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Rapport du GIEC

Adaptation au changement climatique

L'appel de I4CE, IDDRI et La Fabrique Ecologique pour une prise de conscience politique en France

Le dernier rapport du GIEC est sans appel : l’adaptation aux impacts du changement climatique n’est plus une simple option, mais un enjeu vital y compris en France. Même des efforts indispensables et substantiels de réduction des émissions ne permettront pas d’éliminer tout risque climatique. Malheureusement, aujourd’hui, la France n’est pas prête à faire face aux impacts climatiques. Il n’existe pas de réelle politique d’adaptation : même si des choses sont engagées dans certains secteurs et sur certains territoires, la dynamique en place est très loin d’être suffisante. Face à ce constat, trois think tanks – I4CE, IDDRI et La Fabrique Ecologique – proposent une analyse du rapport du GIEC au moment où la France entame la révision de son plan national d’adaptation (PNACC).

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Pour un moment politique sur l’adaptation en France

Le rapport du Giec est sans appel : l’adaptation aux impacts du changement climatique n’est plus une option, mais doit être immédiatement engagée en complément des actions d’atténuation. Le plan national d’adaptation français n’est pas à la hauteur des enjeux. Vivian Depouès, Morgane Nicol d’I4CE, Alexandre Magnan de l’Iddri et Magali Reghezza, maître de conférences à l’École normale supérieure et membre du Haut Conseil pour le climat, auteurs de ce billet, appellent à ce que la nouvelle Stratégie française énergie-climat soit l’occasion d’un moment politique fort et aboutisse à un cadre de référence ambitieux sur l’adaptation, comprenant 7 éléments essentiels.
  • Le rapport du Giec est sans appel : l’adaptation aux impacts du changement climatique n’est plus une option Le 2e volet du 6e rapport d’évaluation du Giec rendu public ce 28 février est clair : les impacts des changements climatiques sont déjà là et continueront de s’accroître en proportion des émissions de gaz à effet de serre. Ce constat vaut notamment pour l’Europe et la France, qui connaissent, et connaîtront dans les dix ans à venir, des vagues de chaleur intenses, plus longues et plus fréquentes, des épisodes de sécheresse prolongés qui menacent la production agricole, dégradent les forêts et les puits de carbone, des conditions propices aux incendies qui se décalent vers le nord et arrivent plus tôt dans l’année, une réduction de l’enneigement qui met en péril les économies de montagne, des pluies intenses qui provoquent d’importantes inondations. Le rapport du Giec constate que même des efforts substantiels et indispensables de réduction des émissions ne permettront pas d’éliminer tout risque climatique, démontrant ainsi le caractère incontournable de l’adaptation. En s’y préparant suffisamment tôt, les dommages socio-économiques potentiels du changement climatique peuvent être minimisés. De plus, l’adaptation amènera des bénéfices en termes de compétitivité et de souveraineté, de sécurité, et d’augmentation du bien-être. Du point de vue de la rationalité économique, tous les rapports (Global Commission on Adaptation, Commission européenne, Haut Conseil pour le climat, etc.) le rappellent : anticiper coûtera bien moins cher que réparer. Il est donc crucial d’engager, dès à présent, la dynamique qui nous permettra de faire face aux conséquences d’un climat qui change. Les effets du réchauffement actuel et futur doivent être pris en compte dans toutes nos décisions, qu’elles touchent à l’économie, la finance, la fiscalité, l’emploi, le pouvoir d’achat, l’éducation et la formation. Il est indispensable de passer de l’anecdotique au systématique, de l’ajustement marginal et trop souvent réactif à une adaptation qui s’attaque aux racines de nos vulnérabilités. Déployer une telle ambition est une question de responsabilité, mais aussi de courage politique. Les faits sont scientifiquement établis et les bouleversements désormais indiscutables.
  • L’absence d’une réelle politique d’adaptation au changement climatique en France Aujourd’hui, la France n’est pas prête à faire face ni aux stress chroniques – par exemple la baisse de la disponibilité en eau –, ni aux événements extrêmes – par exemple les submersions marines (Sénat, 2019). Une véritable stratégie d’adaptation reste à définir et à mettre en œuvre (Haut Conseil pour le climat 2021). Le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) qui existe à l’heure actuelle n’a pas réussi à incarner une réelle politique publique d’adaptation (IDDRI, 2019). Celle-ci y reste cantonnée à des mesures sectorielles et des actions dispersées, essentiellement réactives et curatives, sans vision globale et sans prise en compte des cobénéfices ou des risques de maladaptation. Il existe bien entendu des initiatives ou des plans d’action déjà engagés dans certains secteurs et sur certains territoires. Nous sommes cependant loin de l’ambition nécessaire pour répondre aux menaces d’un climat qui change, et qui va continuer à changer dans les décennies futures. Dans de multiples domaines, champs opérationnels, politiques publiques et privées, la question de l’adaptation n’est simplement pas posée ou limitée à l’injonction incantatoire. C’est le cas pour certaines infrastructures stratégiques (ports, réseaux ferrés, routes, assainissement), pour les choix de localisation ou d’investissements, pour de nombreuses opérations d’aménagement ou de renouvellement urbain. C’est également le cas pour les réformes concernant la santé et la protection sociale, la formation, et les systèmes d’indemnisation et de mutualisation des risques. Il manque en définitive un référentiel stratégique opérationnel, capable de répondre au besoin de transversalité et de mise en œuvre rapide. L’adaptation ne reposera pas uniquement sur l’État. Mais elle n’a aucune chance de réussir et d’être à la hauteur des défis qui nous attendent sans un cadrage et un pilotage fort de l’État. Il incombe à ce dernier de définir à la fois l’ambition, les objectifs, les horizons temporels et les moyens alloués. Pour mobiliser les parties prenantes, hiérarchiser les priorités, garantir la cohérence de l’ensemble, attribuer les compétences, répartir équitablement les efforts et les moyens, et arbitrer si nécessaire.
  • Il faut donc un moment politique fort pour engager cette dynamique d’adaptation. Prendre le tournant de l’adaptation requiert une impulsion sans précédent et un portage politique au bon niveau, un programme d’actions ambitieux et partagé, et des priorités, donc des choix politiques clairs. L’adaptation au changement climatique doit être rapidement mise en débat entre décideurs publics, acteurs économiques et sociaux, citoyens, sans quoi nous ne dépasserons jamais l’étape des ajustements techniques et des changements individuels de comportement, dont le Giec rappelle qu’ils ne suffiront pas, quel que soit le scénario de réchauffement considéré. La nouvelle Stratégie française énergie-climat (SFEC), en cours d’élaboration, comprendra une loi de programmation énergie-climat, la Stratégie nationale bas-carbone révisée (SNBC 3), et le Plan national d’adaptation au changement climatique révisé (PNACC 3). Ce contexte, concomitant de l’élection présidentielle, doit être entendu comme une opportunité unique pour un premier moment politique sur l’adaptation en France. Or l’expérience montre que la France perdra cinq années supplémentaires si les résultats de la SFEC n’aboutissent pas à une véritable rupture dans la manière de concevoir et de traiter ces questions.
  • Faire du volet adaptation de la SFEC un cadre de référence commun Pour réussir l’adaptation au changement climatique, chaque secteur, chaque territoire, chaque acteur, public et privé, doit pouvoir disposer des orientations et des moyens nécessaires à sa mue. L’adaptation doit être intégrée à la sécurité civile, à la politique sanitaire, aux plans de prévention des risques, à la gestion intégrée de la ressource en eau, à la protection de la biodiversité, aux documents d’aménagement et d’urbanisme, à la politique agricole, à celle de réindustrialisation, à la recherche et l’innovation. C’est à cela que devrait s’atteler la SFEC, non seulement dans le cadre du PNACC, mais aussi, et avant tout, dans la loi de programmation énergie-climat.
Concrètement, nous recommandons que le processus d’élaboration de la SFEC permette :
  • 1. D’aboutir à une vision partagée des évolutions climatiques, du futur que l’on souhaite, de la juste répartition des efforts et des bénéfices, des besoins et des ressources.
  • 2. De mettre en place une coordination interministérielle et une administration dédiée, dotée des moyens proportionnés à sa mission.
  • 3. De créer (ou renforcer) les espaces de coordination, dont certains auront vocation à être pérennisés, pour assurer la cohérence intersectorielle et territoriale de l’adaptation.
  • 4. De définir la boîte à outils dont il faudra se doter, et identifier les acteurs qui en auront la responsabilité et les moyens : mise à disposition des données climatiques, des cadres d’analyse, de guides méthodologiques et d’indicateurs.
  • 5. D’accélérer l’effort de sensibilisation aux impacts du changement climatique, aussi bien dans les programmes scolaires que dans les filières de formation professionnelle initiale et continue.
  • 6. D’anticiper les besoins investissement pour échelonner l’effort dans le temps, en répartir la charge entre les acteurs et financer plus facilement.
  • 7. D’accélérer la réforme des systèmes d’indemnisation des dommages, de mutualisation des risques et d’accompagnement des inéluctables relocalisations. Certains de ces éléments devront figurer dans la loi de programmation énergie-climat, et d’autres dans le PNACC. Un tel moment politique et la définition de ce cadre de référence permettront de réunir les conditions pour que s’enclenche une dynamique d’adaptation à la hauteur des enjeux.

Fiche Adaptation de La Fabrique Écologique

En complément du billet d’analyse ci-dessus, La Fabrique écologique propose la fiche sur l’adaptation élaborée dans le cadre du dossier « Les enjeux écologiques des prochaines échéances électorales«  8-Adaptation.pdf

L’adaptation au changement climatique

  • 1. La situation actuelle L’adaptation au changement climatique est le parent pauvre des politiques climatiques, aussi bien aux échelles internationales, nationales et locales. Pourtant, il est certain que la réduction des émissions de GES ne suffira pas à limiter ses effets, car la trajectoire climatique des années à venir est déjà engagée par les émissions passées et présentes. Depuis quelques années, les effets du changement climatique se font ressentir sur toute la planète : canicules, incendies, sécheresses, inondations, submersions marines, etc. Ces effets se durciront dans les années à venir, et l’adaptation vise à se préparer à ces effets. Ces évènements, qu’ils soient extrêmes (canicules, sécheresses, tempêtes, inondations, etc.) ou plus progressifs (augmentation de la température, modification du régime des pluies, montée du niveau de la mer) auront des conséquences sur le bâtiment et les infrastructures, sur les activités économiques (la raréfaction de l’eau et les épisodes de sécheresse auront des impacts sur les rendements agricoles, la baisse de l’enneigement aura des répercussions sur le tourisme de montagne, etc.) et sur la santé humaine et des écosystèmes. 62 % des Français sont déjà exposés à des risques climatiques de manière forte ou très forte (ONERC, 2016), avec des disparités relativement fortes. Les impacts du changement climatique sont inégalement répartis géographiquement et socialement [[Rapport d’information fait au nom de la délégation sénatoriale à la prospective sur l’adaptation de la France aux dérèglements climatiques à l’horizon 2050]]. Les territoires ultramarins sont exposés sur plus de 90 % de leur territoire. Les régions PACA et Bretagne sont les plus exposés un grand nombre de communes étant exposées à trois risques. Géographiquement, ce sont les territoires littoraux et de montagne qui sont le plus vulnérables aux effets du changement climatique. L’adaptation peut prendre des formes variées, de l’ajustement marginal au changement structurel. L’objectif est de réduire la vulnérabilité face aux impacts du changement climatique. Les actions d’adaptation dépendent fortement du contexte local et sont souvent complémentaires les unes des autres. Par exemple, pour s’adapter à la montée du niveau de la mer, il peut s’agir de rehausser ou de construire certaines digues, d’interdire de construire dans les zones à risque, d’adapter le bâti existant (construction d’un espace refuge pour les épisodes de tempête, installation de stores manuels pour éviter d’être emprisonner à l’intérieur de la maison en cas de coupure d’électricité, etc.), de modifier le système d’indemnisation des victimes afin de prendre en compte l’érosion côtière, de dépoldériser certains endroits ou encore de relocaliser certains biens ou activités en dehors de la zone à risque. Les actions d’organisation et de communication sont également indispensables. Dans le cas des tempêtes, organiser en amont les services de secours et mettre en place des dispositifs d’alerte des populations participent à la réduction de la vulnérabilité des sociétés. Un rapport sénatorial de 2019[[Ibid]] établit le premier bilan des politiques d’adaptation menées en France. Il souligne que tous les acteurs, notamment les collectivités territoriales et les acteurs économiques, sont très en retard sur ces sujets. La place du Parlement est également jugée trop faible sur les sujets. La maladaptation fait partie des grands écueils à éviter. Cette dernière désigne les actions qui ont pour effet d’accroître la vulnérabilité au changement climatique alors que l’objectif était de la réduire.
  • 2. Les mesures prises pendant le dernier quinquennat Durant le dernier quinquennat, comme durant le précédent, peu de mesures concernent explicitement l’adaptation au changement climatique. En 2018, le deuxième Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC 2[[Le PNACC 1 date de 2011]]) fixe l’objectif d’atteindre en 2050 une adaptation compatible à une augmentation de la température comprise entre 1.5 et 2°C. Ce PNACC 2, publié avec deux ans de retard, s’organise autour de 6 domaines (« gouvernance et pilotage », « connaissance et information », « prévention et résilience », « adaptation et préservation des milieux », « vulnérabilité des filières économique », « renforcement de l’action internationale ») et de 58 actions. Le Haut Conseil pour le Climat estime néanmoins que “celles-ci renvoient la plupart du temps à des objectifs, souvent généraux, qui ne sont pas déclinés en trajectoire” . La mise en place de la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC) illustre bien la différence de traitement entre l’atténuation et l’adaptation au changement climatique. La CCC avait pour mandat de réduire « d’au moins 40 % les émissions de GES d’ici 2030 (par rapport à 1990) dans un esprit de justice sociale », sans devoir traiter la question de l’adaptation au changement climatique qui est pourtant indispensable. Néanmoins, même si l’adaptation n’a pas fait l’objet des travaux de la CCC, la loi Climat et résilience contient plusieurs articles en lien avec l’adaptation des territoires littoraux à l’érosion côtière, ces mesures ayant été ajoutées par le gouvernement. En 2021, le ministère de l’agriculture a mis en place le Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique. C’est la première fois qu’un dispositif de ce genre fait mention de l’adaptation du changement climatique. L’objectif de ce Varenne est d’aboutir en janvier 2022 à une feuille de route pour l’adaptation de l’agriculture au changement climatique. Trois groupes de travail ont été distingués, le premier travaillant sur une réforme de l’assurance récolte, le second sur l’adaptation des filières agricoles à l’évolution du climat, le troisième sur les besoins et les accès à la ressource en eau. Ces groupes de travail sont constitués de représentants du monde agricole, des collectivités locales, es services de l’Etat, des agences de l’eau, des banques et des assurances. Néanmoins, dès le lancement de ce dispositif, cinq organisations[[La Confédération Paysanne, la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, l’UFC-Que-Choisir, France Nature Environnement et le Réseau Action Climat]] dénoncent une « parodie de consultation » et refusent de participer à l’exercice. Enfin, le ministère de l’Écologie a récemment mis en ligne un centre de ressources sur l’adaptation
  • 3. L’état du débat politique et médiatique Tout comme pour les politiques publiques, l’adaptation est relativement absente du débat public. Certains ont encore dans l’idée que parler d’adaptation peut nuire à la politique d’atténuation. Or de nombreux exemples montrent que c’est l’inverse : la mobilisation pour l’adaptation montre que la gravité du sujet a été identifié, ce qui renforce l’aspiration à des mesures suffisantes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour le moment, aucun(e) candidat(e) n’aborde ces questions dans son programme. Le terme est même absent des différents documents de programme. Les Républicains mentionnent la « lutte contre les changements climatiques » mais ne formule pas de proposition d’adaptation. Le constat est le même pour le programme de LFI et de celui d’EELV. Néanmoins, en dehors de la campagne présidentielle, certains éléments du débat sur l’adaptation émergent. A l’échelle des parlementaires, le sénateur Dantec (groupe RDSE) a mentionné l’élaboration d’une loi-cadre sur l’adaptation au changement climatique. Il propose également de créer un pilotage interministériel de l’adaptation. La sénatrice Bonnefoy (PS) a déposé en 2019 une proposition de loi visant à réformer le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles. Les événements évoqués dans le débat public sont assez nombreux mais ils le sont souvent de manière ponctuelle. Les trois exemples suivants méritent notamment d’être cités. La question de l’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles est souvent abordée à l’occasion de la survenance de ces événements, ses différents éléments sont aujourd’hui connus, même si les mesures concrètes se font attendre. Le régime actuel, fondé sur la solidarité nationale, ne permettra pas de couvrir tous les besoins futurs d’indemnisation. Les débats portent donc sur la manière d’élargir la couverture afin de prendre en compte l’augmentation et l’intensité des catastrophes naturelles à venir. Une piste consiste à augmenter la contribution de chaque citoyen au fonds de prévention des catastrophes naturelles majeures, mais cela n’est pas forcément juste socialement. Une autre consiste à moduler le montant de l’indemnisation des biens en fonction de certains critères socio-économiques (indemniser plus faiblement les résidences secondaires par exemple). Enfin, une troisième voie consiste à laisser plus de place au marché assurantiel privé. Un autre débat concerne le devenir des biens situés en zones à risque. Rien que sur le littoral, entre 5 000 et 50 000 biens sont menacés par la montée du niveau de la mer à horizon 2100. A l’heure actuelle, aucun dispositif ne permet de planifier le recul progressif de ces biens. Certains proposent par exemple l’étalement dans le temps de la perte de propriété privée. Sur les conflits d’usage de la ressource en eau, les débats deviennent de plus en plus importants depuis quelques années. L’eau est une ressource vitale pour les personnes, mais également pour de nombreuses activités économiques (agriculture, production d’énergie hydraulique et nucléaire, tourisme, neige de culture dans les stations de ski, etc.) et pour la bonne santé des écosystèmes. Le changement climatique va entraîner à la fois une raréfaction des ressources des nappes (diminution comprise entre 10 et 25 % à l’horizon 2050 avec des variations régionales) et une baisse du débit annuel des cours d’eau (entre 10 et 40 %). Les mesures d’adaptation à la raréfaction de l’eau sont diverses mais certaines sont déjà controversées. L’exemple du conflit autour des « mégabassines » dans le Marais poitevin est emblématique des controverses que l’adaptation au changement climatique peut générer. Alors que certains représentants du monde agricole, tels que la FNSEA souhaitent multiplier les projets de mégabassines afin de créer des réserves d’eau en hiver pour gérer les sécheresses estivales, les organisations environnementales et la Confédération Paysanne soulignent le fait que ces bassines ne serviraient qu’à une poignée d’agriculteurs pratiquant des cultures intensives très gourmandes en eau (par exemple le maïs) et mettent en avant leurs conséquences négatives pour les écosystèmes.
  • 4. Les enjeux pour l’avenir La plupart des actions concernant l’adaptation au changement climatique sont à venir. Il est nécessaire d’adapter les lieux de vie aux impacts du changement climatique en modifiant l’urbanisme. L’enjeu de réduire les impacts des canicules est particulièrement important. En 2019 et 2020, les canicules ont fait partie des catastrophes les plus meurtrières au niveau mondial . Pour réduire les impacts des canicules, de nombreuses actions plus ou plus structurantes peuvent être mises en œuvre : végétalisation, construction bioclimatique des bâtiment, création d’ombres grâce aux toiles solaires, éclaircissement des revêtements, réduction de la place de la voiture en ville, etc. Les effets du changement climatique sur la santé seront nombreux : mortalité liée aux canicules, aggravation des effets de la pollution atmosphérique liée à la hausse des températures, augmentation des risques allergiques, prolifération de certaines espèces avec des conséquences sanitaires (exemple des Sargasses aux Antilles), propagation de maladies vectorielles (dengue, paludisme, etc.). La pandémie de covid-19 a révélé les conséquences dramatiques d’un manque de préparation au risque épidémique. L’anticipation de ces impacts sanitaires est cruciale. Les questions du partage de la ressource en eau seront sans doute les plus difficiles à traiter dans les années à venir car elles vont nécessiter un arbitrage entre différents usages de l’eau. Dans certaines régions, la question sera particulièrement complexe, notamment sur les cours d’eau utilisés pour refroidir les centrales nucléaires. Ces dernières années, plusieurs centrales nucléaires ont dû être mises à l’arrêt ou ont vu leur fonctionnement ralenti à cause de la température trop forte et de la faible disponibilité de la ressource en eau. Certaines activités vont connaître de profonds bouleversements afin de s’adapter au climat à venir. L’agriculture est le secteur qui sera le plus impacté par le changement climatique. Les mesures d’adaptation sont variées et complémentaires : il peut s’agir de faire évoluer les cultures en sélectionnant les espèces les plus adaptées au climat futur, de mettre en place des mesures agroécologiques (par exemple, l’enherbement des sols[[L’enherbement des sols consiste à implanter une couverture végétale entre deux rangées de culture]] permet une meilleure gestion de la ressource en eau), etc. Les activités de montagne seront également très impactées par la baisse de l’enneigement. Des mesures techniques sont déjà mises en place (neige de culture) mais peuvent entrer en conflit avec d’autres usages de l’eau et peuvent nuire à la biodiversité. Il est également envisagé diversifier les activités de montagne (randonnée, observation de la nature, etc.). La fermeture des stations de ski lors de la pandémie de covid-19 a mis en évidence l’extrême dépendance de ces communes au tourisme et a permis d’amorcer quelques pistes de réflexion sur leur devenir. Enfin, un aspect crucial de l’adaptation au changement climatique concerne la dimension internationale. En effet, les effets du changement climatique sont plus importants dans les pays du Sud, alors que ces derniers ont une responsabilité bien moindre dans les émissions de GES. Depuis plusieurs années, la question du financement de l’adaptation dans les pays du Sud est abordée dans les COP et génère de vives tensions entre les pays du Nord et les pays du Sud. Lors de la COP 26, certains pays ont demandé à doubler le financement dédié l’adaptation. Un rapport du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) intitulé « La tempête qui s’annonce » estime que les besoins d’adaptation seront compris entre 140 et 300 milliards de dollars par an d’ici 2030 et entre 280 et 500 milliards de dollars d’ici 2050. D’après ce rapport, les besoins de financement pour l’adaptation sont « cinq à dix fois plus élevés que les flux de finance publique internationale destinée à l’adaptation », et que cet écart s’accroit. En 2019, ces flux ont atteint 80 milliards de dollars, dont seulement un quart était consacré à l’adaptation. En outre depuis l’accord de Paris de 2015 qui a reconnu la réalité des pertes et dommages liés aux dégâts irréversibles dû au changement climatique touchant les pays les moins développés, ceux-ci revendiquent la mise en place d’un mécanisme financier pour leur permettre d’y faire face, pour un montant évalué entre 290 et 580 Mds € par an jusqu’à 2030.
  • 5. Quelques questions précises et prioritaires destinées aux candidats
    • 1) L’adaptation au changement climatique est-elle pour vous une priorité ? Si oui, quelles mesures préconisez-vous ?
    • 2) Quelle(s) évolution(s) du mécanisme d’indemnisation de victimes de catastrophes naturelles allez- vous mettre en place ? Renforcer la solidarité nationale ? Laisser plus de place aux assurances privées ? Moduler le montant des indemnisations en fonction de critères socio-économiques ?
    • 3) Comment faire en sorte que la France honore ses engagements sur la scène internationale en termes de soutien financier à l’adaptation des pays les plus vulnérables aux effets du changement climatique ?
    • 4) L’adaptation étant une dimension locale très forte, quelle vision avez-vous de l’articulation dans ce domaine entre l’action des collectivités et celle de l’Etat (coopération, soutien financier, obligation, etc.) ?

 

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