles renouvelables : une situation alarmante pour certaines 4 Les pollutions : une pression qui touche tous les milieux 5 Les espèces exotiques envahissantes : un facteur d’érosion de la biodiversité mal connu mais croissant 6 Les changements climatiques : des effets directs et indirects via les autres pressions Chapitre 3 – Les aides publiques qui favorisent la destruction et la dégradation des habitats 1 L’artificialisation des habitats 2 La semi-artificialisation des habitats 3 La fragmentation des habitats 4 Une illustration d’une combinaison de facteurs liés à la détérioration d’un habitat : la raréfaction du grand hamster d’Alsace Chapitre 4 – Les aides publiques qui favorisent la surexploitation des ressources naturelles renouvelables 1 Les sols 2 Les ressources halieutiques 3 L’eau Chapitre 5 – Les aides publiques qui favorisent les pollutions 1 L’air 2 Les sols 3 L’eau Chapitre 6 – Les aides publiques qui favorisent l’introduction et la dissémination des espèces exotiques envahissantes 1 Les activités préjudiciables 2 Les aides publiques identifiées 3 Une tentative de quantification des impacts pour les cas les mieux connus ANNEXES Annexe 1 – Saisine Annexe 2 – Liste des membres Annexe 3 – Personnes auditionnées Annexe 4 – Sigles et acronymes Bibliographie

Introduction

Par lettre du 27 juillet 2010, annexée à ce rapport, la secrétaire d’État chargée de l’Écologie a demandé à la secrétaire d’État chargée de la Prospective et du Développement de l’économie numérique : • de « dresser une liste exhaustive des subventions et autres aides d’origine non fiscale ayant un impact sur l’environnement ; • d’analyser pour chacune de ces mesures, de façon qualitative et lorsque cela est possible quantitative, les dommages éventuels causés à la biodiversité ; • de proposer des pistes d’évolution et de réforme de ces subventions afin de réduire, voire d’annuler, l’impact dommageable sur l’environnement ». En septembre 2010, le champ de la saisine a été simultanément étendu aux dépenses fiscales et recentré sur la biodiversité. Pour répondre à cette demande, le Centre d’analyse stratégique a mis en place un groupe de travail présidé par Guillaume Sainteny, assisté de Jean-Michel Salles, et réunissant des experts de la biodiversité, des économistes, des représentants des secteurs professionnels, des syndicats, des associations de protection de l’environnement et de l’administration. Sa composition précise figure en annexe. Le groupe a été installé le 17 novembre 2010, en présence de la ministre de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, signe de l’importance accordée à sa mission. Il s’est naturellement inspiré des travaux déjà menés par le Centre d’analyse stratégique, sous la présidence de Bernard Chevassus-au-Louis, afin de définir une approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes[[Centre d’analyse stratégique (2009), L’approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes, rapport de la mission présidée par Bernard Chevassus-au-Louis, Paris, La Documentation française, 400 p. ]]. Le contexte dans lequel le groupe a accompli sa tâche présente à la fois des éléments favorables et d’autres défavorables qu’il semble utile de rappeler. Une préoccupation récurrente et croissante au plan international Depuis une trentaine d’années, l’impact des subventions publiques et dépenses fiscales sur l’environnement a fait l’objet d’une attention croissante au sein d’organisations internationales telles que l’OCDE, l’Agence internationale de l’Énergie, la Banque mondiale, la FAO, le Programme des Nations unies pour l’environnement, le G20, l’Agence européenne de l’environnement, la Commission européenne, ainsi que dans les pays anglo-saxons. La nécessité d’une réforme des subventions, aides et dispositifs fiscaux défavorables au développement durable est mentionnée, de manière récurrente, dans plusieurs textes internationaux. Le programme Agenda 21 adopté lors de la Conférence de Rio en 1992 indique dans son article 8.32 que les pays signataires devraient « supprimer ou réduire les subventions qui ne favorisent pas les objectifs d’un développement durable », tout comme ils devraient « réformer ou refondre la structure actuelle des incitations économiques et fiscales en fonction des objectifs en matière d’environnement et de développement »[[«8.32. À court terme, les gouvernements devraient, en mettant davantage à profit leur expérience des instruments économiques et des mécanismes de marché, réorienter leurs politiques, sans perdre de vue leurs plans, priorités et objectifs nationaux, de manière à : a) combiner efficacement des mesures économiques, réglementaires et autorégulatrices ; b) supprimer ou réduire les subventions qui ne favorisent pas les objectifs d’un développement durable ; c) réformer ou refondre la structure actuelle des incitations économiques et fiscales en fonction des objectifs en matière d’environnement et de développement. »]]. « La restructuration de la fiscalité et l’élimination progressive d’éventuelles subventions compte tenu de leurs effets néfastes sur l’environnement » se retrouvent également dans le Plan de mise en œuvre du Sommet mondial pour le développement durable, adopté à Johannesburg en 2002[[Voir 20/p et 20/q.]]. La Commission européenne a mentionné ce sujet dans son Livre vert de 2007[[Commission européenne (2007), Livre vert sur les instruments économiques en matière d’environnement.]]. Plus récemment, cette préoccupation a visé spécifiquement les soutiens publics dommageables à la biodiversité. La Conférence des Parties de la Convention sur la diversité biologique (CDB) a adopté, en 2010, à Nagoya, un plan stratégique pour limiter la perte de la biodiversité mondiale d’ici à 2020. L’un des principaux objectifs est la réforme, la suppression ou la réduction des incitations et subventions dommageables : « D’ici à 2020 au plus tard, les incitations, y compris les subventions néfastes pour la diversité biologique, sont éliminées, réduites progressivement ou réformées, afin de réduire au minimum ou d’éviter les impacts défavorables, et des incitations positives en faveur de la conservation et de l’utilisation durable de la diversité biologique sont élaborées et appliquées, d’une manière compatible et en harmonie avec les dispositions de la Convention et les obligations internationales en vigueur, en tenant compte des conditions socioéconomiques nationales ». L’adoption de ce plan d’action, le succès global de la Conférence de Nagoya et la publication finale du rapport TEEB[[TEEB (2010), L’Économie des écosystèmes et de la biodiversité : intégration de l’Économie de la nature, Une synthèse de l’approche, des conclusions et des recommandations de la TEEB, 46 p.]], quelques jours avant le début des travaux du groupe de travail, ont conféré une légitimité et une actualité accrues à son rôle et à la question dont il était saisi. La Stratégie communautaire en faveur de la diversité biologique recommandait, dès 1998, « l’élimination des incitations ayant des effets préjudiciables sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique »[[Commission européenne (1998), « Communication du 4 février 1998 concernant une stratégie communautaire en faveur de la diversité biologique », COM(1998) 42.]]. Cette volonté se précise dans la nouvelle stratégie pour la biodiversité de 2011. La Commission européenne se fixe parmi ses objectifs (17 c) de « fournir les signaux de marché appropriés pour la conservation de la biodiversité, y compris en réformant, réduisant et éliminant les subventions dommageables aussi bien au niveau de l’UE qu’à celui des États membres »[[Commission européenne (2011), « Our life insurance, our natural capital: An EU biodiversity strategy to 2020 », Communication from the Commission to the European Parliament, the Council, the economic and Social Committee and the Committee of the Regions, COM(2011) 244 final.]]. Une question peu étudiée et une prise de conscience récente en France La France est signataire, partie prenante ou concernée par la totalité des textes internationaux mentionnés ci-dessus. Néanmoins, cette montée en puissance de la question des subventions dommageables à l’environnement semble l’avoir longtemps laissée indifférente et passive. Elle a tardé à la prendre en compte, apparemment peu perméable à cette approche. Pourtant, l’importance des subventions publiques et des dépenses fiscales concernant de nombreux secteurs est une donnée de l’économie française en général. Leurs effets se sont accrus ces dernières années, contribuant à la détérioration des finances publiques, à la diminution des marges de manœuvre de la politique budgétaire et du pilotage macro-économique, à l’endettement du pays, à la difficulté de redéployer des moyens pour les politiques publiques prioritaires, etc. Mais, curieusement, cette situation d’ensemble était abordée, jusqu’à il y a peu, sans articulation avec les politiques qui concourent au développement durable. Peut-être cela est-il dû à la prédominance, en France, de politiques publiques d’environnement ayant recours très fortement aux instruments règlementaires, éventuellement assortis de subventions publiques. Pourtant, un développement durable doit s’effectuer, au nom de l’équité intergénérationnelle, sans que la génération précédente constitue de dette excessive au détriment des générations futures. Depuis le milieu des années 2000, la France paraît prendre conscience des effets potentiellement dommageables sur l’environnement de certains soutiens publics. Plusieurs facteurs, d’importance inégale, semblent à l’origine de ce réveil : le poids croissant des dépenses publiques et des déficits publics, le développement des préoccupations environnementales aux niveaux international, européen et national, le lancement de la Révision générale des politiques publiques (RGPP), la mobilisation autour du Grenelle de l’environnement, la pression croissante et récurrente que constituent les recommandations internationales renouvelées sur ce sujet, etc. La protection de la biodiversité a constitué l’une des priorités du Grenelle de l’environnement. Dans son discours de clôture de cette manifestation, le président de la République a pris l’engagement selon lequel « toutes les décisions publiques devront tenir compte de leur coût en matière de biodiversité ». Par ailleurs, la RGPP et la Révision générale des prélèvements obligatoires (RGPO) ont inscrit, dès 2007, une mesure de ce type dans leurs textes : « Les orientations pour le MEDAD dès la première phase de la RGPP sont donc les suivantes […] veiller à ce que les dépenses fiscales soient favorables à l’environnement […] Les dépenses fiscales sont passées au crible dans le cadre du chantier de la RGPP, dans le souci de revenir sur des dépenses fiscales ayant un impact environnemental négatif ou insuffisant »[[Conseil de modernisation des politiques publiques, 12 décembre 2007.]]. Cette volonté de réforme des dispositifs fiscaux dommageables à l’environnement se retrouve dans les engagements du Grenelle[[Engagement n° 191 : « Évaluation environnementale des lois et mesures fiscales ».]] et dans la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à sa mise en œuvre, dite «loi Grenelle1», qui vise expressément les dépenses fiscales dommageables à la biodiversité. L’article 48 précise ainsi : « Le Gouvernement présente au Parlement une évaluation de l’impact environnemental des aides publiques à caractère budgétaire ou fiscal. Les aides publiques seront progressivement revues de façon à s’assurer qu’elles n’incitent pas aux atteintes à l’environnement. L’État veillera à ce que les programmes d’aide au développement qu’il finance ou auxquels il participe soient respectueux de l’environnement des pays bénéficiaires et soucieux de la préservation de leur biodiversité et, pour partie, spécifiquement dédiés à ces finalités ». L’article 26 indique que « l’État, sur la base d’un audit, fera un état des mesures fiscales défavorables à la biodiversité et proposera de nouveaux outils permettant un basculement progressif vers une fiscalité mieux adaptée aux enjeux environne- mentaux ». Ces deux articles ont été à l’origine de la saisine ministérielle. Mais la loi Grenelle 1 contient d’autres dispositions qui ne sont pas sans lien avec l’objet de la saisine. Elle précise que la France soutiendra l’instauration d’un taux réduit de TVA sur les produits à faible impact sur la biodiversité (art. 54). Elle confirme le doublement du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique (art. 31). Elle prévoit que les incitations financières et les dispositifs fiscaux relatifs au logement et à l’urbanisme devront être réexaminés afin de limiter l’artificialisation de l’espace naturel (art. 7)[[« II. Le droit de l’urbanisme devra prendre en compte les objectifs suivants, dans un délai d’un an suivant la publication de la présente loi : a) Lutter contre la régression des surfaces agricoles et naturelles, les collectivités territoriales fixant des objectifs chiffrés en la matière après que des indicateurs de consommation d’espace auront été définis. Dans les six mois suivant la publication de la présente loi, une étude sur la réforme de la fiscalité et sur les incitations possibles pour limiter l’extension du foncier artificialisé sera effectuée ; […] e) Assurer une gestion économe des ressources et de l’espace et réexaminer dans cette perspective les dispositifs fiscaux et les incitations financières relatives au logement et à l’urbanisme. »]]. Elle annonce un audit qui permettra de préciser les modalités de prise en compte de la TVB[[La TVB (Trame verte et bleue) est une mesure du Grenelle de l’environnement qui vise à enrayer le déclin de la biodiversité par la préservation et la restauration des continuités écologiques.]] par la fiscalité locale et les concours financiers de l’État (art. 24). Difficultés liées à l’objet de la saisine Malgré ces éléments de contexte plutôt favorables, le groupe de travail a rencontré de nombreuses difficultés. La première demande figurant dans la lettre de saisine s’est heurtée à la problématique de l’accès aux données. Certaines dépenses fiscales n’étant pas recensées comme telles dans les annexes au PLF, en « dresser une liste exhaustive » s’avère donc hasardeux. Le groupe de travail s’est efforcé d’approcher au plus près cette exhaustivité. De nombreuses subventions publiques ne sont ni recensées ni détaillées. Ainsi en est-il, par exemple, des subventions hors budget. Le contenu d’autres subventions n’est pas précisé. Certaines semblent soutenir un mélange d’actions favorables et défavorables à la biodiversité, d’autres sont mixtes en elles-mêmes. Les subventions des collectivités territoriales ne semblent pas consolidées. Certaines subventions de fait, telles que les allègements de réglementation ou l’absence d’internalisation des externalités, demeurent difficiles à quantifier. En l’absence de comptabilité analytique, la nomenclature budgétaire fonctionnelle utilisée par l’État ne permet pas d’identifier spontanément les subventions potentiellement favorables ou défavorables à la biodiversité. Un long travail d’investigation mission par mission, programme par programme, action par action, selon l’architecture budgétaire mise en place par la LOLF, a donc été nécessaire. S’il a cerné l’essentiel, il n’a probablement pas permis une analyse totalement exhaustive. Au-delà de la mise en place d’un groupe de travail, la lettre de saisine faisait le constat qu’« un pilotage interministériel qui saura mobiliser l’ensemble des acteurs, y compris les secteurs bénéficiaires de ce type de subventions, s’avère nécessaire ». Pour répondre à ce souhait, il a été choisi d’inclure d’emblée dans le groupe de travail des représentants de « l’ensemble des secteurs, y compris les secteurs bénéficiant de ce type de subventions ». D’où de nouvelles difficultés. On sait qu’il est toujours difficile de revenir sur des soutiens publics, qu’ils prennent la forme de subventions publiques ou de dépenses fiscales. Les secteurs bénéficiaires pour lesquels ces aides peuvent représenter un avantage substantiel cherchent assez naturellement à les prolonger, y compris lorsque la cause originelle a disparu. À l’inverse, le financement de ces soutiens pesant sur les contribuables, la charge peut paraître légère pour chacun, tandis que leur cumul sera lourd pour l’État et l’ensemble des contribuables. Dès la première séance, il a été précisé que les buts du groupe de travail n’étaient pas tant budgétaires (diminuer le montant total des soutiens) qu’environnementaux (mieux identifier les soutiens existants et, si possible, en modifier les modalités d’attribution pour les rendre moins dommageables à la biodiversité). Néanmoins, des propositions de nouvelles normes, de nouvelles amendes, de nouvelles taxes, d’affectation de taxes existantes, de nouveaux financements publics affectés à la biodiversité, d’interventions accrues de l’État ont été formulées de façon récurrente, par plusieurs membres, dans des contributions écrites comme orales. Cette difficulté d’appropriation du sujet tient à trois éléments cumulatifs. D’abord, une prise de conscience peut-être insuffisante de la situation générale des finances publiques, de la nécessaire rationalisation de la dépense publique, et de son allocation optimale. Ensuite, une perception de la fiscalité essentiellement comme outil budgétaire de prélèvement et de financement de politiques publiques et non comme outil incitatif d’orientation vers des comportements éco-efficients. Enfin, une sous-estimation des effets pervers des subventions publiques et des dépenses fiscales dommageables en matière de biodiversité et d’environnement en général. Dans tous les cas, les réflexions conduites dans le cadre de ce groupe de travail et de ce rapport devraient contribuer à remettre en cause la culture de l’accroissement de la dépense publique au profit d’une approche plus nuancée de cette dépense et de ses éventuels effets pervers sur la biodiversité. Périmètre du rapport Face à ces difficultés et à ces interrogations, le champ du rapport doit être précisé sur trois plans : thématique, budgétaire, géographique. Sur le premier plan, le groupe de travail s’en est tenu à la lettre de saisine et aux précisions apportées par le commanditaire. Ses constats et recommandations ne sauraient préjuger d’arbitrages ultérieurs. Le groupe de travail est pleinement conscient qu’il peut être décidé, pour d’autres raisons, de maintenir, à court terme, des soutiens publics identifiés comme dommageables à la biodiversité. De tels soutiens peuvent même engendrer des effets positifs sur d’autres aspects de la thématique environnementale, et avoir été mis en place dans ce but. Sur le deuxième plan, le chapitre 1 précise les formes de soutien public prises en compte. Il suffit d’indiquer ici que le groupe de travail s’est accordé pour retenir les différentes formes de soutien public : subventions budgétaires, subventions hors budget, dépenses fiscales, non-internalisation d’externalités négatives, soutiens de l’État ou des collectivités territoriales, etc. Quant au plan géographique, le groupe de travail a considéré qu’il devait croiser des critères territoriaux et des critères de soutien public pour le définir. À cette aune, quatre champs géographiques ont été retenus. Le premier concerne l’aide publique au développement (APD). Destinée à des pays étrangers, il ne s’agit certes pas de biodiversité française. Mais il s’agit bien de soutiens publics français. En outre, étant donné la richesse et la fragilité des écosystèmes des pays récipiendaires d’une grande partie de cette APD, il est possible, voire probable qu’un même euro de dépense publique dommageable entraîne des effets négatifs supérieurs dans ces pays qu’en France métropolitaine. Le deuxième concerne la biodiversité marine : 11 millions de km2 de milieux marins et plus de 14 000 km2 de récifs coralliens se trouvent sous juridiction française. Par les mers, la France est voisine de 35 pays. Elle possède le second domaine marin dans le monde après les États-Unis et le premier au sein de l’Union européenne (UE). Dès lors, aucune stratégie ni action européenne de conservation ou d’utilisation durable de la biodiversité marine ne peuvent réussir sans la France. Le troisième concerne l’Outre-mer français. Il relève pleinement du champ du rapport pour deux raisons. D’une part, les soutiens publics y sont plus élevés en termes relatifs qu’en métropole. D’autre part, la richesse et la fragilité de la biodiversité y sont plus importantes. Quatre des cinq « points chauds » français (sur 25) de la biodiversité mondiale se trouvent en Outre-mer : Nouvelle-Calédonie, Océan Indien, Polynésie et Caraïbes (outre la Méditerranée). Ces territoires abritent un patrimoine naturel d’importance mondiale, dont 10 % des récifs coralliens et lagons de la planète ou encore 8 millions d’hectares de forêt tropicale. Le Muséum national d’histoire naturelle recense plus de 240 plantes vasculaires endémiques en Nouvelle-Calédonie contre 66 en métropole. La Polynésie française accueille 28 espèces d’oiseaux endémiques contre une seule en métropole. Les collectivités d’outre-mer abritent autant d’espèces endémiques que toute l’Europe occidentale : 3 450 espèces végétales et 380 espèces de vertébrés uniques au monde. Cette particularité provient de leur situation géographique. L’Outre-mer français est présent dans les deux hémisphères, dans trois océans et dans huit grandes régions biogéographiques situées en zones australe, antarctique, équatoriale, tropicale et sub-boréale. Le quatrième champ concerne la métropole. Le territoire métropolitain est plus riche en biodiversité que la plupart des autres pays de l’UE. C’est là que les données sont les moins inaccessibles et que les montants en jeu sont les plus importants. Organisation du rapport La communauté scientifique s’accorde à reconnaître l’existence de cinq grandes causes d’érosion de la biodiversité. Le Global Biodiversity Outlook de 2006 les identifie comme suit : la modification des habitats, la surexploitation des ressources, les pollutions à l’azote et au phosphore (le groupe de travail ne se limite pas à ces deux polluants), les espèces invasives et le changement climatique[[Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique (2006), Perspectives mondiales de la diversité biologique, 2e édition, Montréal, 83 p.]]. Ces causes sont reprises dans les débats internationaux, dans les deux stratégies européennes et dans les deux stratégies nationales de la biodiversité. Le groupe de travail a considéré que ces cinq causes étaient en France – Outre-mer et domaine maritime compris – les principaux facteurs d’érosion de la biodiversité. Il lui a donc paru logique d’organiser le rapport en fonction de celles-ci et des soutiens publics qui les favorisent [[Le changement climatique est traité de pair avec les pollutions. En effet, une des causes majeures du changement climatique se trouve dans l’émission de gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone, le méthane, le protoxyde d’azote ou encore l’ozone. Or ces gaz proviennent essentiellement d’activités humaines polluantes. C’est pourquoi le rapport étudiera conjointement ces deux pressions.]].

Synthèse

Centre d'Analyse Stratégique
Centre d’Analyse Stratégique
L’impact des subventions publiques sur l’environnement fait l’objet d’une attention croissante depuis plusieurs décennies, notamment au sein de l’OCDE et de l’UE. La focalisation sur la biodiversité est plus récente : la Conférence des parties issue de la Convention sur la diversité biologique (CDB) a adopté en 2010 à Nagoya un plan stratégique dont l’un des principaux objectifs est la réforme, la suppression ou la réduction de ces subventions d’ici 2020. La stratégie communautaire en faveur de la diversité biologique recommandait cette élimination depuis 1998. En France, la loi d’août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement[[Articles 26 et 48 de la loi 2009-967, dite loi « Grenelle 1 ».]] prévoit explicitement que l’État, sur la base d’un audit, fera état des mesures fiscales défavorables à la biodiversité et proposera de nouveaux outils permettant un basculement progressif vers une fiscalité mieux adaptée aux nouveaux enjeux environnementaux. Ce texte a conduit le Centre d’analyse stratégique à mettre en place, à la demande des secrétaires d’État chargées de l’Écologie et de la Prospective, un groupe d’experts, d’économistes, de représentants de syndicats, des entreprises, d’associations environnementales et de l’administration. Cette réflexion a rencontré des difficultés liées à l’identification de nombreuses subventions qui ne sont ni recensées ni détaillées, à l’appréciation de leur caractère plus ou moins dommageable pour la biodiversité ainsi qu’à la caractérisation des mesures susceptibles d’être réformées. Malgré la qualité des contributions et l’engagement des rapporteurs, le travail mené ne peut prétendre à une réelle exhaustivité. Il s’est néanmoins efforcé d’aboutir à des propositions pragmatiques dont l’application réduirait les dommages à la biodiversité. Le groupe a ainsi écarté de son champ d’analyse les considérations trop générales relatives aux modes actuels de développement. Il s’est également efforcé de ne pas développer les enjeux liés à des formes d’intervention des pouvoirs publics non financières, bien que ces questions soient souvent revenues dans les débats. Il s’est en revanche appliqué à traiter la question dans une acception large et dans un esprit positif qui consistait à ne jamais considérer qu’une subvention pouvait ne pas avoir de justification légitime et qu’il suffisait donc de la supprimer. Les aides de l’État constituent même parfois un soutien direct à une activité dont l’exercice peut conduire à la dégradation de la biodiversité. Dans ces cas, le groupe a cherché non à les supprimer mais à les réorienter vers des pratiques moins dommageables, à somme constante. Il a abordé le sujet en partant des grandes causes de pressions anthropiques sur la biodiversité, approche couramment pratiquée dans les enceintes internationales. Il apparaît en outre que les mesures qui contribuent aujourd’hui à la dégradation de la biodiversité résultent bien souvent de choix hérités du passé, à une époque où cet enjeu n’était pas suffisamment pris en compte. Définitions, méthodes, limites La notion de subvention demandait à être précisée. Dans ce rapport, le concept d’aide publique nuisible à la biodiversité renvoie à trois notions : • les transferts financiers de l’État ou des collectivités territoriales vers des agents privés ou éventuellement publics ; • une action gouvernementale de nature à conférer un avantage en termes de revenu ; • une absence d’internalisation de certains effets externes. Leur caractère dommageable doit être établi par comparaison avec un état du monde sans action publique qui serait plus favorable à la biodiversité. Le groupe de travail a retenu une définition extensive des aides publiques dommageables à la biodiversité qui couvre à la fois les subventions, les dépenses fiscales, les avantages d’origine réglementaire, la non-application ou l’application partielle de la réglementation ainsi que les subventions implicites. Pour réformer les aides publiques nuisibles à la biodiversité, plusieurs cadres méthodologiques ont été proposés par l’OCDE, le rapport TEEB, la Commission européenne. Le groupe a retenu une approche en trois étapes, conformément à la lettre de saisine : • un inventaire des aides publiques susceptibles d’être dommageables à la biodiversité ; • la tentative de description de certains liens entre aide publique et dégradation de la biodiversité ; • des propositions de reconfiguration des aides publiques identifiées comme dommageables. La relation de causalité entre aide publique et état de la biodiversité peut être délicate à établir car les liens sont parfois indirects ou ambivalents. Un cadre général a été proposé par l’OCDE avec le modèle DPSIR («Driver-Pressure-State-Impact-Response »). Ce modèle implique de choisir des indicateurs, tant au niveau des forces motrices (drivers) que des pressions (dégradation des habitats, surexploitation, pollutions, invasions) et des réponses des écosystèmes. Le groupe a eu rapidement conscience que les relations entre ces indicateurs pouvaient être complexes, voire problématiques. Concernant la réforme, si la référence conceptuelle à un système de prix internalisant l’ensemble des coûts et avantages était centrale, les propositions ont parfois eu recours à d’autres formes d’internalisations, comme les normes et la réglementation, qui paraissaient plus réalistes. Les cinq principales causes d’érosion de la biodiversité en France La notion de biodiversité fait l’objet de multiples définitions qui renvoient, d’une part, à la variété des espèces existantes, aux différents niveaux d’organisation du vivant et, d’autre part, aux approches fonctionnelles et à la pluralité des services rendus. La définition retenue ici, comme par le groupe de travail présidé par Bernard Chevassus-au-Louis[[Centre d’analyse stratégique (2009), L’approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes, op. cit., p. 34.]], renvoie à l’ensemble du tissu du vivant, faune, flore, micro- organismes, et considère deux variables majeures : la diversité du vivant avec ses trois principaux niveaux d’organisation, et l’appréciation de son abondance qui détermine à la fois son importance pour l’homme et sa probabilité de maintien. Sont ainsi prises en compte la diversité remarquable, la diversité ordinaire, la diversité fonctionnelle, la pluralité des services écosystémiques et la diversité paysagère. Au-delà des définitions, la connaissance et le suivi de l’état de la biodiversité impliquent de pouvoir, à travers des observatoires, la surveiller et, dans la mesure du possible, la quantifier afin notamment d’alerter la collectivité sur son évolution. Les travaux publiés depuis deux décennies s’accordent sur le constat d’une érosion accélérée de la biodiversité et sur l’existence de cinq grandes pressions qui en sont à l’origine : • la destruction et la dégradation qualitative des habitats par la fragmentation, le changement d’usage des terres, l’artificialisation, la simplification et l’intensification des pratiques agricoles ; • la surexploitation des ressources naturelles renouvelables (ressources halieutiques, en eau, sols, forêts) ; • les pollutions (nitrates, pesticides, thermiques, résidus de médicaments) ; • le changement climatique qui agit sur l’ensemble des équilibres, mais fait l’objet de multiples autres formes d’actions et de politiques ; • les espèces exotiques envahissantes. Il est délicat d’établir une hiérarchie entre ces causes, même si le principal impact semble résulter de l’artificialisation des sols et de la dégradation des habitats. Les effets tendent à se renforcer mutuellement. Le changement climatique apparaît comme une cause potentiellement majeure qui dépend certes des politiques nationales mais aussi internationales. La question de la coordination des politiques nationales se pose également pour les espèces exotiques envahissantes, notamment par souci de conformité avec les règles de l’OMC. Enfin, il est clair que si les mécanismes de subventions publiques peuvent s’appliquer de façon non différenciée à l’ensemble du territoire national, leurs effets sont souvent bien différents selon les milieux considérés. À l’inverse, certains soutiens publics sont parfois concentrés sur des territoires particulièrement riches et/ou fragiles en matière de biodiversité. Les aides publiques qui favorisent la destruction et la dégradation des habitats naturels Les aides publiques peuvent contribuer à trois formes de destruction des habitats jugées préoccupantes en France : l’artificialisation, la semi-artificialisation et la fragmentation. Les surfaces sont dites artificialisées lorsqu’elles sont retirées de leur état « naturel », agricole ou forestier, pour être bâties, revêtues, ou transformées en jardins, espaces de sports ou de loisirs. L’artificialisation est une tendance lourde (21 000 km2 depuis 1990), principalement du fait de zones urbaines discontinues et des zones industrielles et commerciales, au détriment des terres agricoles. Un ensemble d’aides publiques contribue à l’étalement urbain et l’éloignement des zones d’activité en influençant les choix individuels ou certains déterminants politiques sur les activités économiques. Les aides à l’acquisition de l’habitation principale vont préférentiellement à des logements neufs d’autant moins chers qu’ils sont loin des centres-villes, alors que la réhabilitation ne consomme pas d’espace. Les aides à la construction de logements neufs pour l’acquisition ou l’investissement locatif vont également dans ce sens. Le faible coût des transports et son abaissement relatif, notamment par rapport au coût des logements, favorisent des arbitrages suscitant l’étalement urbain. Pour attirer des activités sur leur territoire et augmenter leurs recettes fiscales, les communes périurbaines tendent à offrir des niveaux de taxe professionnelle (remplacée par la contribution économique territoriale) plus faibles. La perception au niveau communal de ce type de recettes suscite des effets de concurrence pervers car il induit parfois suréquipement et surconsommation d’espace. La semi-artificialisation est une forme intermédiaire d’artificialisation. Elle correspond à une simplification des paysages et à une intensification des usages des habitats. Depuis le début des années 1950, le changement d’utilisation des terres et l’intensification des systèmes de production ont entraîné une réduction de l’hétérogénéité et de la complexité des écosystèmes agricoles. Les habitats forestiers sont globalement en bon état. Le groupe a identifié des aides publiques pouvant favoriser, sous certaines conditions, des pratiques qui réduisent les fonctions naturelles des habitats agricoles, notamment par des incitations à l’intensification ou au maintien de cultures intensives (aides influant sur le prix des facteurs de production) et à la simplification des paysages (aides déterminant le maintien ou non d’éléments semi-naturels tels que haies, bosquets, mares, et le choix des cultures). Concernant les habitats forestiers, la perspective du développement du bois énergie ou de biocarburants de seconde génération pourrait, à terme, augmenter la part des habitats forestiers semi-artificiels. La fragmentation des habitats diminue la surface d’habitat disponible et augmente l’isolement des fragments (réduction de la connexion entre les populations). Elle est souvent liée à la mise en place d’une infrastructure linéaire de transport, pour les habitats terrestres, ou d’un barrage, pour les rivières. Certaines aides contribuent à cette fragmentation, en particulier les financements publics pour les réseaux de transport routiers, ferroviaires et fluviaux ou la sous-tarification de leur usage. En outre, il existe plusieurs formes de redevance pour service rendu ou pour utilisation du domaine public qui ne prennent pas suffisamment en compte les coûts sur la biodiversité. Les aides publiques qui favorisent la surexploitation des ressources naturelles renouvelables En France, la surexploitation de trois ressources naturelles renouvelables est jugée préoccupante : les sols, les ressources halieutiques et l’eau. De multiples activités humaines conduisent à une surexploitation des sols qui se traduit notamment par un appauvrissement des stocks de carbone. Parmi les aides publiques susceptibles de favoriser ces activités, le groupe a identifié en particulier : • celles qui contribuent à des changements d’occupation des sols (retournement des prairies pour cultures annuelles, imperméabilisation des surfaces agricoles), notamment en influençant certaines activités consommatrices de surfaces foncières, comme l’extension des surfaces artificialisées (logements, zones d’activité), les infrastructures de transport et autres équipements collectifs (publics ou privés) ou en favorisant le développement des agrocarburants ; • celles qui contribuent à l’intensification ou au maintien de pratiques intensives qui diminuent la teneur en carbone des sols (mesures indirectes encourageant la production, la mécanisation, l’usage d’intrants). Un ensemble d’aides publiques contribue à aggraver la surexploitation de la mer et des stocks halieutiques. En particulier, la pêche professionnelle, exposée à la stagnation des prises et à la concurrence de flottilles européennes, est confrontée à des fluctuations importantes de ses revenus orientés à la baisse et bénéficie de plusieurs aides dont la plus importante est l’exonération de taxe intérieure de consommation (TIC) sur les carburants pétroliers. Le groupe a identifié d’autres mesures ayant des effets potentiellement dommageables. Par ailleurs, la pêche récréative – qui ne bénéficie pas de subventions publiques – pourrait néanmoins faire l’objet de plus de suivi, contrôle des prises et, en premier lieu, d’information. Certaines aides publiques pourraient aggraver la surexploitation de la ressource en eau pour ses différents usages et ainsi affecter la biodiversité de certains hydrosystèmes : • les usages domestiques font l’objet d’une tarification incitant les opérateurs privés qui desservent 80 % de la population à favoriser la consommation ; • les usages industriels sont significativement en baisse mais certains usages sont exonérés de la redevance de prélèvement ; • la redevance de prélèvement perçue par les agences de l’eau est peu différenciée spatialement ; • la mobilisation de la ressource pour la production d’énergie bénéficie de plusieurs subventions ou dépenses fiscales ; • les usages agricoles bénéficient également de taux de taxes non incitatifs ou non internalisants qui aboutissent, malgré la baisse des surfaces irriguées depuis 2003, au maintien des volumes consommés. Bien que les soutiens aux investissements initiaux et au renouvellement d’infrastructures soient généralement bien conçus, cette tendance est liée à une tarification forfaitaire des services de réseau et à une redevance de prélèvement et consommation de la ressource peu incitative. Comme le note le Conseil économique, social et environnemental, la plupart des acteurs de l’eau, en France, «tiennent pour acquis le “confort” hydrique de l’Hexagone », ce qui rend difficile la remise en cause de la pertinence des systèmes d’irrigation et a conduit, jusqu’ici, à ne pas envisager la mise en place de marchés de droits ou le développement de dispositifs assurantiels plus favorables. La modification progressive du climat risque cependant de provoquer des épisodes de sécheresse prolongée et de perturber les régimes hydriques des différents bassins, soulevant de nouveau ce type de questions à l’avenir. Les aides publiques qui favorisent les pollutions La pollution touche tous les milieux : l’air, les sols et les eaux. La pollution atmosphérique désigne un ensemble d’éléments (aérosols, métaux traces, produits organiques persistants, ions, micro-organismes) dont la présence résulte de processus naturels (remise en suspension de particules par le vent, émissions foliaires, activité volcanique, aérosols marins) et anthropiques (industries diverses, trafic automobile, usines d’incinération, chauffage domestique). La régulation de ces pollutions fait l’objet d’une série de textes et d’engagements internationaux de la France. Les aides publiques qui favorisent les émissions sont principalement des dispositions ou taxes insuffisamment internalisantes, voire peu incitatives dans les domaines de l’utilisation d’énergie fossile et de biomasse, de l’industrie et du transport. Les contaminations diffuses des sols par des éléments traces métalliques d’origine humaine sont principalement liées aux apports par voie aérienne (rejets industriels, transports) et aux épandages agricoles (ainsi qu’à certains produits dont l’utilisation s’est poursuivie au-delà de délais raisonnables, comme le chlorodécone). Les sites pollués soulèvent des problèmes dont l’importance est parfois accrue par leur caractère « orphelin » et la difficulté de connaître l’origine de certains polluants. L’internalisation des coûts est alors réellement problématique en l’absence d’élargissement de la responsabilité de certains acteurs et constitue une subvention de fait. Le principe pollueur-payeur est souvent inapplicable en l’espèce. La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les déchets ménagers et assimilés et les déchets industriels spéciaux, qui a été conçue dans une perspective de financement, n’est pas incitative. Elle fait en outre l’objet de multiples exonérations. Enfin, la pollution des eaux semble clairement sous-tarifée. Il s’agit, notamment des pollutions urbaines mais le cas le plus préoccupant est sans doute celui des nitrates d’origine agricole qui soulève des problèmes à grande échelle dans certaines régions, en particulier en Bretagne. Il traduit un défaut patent d’internalisation et entraîne un ensemble de dépenses pour les ménages, notamment sur leur facture d’eau. Selon le ministère de l’Écologie, les coûts de traitement de l’azote par les stations de potabilisation des eaux seraient, en 2003, compris entre 220 et 510 millions d’euros, auxquels s’ajoutent les autres surcoûts supportés par ces services (nettoyage des captages et conduites d’aspiration eutrophisés, délocalisation de captages, etc.). L’ensemble de ces dépenses permet de traiter 3 000 tonnes d’azote, soit seulement 0,4 % de l’excédent rejeté aux milieux aquatiques. Les aides publiques qui favorisent l’introduction et la dissémination des espèces envahissantes Certaines activités humaines ont pour effet de faciliter le contournement des obstacles qui avaient donné lieu au développement de flores et de faunes distinctes selon les régions. Des espèces ont ainsi été introduites, accidentellement ou intentionnellement, dans des zones éloignées de leur habitat d’origine. Parfois, elles s’implantent si bien qu’elles perturbent profondément les écosystèmes et deviennent des espèces exotiques envahissantes ou « invasives ». Leur impact sur la biodiversité, la santé ou les activités humaines sont très divers et d’intensité variable. Une invasion biologique peut être spontanée mais un ensemble d’activités humaines participent le plus souvent à l’introduction, à la dissémination ou au caractère envahissant d’espèces exotiques. Les déplacements de personnes ou de marchandises, dont le volume s’est considérablement accru avec la libéralisation des échanges internationaux, accroissent les probabilités de ces introductions alors même que la dégradation des habitats, les pollutions ou les changements climatiques fragilisent les milieux face au risque d’invasion. Certaines activités engendrent des risques accidentels, alors que d’autres (les transports ou le tourisme) peuvent être qualifiés de structurels, voire introduire intentionnellement ou par négligence des espèces exotiques (nouvelles cultures, animaux de compagnie). Enfin, une espèce peut devenir invasive en raison de changements dans son milieu. Certaines de ces activités bénéficient de subventions. Le groupe a identifié peu de subventions favorisant directement des invasions biologiques. Il s’agit d’aides résultant principalement de l’inaction publique dans la lutte contre les espèces envahissantes au niveau réglementaire et de la non- internalisation de coûts externes négatifs. Les transports, les ports et les aéroports sont largement subventionnés ou sous- tarifés. En particulier, les transports internationaux ne payent pas leurs externalités, y compris celles sur la biodiversité[[Si le transport international entre dans le système ETS (système européen d’échanges de quotas d’émissions), les externalités dues aux émissions de CO2 seront, en théorie, internalisées.]] (absence de TIC). Plusieurs taux réduits de TVA sont également repérés (certains produits anti-parasitaires, plantes ornementales, parcs zoologiques). Les coûts externes résultant des invasions ne sont généralement pas internalisés, notamment dans le prix des transports via la structure des droits de douane. Mais c’est l’inaction réglementaire qui apparaît la plus critiquable. La politique communautaire, par exemple, ne simplifie pas les actions coordonnées entre les États membres. En outre, elle tarde à construire une stratégie européenne de lutte contre les espèces envahissantes. Enfin, la surveillance internationale fait globalement défaut. Recommandations Compte tenu de l’étendue et de la complexité de la mission, le rapport distingue des orientations générales, qui définissent des objectifs à moyen terme, et des propositions, qui portent davantage sur des suggestions de réformes concrètes à plus court terme. La mission du groupe était d’identifier les subventions nuisibles à la biodiversité et d’avancer des pistes de réforme, mais pas d’identifier des situations privilégiées dans un but d’économie budgétaire. Aussi, l’ensemble des orientations et des propositions doit-il s’entendre a priori comme ne modifiant pas le volume des aides dont tel secteur ou type d’activité bénéficie, mais s’efforçant de faire disparaître ou d’amenuiser les incitations délétères. Cette synthèse présente une sélection des recommandations du groupe de travail, sélection qui privilégie : • les plus faciles à mettre en œuvre ; • les plus conceptuellement innovantes. Elles sont regroupées par catégories. Seul l’énoncé de la proposition est indiqué ici, le lecteur pourra se reporter à la partie Recommandations pour les informations complémentaires. Recommandation n° 1 – Transparence et reporting Au vu de la richesse et de la fragilité de la biodiversité sur le territoire français et plus particulièrement dans les DOM-TOM, les soutiens publics devraient y être évalués et (parfois) conditionnés avec plus de rigueur. Se doter d’un Document de politique transversale relatif à la biodiversité. Recommandation n° 2 – Évaluations Accorder aux impacts sur la biodiversité un même poids et un même niveau de précision que ceux accordés aux gaz à effet de serre dans les études d’impact des projets, l’évaluation environnementale des plans et programmes et dans les études d’impact des projets de loi transmis par le gouvernement au Parlement. Mieux intégrer la biodiversité dans les évaluations socioéconomiques des projets d’infrastructures : • en prenant mieux en compte les impacts indirects d’une nouvelle infrastructure, notamment par le biais de l’urbanisation induite ; • en ne réduisant pas la question de l’impact sur la biodiversité aux atteintes aux espèces protégées et en l’étendant aux impacts sur le fonctionnement des écosystèmes ; • en révisant les valeurs utilisées dans le calcul socioéconomique afin d’intégrer, même partiellement, les valeurs de la biodiversité. Toutefois, dans la mesure où la fixation de valeurs tutélaires pour la biodiversité n’est pas immédiatement à portée de main, renforcer dès à présent l’application des exigences en matière d’évitement, d’atténuation ou de compensation des impacts. Recommandation n° 3 – Commande publique Utiliser la commande publique comme un levier pour diminuer les soutiens dommageables à la biodiversité. Recommandation n° 4 – Rendre plus incitatives les taxes et redevances Engager une réflexion sur les moyens permettant à l’exécutif d’instituer plus fréquemment de véritables écotaxes incitatives dans des conditions de sécurité juridiques satisfaisantes, autant que dans le respect de la Constitution et des principes généraux du droit (notamment l’égalité devant l’impôt). Faire évoluer le régime des redevances pour mieux prendre en compte les impacts sur l’environnement et la biodiversité. En outre, moduler la redevance domaniale due par les exploitants de granulats en fonction de la sensibilité écologique des fonds et des milieux marins. Instituer une taxe prolongeant la redevance d’occupation du domaine public maritime au-delà des 12 milles dans la Zone économique exclusive ou sur le plateau continental. Les concessionnaires de mines, les titulaires de permis d’exploitation de mines et les explorateurs de gisements de pétrole et de gaz combustibles étant exonérés de redevance communale et départementale des mines au-delà de 1 mille marin de la ligne de base, créer une redevance domaniale, perçue par l’État, de 1 à 12 milles dans les eaux territoriales. Recommandation n° 5 – Artificialisation des sols et étalement urbain Réserver le Prêt à taux zéro+ (PTZ+) dans le neuf aux logements intra-urbains et/ou à proximité des TCSP (transports en commun en site propre). Supprimer la possibilité qu’ont les collectivités territoriales d’exonérer de 50 % de la taxe d’aménagement les maisons individuelles en diffus financées à l’aide du PTZ+. Redéfinir le zonage géographique du dispositif Scellier et autres régimes d’investissement locatif dans le neuf : • en excluant les zones géographiques B2 (agglomérations de plus de 50 000 habitants et de moins de 250 000 habitants) ; • en réservant ce dispositif à l’intra-urbain et/ou à proximité des transports en commun. Inclure des critères d’impact sur la biodiversité et de maîtrise de l’étalement urbain dans le calcul de la compensation affectée aux collectivités locales pour leurs frais liés à l’établissement ou à la révision de leurs documents d’urbanisme. Rendre obligatoire la mention de la distance à la gare ou à la station de transport en commun la plus proche lors de l’ouverture de nouvelles zones urbaines (« zone U ») au plan local d’urbanisme (PLU), dans l’évaluation environnementale du PLU et lors de la commercialisation de nouveaux lotissements. Supprimer l’abattement de 50 % de la valeur par mètre carré sur laquelle est basé le calcul de la taxe d’aménagement pour les entrepôts et hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale, quelle que soit leur localisation. Rendre obligatoire le Versement pour sous-densité (VSD) dans les zones logistiques, entrepôts, et hangars. Majorer la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) pour les établissements situés en zone périphérique et la minorer pour les établissements situés en centre urbain. Réviser la taxe d’aménagement appliquée aux parkings : • réduire l’écart de taxation entre les parkings intégrés au bâti et les parkings non intégrés ; • réviser le taux de cette taxe afin de mieux internaliser les coûts sur la biodiversité. Recommandation n° 6 – Transports Ralentir la fragmentation des habitats. La diminution des soutiens publics à la création de nouvelles infrastructures au profit de l’entretien, de la requalification et de la mise à niveau du réseau existant apparaît comme une solution de minimisation des impacts dommageables des subventions publiques aux transports. Mieux internaliser les coûts des infrastructures routières sur la biodiversité : • en conditionnant l’autorisation de construction à des mesures d’atténuation- compensation beaucoup plus strictes ou en instaurant une taxe internalisant les dommages liés à la construction de l’infrastructure ; • en faisant payer les dommages à la biodiversité résultant de l’usage des infrastructures autoroutières via les péages et/ou une fraction du prix du carburant vendu dans les stations-services situées dans leur emprise. Recommandation n° 7 – Eau À court terme, instaurer un tarif plancher de la redevance pour prélèvement brut pour chaque usage de l’eau et réviser les tarifs plafonds pour y intégrer, en plus de la récupération des coûts des services de gestion de l’eau, celle des coûts sur le milieu aquatique et sur la biodiversité. À moyen terme, instaurer une redevance sur prélèvement net ou sur prélèvement brut corrigé par un coefficient de restitution. Assujettir, en outre, le drainage à la redevance prélèvement. Publier au plus vite le décret d’application de l’article 161 de la loi Grenelle 2 qui fixe le taux de pertes en eau des réseaux de distribution d’eau au-delà duquel les services publics de distribution doivent établir un projet de programme pluriannuel de travaux d’amélioration du réseau. Réviser la redevance pour pollution non domestique : • en ciblant la redevance sur les substances dangereuses prioritaires de la directive- cadre sur l’eau (2000/60/CE) ; • en revoyant les tarifs de sorte qu’ils prennent en compte les coûts des substances dangereuses prioritaires sur le milieu aquatique et sur la biodiversité ; • en incluant l’élément chaleur tout au long de l’année ; • en assujettissant les activités de collecte et de traitement des eaux usées. Revoir les seuils en dessous desquels une activité est assujettie à la redevance pour pollution domestique (et non à la redevance pour pollution non domestique), de sorte que les activités contribuant significativement aux rejets de substances dangereuses prioritaires soient assujetties à la redevance pour pollution non domestique. Assujettir l’ensemble des installations hydroélectriques à la redevance pour obstacle. Recommandation n° 8 – Agriculture Réviser la structure de taxation des facteurs de production agricole via une baisse des charges sociales et de la fiscalité sur le foncier non bâti, partiellement compensée par une augmentation de la fiscalité sur les intrants potentiellement négatifs pour la biodiversité dès lors qu’ils sont utilisés de façon excessive ou inappropriée (engrais, produits de traitement des cultures, eau). Soumettre les engrais et produits phytosanitaires au taux normal de TVA. Renforcer, à terme, la prise en compte de la biodiversité dans les soutiens du premier pilier de la PAC (modulation du montant des Droits à paiement unique en fonction de critères environnementaux, en particulier de critères relatifs à la biodiversité). Renforcer, à terme, les mesures agro-environnementales du second pilier ciblées sur la biodiversité (renforcement technique, budgétaire, et meilleure prise en compte des démarches territoriales). Recommandation n° 9 – Industrie Introduire l’arsenic et le sélénium dans la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour émissions polluantes. Expérimenter une véritable écotaxe internalisante (ou une composante de la TGAP) sur un polluant atmosphérique. Recommandation n° 10 – Collectivités territoriales Intégrer un critère de biodiversité dans le calcul de la dotation générale de fonctionnement. Un critère surfacique susceptible de s’appuyer sur des données peu contestables semble le plus approprié. Recommandation n° 11 – International La France présidente du G8 et du G20 pourrait proposer un engagement de rationalisation et d’élimination à moyen terme des subventions dommageables à la biodiversité lors du G20 de fin 2011 à Cannes, dans la ligne de l’engagement pris pour les subventions aux énergies fossiles lors du G20 de Pittsburgh en 2009. Développer l’échange dette-nature, en particulier augmenter la part des Contrats de désendettement et de développement (C2D) affectée à la biodiversité.

 

Auteurs :

– Guillaume Sainteny Président
– Jean-Michel Salles Vice-président
– Peggy Duboucher, Géraldine Ducos, Vincent Marcus, Erwan Paul Rapporteurs
– Dominique Auverlot, Jean-Luc Pujol Coordinateurs

Centre d’analyse stratégique

www.strategie.gouv.fr

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