La maison écologique n’est plus un caprice d’architecte avant-gardiste ni même un luxe réservé aux plus riches. D’ores et déjà, des solutions existent pour construire des maisons à énergie positive à un coût maîtrisé. Zoom sur quelques initiatives à suivre.
La plupart des experts estiment qu’en généralisant les bâtiments basse consommation, la réglementation thermique actuellement en vigueur (RT 2012) a entraîné un surcoût moyen de construction de 10 à 15% par rapport à la réglementation précédente (RT 2005). Quant à la future réglementation (RT 2020), elle imposera le standard des bâtiments à énergie positive et donc l’installation de nouveaux équipements de production d’énergie renouvelable comme les panneaux photovoltaïques. Avec, à la clé, une augmentation potentielle de la facture finale.
Parallèlement, la stagnation des ressources des ménages, à laquelle s’ajoute le renchérissement du foncier, éloigne pour beaucoup le rêve d’accéder à la propriété. D’où l’impératif de construire moins cher. Dès lors, comment lever cette contradiction entre l’enjeu environnemental et l’enjeu social ? C’est l’un des grands défis qui se posent aujourd’hui aux professionnels de la construction, appelés à faire preuve d’imagination pour offrir les meilleures solutions au meilleur prix.
Jouer sur plusieurs leviers
Pour réduire les coûts de construction sans sacrifier la qualité ni la performance énergétique, plusieurs leviers peuvent être actionnés. Dans un souci d’optimisation, il s’agit d’abord de penser et de rationaliser toute la construction dès le départ, avec tous les intervenants. Un enjeu qui plaide notamment pour le recours à la « conception – réalisation », associant le maître d’œuvre et l’entreprise dès la conception.
En matière d’architecture, l’option bioclimatique s’impose car elle ne coûte rien et rapporte gros : les baies vitrées bien orientées vers le sud maximisent en effet les apports solaires passifs et se comportent comme des chauffages gratuits et renouvelables. Les performances de l’enveloppe sont aussi à privilégier car elles permettent des économies sur les équipements de chauffage. Le choix des matériaux a aussi une grande importance. D’autant que pour réaliser des gains significatifs sur les coûts et les délais, il s’agit également d’industrialiser ce qui peut l’être : pré-fabriquer en atelier pour monter plus rapidement, livrer des pièces entières assemblées en usine, assurer une meilleure coordination…
Allier techniques traditionnelles et matériaux innovants
La plupart des majors de la construction réfléchissent à de nouvelles solutions. C’est le cas notamment de Lafarge, leader mondial des matériaux de construction. Le groupe a conçu une maison pilote de 130 m2 baptisée ABCD+ qui, comme son acronyme le suggère, se veut à la fois « accessible, belle, citoyenne, duplicable et positive ». Fruit d’un partenariat avec le constructeur français Cécile Robin, « cette maison allie techniques traditionnelles et matériaux innovants comme le bloc béton de pierre ponce pour répondre aux exigences de la future RT 2020, tout en restant accessible et en présentant une esthétique soignée », expliquent ses concepteurs.
Elle réduit son impact environnemental grâce à une architecture bioclimatique, une enveloppe performante sur le plan thermique, un système de recyclage des eaux de pluie et une toiture végétalisée. Des panneaux photovoltaïques posés sur le toit du garage lui permettre de produire de l’énergie renouvelable. Le chauffage est assuré par un poêle à bois et des gaines propulsant l’air chaud dans les différentes pièces. L’eau chaude sanitaire est produite par un chauffe-eau thermodynamique.
Des solutions bioclimatiques ont également été privilégiées pour l’aménagement intérieur. Un patio couvert de 20 m2, situé au centre de la maison, éclaire les pièces à vivre et fonctionne comme une serre. En hiver, le soleil chauffe la verrière. L’air est ainsi préchauffé avant d’entrer dans le logement… Et en été, la verrière s’ouvre pour évacuer l’air chaud et créer une ventilation naturelle.
Réinventer la construction pour rendre plus performant et moins cher
Mais l’innovation pour concilier écologie et économie n’est pas l’apanage des seuls grands groupes. Plusieurs start-up dynamiques n’hésitent pas à repenser les techniques et les process de la construction. C’est le projet lancé avec brio Logelis, une jeune entreprise née en 2013 à Romans (en Isère) et qui a développé, après quatre ans de R&D intensive, un nouveau système constructif breveté. Celui-ci est fondé sur l’assemblage, en mode « lego », de panneaux composites autoporteurs fortement isolants, grâce à la combinaison innovante du ciment, du bois et de la mousse polyuréthane rigide. Le procédé permet à Logelis de construire en moins de deux mois des maisons à haute performance énergétique, pour un coût de 20 à 30% inférieur au prix d’une maison traditionnelle.
« Il y a une réelle intention sociale dans notre projet. Notre questionnement était : que peut-on faire pour la construction de demain ? La clef se trouve selon nous dans l’industrialisation qui permet de faire baisser les coûts », explique Renaud Sassi, le PDG de Logelis. Concrètement, les panneaux, préalablement usinés, sont assemblés grâce à un système de rails en aluminium, posés sur les fondations. Avec ce système, très facile à employer, il est possible de construire un mur en deux heures. De plus, une partie importante des travaux, comme l’intégration des portes, des fenêtres ou de l’électricité, est également réalisée en amont, dans l’usine de Logelis.
Grâce à cette construction rapide, l’entreprise réalise 30 à 40% d’économie sur la main-d’œuvre. D’où la possibilité de maîtriser les coûts tout en assurant la performance énergétique… Et, in fine, de proposer des logements de qualité accessibles à tous : « Ce tarif compétitif nous permet de répondre aux demandes des bailleurs sociaux qui travaillent souvent à flux tendus. Ainsi, nous répondons aux besoins de marchés auxquels la construction traditionnelle ne peut répondre pour l’instant », se félicite le fondateur de Logelis.
S’intégrer naturellement à son environnement
Dans un style très différent, la Fondation roumaine Justin Capra pour les inventions et technologies durables (FITS) propose également une gamme de maisons écologiques à des prix très attractifs. Un « concept-house » modulaire, baptisé Soleta Zero Energy, doté d’un design de type chalet et construit avec des matériaux naturels d’origine locale.
La maison dispose d’une structure bois entourée de larges baies isolantes. Couplées à une bonne exposition, ces larges ouvertures ont permis aux concepteurs de tirer le meilleur parti de la lumière naturelle. Et quand la lumière artificielle est nécessaire, elle est dispensée par des appareils LED de faible puissance.
Dotée d’une isolation efficace, la maison est conçue pour utiliser la ventilation naturelle quand il fait chaud et, lorsqu’il fait plus frais, des ventilateurs-récupérateurs extraient la chaleur de l’air évacué.
La maison utilise également l’énergie solaire, la géothermie, l’éolien et la récupération des eaux de pluie pour réduire ses consommations. Un système intelligent de gestion de l’énergie, pilotable à distance depuis un smartphone, surveille en permanence les consommations, la température et la qualité de l’air. Et à l’intérieur, tout a été conçu pour optimiser l’espace. Un nouvel exemple original qui montre bien que, contrairement aux idées reçues, il existe des solutions pour rendre la maison écologique accessible au plus grand nombre.