Les jeunes jouent un rôle capital dans l’évolution de notre société et particulièrement en matière d’environnement. Un sondage récent de l’ADEME révèle une fois de plus la grande sensibilité des 15-24 ans aux questions environnementales. Ainsi, ils sont 79% à estimer que le changement climatique est lié aux activités humaines, contre 68% des interviewés en moyenne et 66% à penser que les conditions de vie deviendront extrêmement pénibles à cause des dérèglements climatiques, contre 52% des interviewés en moyenne. Si ces jeunes sont sensibles aux questions environnementales, il est essentiel pour l’ADEME de les impliquer concrètement et pour cela, de mieux cerner leurs préoccupations et de définir un discours juste qui a du sens pour eux.
Quelles sont les attentes des jeunes sur les questions liées à l’environnement ? Quels mots utiliser pour mieux les sensibiliser? Quelles bonnes pratiques valoriser pour les intéresser à ce sujet ? Autant de questions auxquelles l’ADEME s’est intéressée notamment dans une enquête réalisée par l’Institut Médiascopie auprès des 15-18 ans. Les 15-18 ans souhaitent agir pour l’environnement, mais ils refusent de culpabiliser et d’être « les victimes des errements du passé » Trois grands enseignements se dégagent de cette enquête :- Les 15-18 ans ont conscience qu’ils participent à la dégradation de l’environnement, notamment à travers l’usage des téléphones portables. Cependant, ils soulignent que d’autres ont pollué avant eux ou polluent aujourd’hui bien davantage. Ils considèrent qu’ils n’ont pas à prendre en charge des problèmes générés par leurs prédécesseurs. Les jeunes de 15-18 ans ne souhaitent pas être considérés comme une « génération sacrifiée ».
- En termes de communication, les jeunes de 15-18 ans s’estiment peu sensibles aux discours actuels des pouvoirs publics les invitant à lutter pour l’environnement. Ils se disent plus à l’écoute d’un discours non culpabilisant – simple et concret – articulé autour des conséquences de leurs actes et pointant les bonnes initiatives.
- Aux yeux des 15-18 ans, ce sont les associations qui sont les plus actives dans le domaine de l’environnement. De leur côté, les jeunes se disent prêts à « participer », via des missions de service civique dans l’environnement par exemple ou en s’engageant, au niveau local, dans le nettoyage de la nature. Ils citent aisément les éco-gestes au quotidien comme une manière concrète d’agir.
- Les adolescents sont avides de comprendre le monde mais n’accordent que peu d’intérêt à la recherche d’information de façon autonome (en dehors du cadre scolaire ou d’activités extra-scolaires encadrées).
- La communication sur les gestes peut être ressentie comme une « injonction à agir », une situation mal perçue par des jeunes de cet âge, qui ont davantage besoin de comprendre ce que leurs actes impliquent pour pouvoir décider eux-mêmes de ce qu’il est important de faire ou non.
- Des dossiers thématiques publiés sur M ta Terre. A noter, le dossier du mois d’octobre présente aux jeunes les résultats de l’enquête Médiascopie dans un langage plus simple. La priorité est donnée à l’humour décalé et à la reprise de leurs discours.
- Des expositions sur l’énergie, l’environnement et le changement climatique.
- La fourniture gratuite de guides pratiques pouvant être diffusés en classe (le compostage, les déchets, le changement climatique, « Petites réponses à de grandes questions sur la planète », etc.). Pour consulter ces guides cliquez ici.
- Le jeu Ecoville qui consiste à construire une ville durable.
- Le film « La Kolok » qui met en scène une bande d’étudiants confrontés aux choix « écolos ou non » de la vie quotidienne. Des adolescents ont participé à l’écriture des scénarios.
Les 150 mots de l’Environnement jugés par les 15-18 ans
La synthèse de l’enquête menée par l’Institut Médiascopie pour l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie : 1. Un monde en désordre On trouve, dans un inventaire rapide des pollutions et des catastrophes écologiques, les causes de dégradation de la planète, effets contemporains d’un monde qui s’est laissé rattraper par des erreurs du passé. C’est la déforestation qui serait le “moins bon pour l’environnement” (1,5/5,6), suivie par la disparition des espèces animales (1,6/6,61) et la maltraitance des animaux (1,8/5,7). Viennent, à peine moins bas, la fonte des glaciers (1,9/10 sur l’axe vertical) et l’épuisement des ressources naturelles (2,2), non loin des catastrophes naturelles (2,7) et juste au-dessus du changement climatique (2,8/6,5). Éléments invisibles, mais que ces utilisateurs des nouvelles technologies ne peuvent ignorer, les ondes (3,2/6) sont clairement identifiées comme nuisance. Plus à gauche, s’égrènent les plus traditionnels éléments associés aux pollutions : la consommation de pétrole (à 2,5/4,6), les OGM (3,2/4), ou encore les énergies fossiles (3,9/4,7) et l’énergie nucléaire (3,2/4,7). Les grandes entreprises (3,7/4,4) et les industriels (3,1/4), ainsi que l’impact environnemental de l’industrie (3,5/5,4), sont placés au coeur des nuisances, comme pour indiquer qu’ils portent la principale responsabilité d’une dépense énergétique excessive. L’item avoir un sentiment d’impuissance (3,6/5,6) vient se placer tout près des comportements qui concernent le plus les 15-18 ans. Ne se sentant pas tout à fait responsables, ils n’entendent pas être une “génération sacrifiée”. Un autre ensemble de mots, détaillant des comportements négatifs, comme le fait de jeter les papiers par terre (1,2/4,4), les choque. Le gaspillage (1,7/5,4) et le gaspillage de l’eau (1,7/6,1) sont placés au même niveau que les catastrophes, montrant combien ces questions paraissent essentielles. Les 4×4 (2,1/2,7), jugés négativement, ne les concernent pas. C’est aussi un peu le cas – et c’est plus surprenant – pour le fait de changer souvent de téléphone portable (2,3/4,1) et dans une moindre mesure de se déplacer en scooter (4,1/3,6). Certaines pratiques les concernant sont pointées du doigt : les fast-food (3,5/5,3), les problèmes de bruit (3,8/5,4), mais surtout les téléphones portables (3,8/6,4). Ce sont autant de portes d’entrées pour relier leurs comportements aux problématiques de l’environnement et de la consommation, marque de la tension qui s’exerce entre la promesse d’une consommation infinie et le soupçon qui l’entache, jusqu’à leur faire regretter d’avoir été habitués à ce confort pour ensuite se le (voir) reprocher et culpabiliser (4,7/5). La croissance économique aussi pose question (5/5,2). À ce terme générique répondent les lieux de consommation que sont les hypermarchés, les supermarchés, et le fait même de vivre en ville, tous items symboliquement plutôt “plombés” sur l’axe vertical (4,7/10), qui s’inscrivent dans le sens de la société (5,6 et 5,8/10 sur l’axe horizontal). Garder son confort est égoïste (5,2/6,4), mais fait partie des habitudes d’une génération. Ainsi, manger de la viande se place à 5,5/10 sur l’axe vertical, au même niveau que la technologie. Le monde de la consommation et du “progrès” serait trop installé dans les moeurs pour que l’on accepte aujourd’hui de s’en séparer. 2. Qui fait quoi ? Les acteurs se scindent en trois groupes distincts, suivant le niveau où ils interviennent : acteurs mondiaux, nationaux, et individus. S’agissant des acteurs mondiaux, la Chine (2,9/3,8), puis les Etats-Unis (3,6/4,4) sont clairement identifiés comme “pas bons pour l’environnement”. Paradoxalement, les pays en développement recueillent un score légèrement supérieur aux pays développés sur l’axe vertical (5 contre 4,8/10). Le champion incontesté est la Suède (6,2/4,2), qui est néanmoins perçue comme un “autre monde”. Il y a ce que fait l’Europe (5,6/5,3) et la France (5,5/6,5) ; par contre ce que fait l’État se place sous la moyenne (4,7/4,8) : mauvaise image, défiance envers la politique, manque de résultats visibles et prise de distance par rapport à la machine administrative en sont les principales raisons… Ce que fait ma commune est reconnu, au même niveau que le ministère de l’Écologie (5,8/10), sur l’axe vertical. Un peu au-dessus, ce que fait ma Région (6/5,6) est ce qui convainc le plus, la Région étant l’échelon idoine entre l’appartenance locale et l’action concertée collective. Étonnamment, l’item ce que font les responsables politiques en France (7,6/6,7) se place en haut de l’échelle. Enfin, un acteur réputé “bon pour l’environnement”, dont le nom évoque plus que l’action elle-même (peu connue) : l’ADEME (7,2/4,8). Par contre, l’item ce que font les associations recueille 7/5,7 ; perçues désintéressées, elles sont cependant mises à distance. Sans échapper à ce constat, les ONG connues apparaissent comme les plus actives, tels Greenpeace (7,3/5,6) et le WWF (7,6/6). On relèvera enfin le statut particulier des écologistes (7,5/5,9) qui dominent ce nuage. Pour autant le volet qualitatif de l’enquête montre qu’ils sont perçus dans l’excès, quand ce n’est pas dans “l’écologisme sacerdoce”, pour être véritablement appropriés par cette tranche d’âge. Parmi les pistes les plus concrètes pour modifier les comportements de consommation, on trouve successivement acheter des produits d’occasion (7/10 sur l’axe vertical) et donner et échanger des objets (7,7) ; mais aussi la possibilité de consommer moins (7,3) ou de consommer autrement (7,7), en privilégiant les écolabels (7,4) ou les produits écologiques (7,9), renvoyant au nouveau paradigme de production et de croissance qui se matérialise dans l’item croissance verte (7,7/6,4). D’autres items comme la réduction des gaz à effet de serre (8/6) retranscrivent des façons d’agir symboliquement très valorisées. Par contre, le covoiturage (7,8/5,4) est salué, mais il ne les concerne guère ; il en va de même pour la voiture électrique (7,4/5,3), les panneaux solaires (7,8/5,9) et les éoliennes (7,7/6,1) ; et, dans une moindre mesure, pour le chauffage au bois (6,6/5,5). En écho à l’amour déclaré pour la nature (8,8/7,6), les arbres (8,8/7,4) ou les espaces verts (8,3/7,1), les 15-18 ans accordent des scores élevés à la protection des espèces en voie de disparition (8,4/7,1) et à la préservation des paysages (8,3/7,2). Certaines de ces pistes peuvent impliquer de s’engager dans des actions précises, tel le nettoyage de la nature (8,5/6,7), premier pas éventuel pour s’engager pour l’environnement (8/6,7) ou d’améliorer la participation des citoyens (7,6/6,5)… Finalement, le fait de vivre à la campagne (7,2/6,2) doit être perçu comme un appel au respect d’un environnement dans lequel la nature n’aurait pas cédé tous ses droits à l’urbanisme. Autour de l’item les éco-gestes au quotidien (8,3/7,2) gravitent ainsi toute une série d’items en guise de vade mecum du “petit écolo au quotidien”. C’est d’abord et surtout dans les gestes les plus couramment cités que se placent les plus grands espoirs : éteindre la lumière quand on sort d’une pièce remporte la palme (8,7/8), seul le fait de prendre une douche à la place d’un bain se plaçant plus à droite (8,2/8,1)… L’intérêt d’éteindre les appareils en veille est, quant à lui, bien compris (8,4/7,5). Le tri sélectif est valorisé (8,6/7,8), de même que le recyclage des produits (8,6/7,5) ou l’usage de papier recyclé (8,4/7,2) permettant de réduire les emballages (8,3/7,3). Les items de l’alimentation, perçus contraignants au quotidien, sont plus bas : consommer des aliments produits en France est placé à 7,9/10 sur l’axe vertical, et manger des fruits et légumes à 7,4/10 ; alors que manger des fruits et légumes de saison culmine à 8,4/10… Quant aux transports, si l’item se déplacer à pied, en vélo, est populaire (8,6/7,5), l’obligation d’utiliser les transports en commun (7,8/7,4) convainc moins. 3. Comment changer ? Certains items, retranscrivant des valeurs et des nécessités, sont très valorisés. La responsabilité de chacun (7,7/7,1) est dans la transmission des valeurs (7,7/7). La sauvegarde de la planète est aussi une façon de penser aux générations futures (8,3/7,4), ce qui renvoie à la notion de respect (8,1/7,7). Il faut faire évoluer les mentalités (8,2/7,1) et, pour aider à la prise de conscience (8/7,1), des adultes doivent donner l’exemple (8,1/7,1). Le rôle des parents pour sensibiliser les jeunes (7,8/6,8) n’est que très légèrement au-dessus du rôle de l’école pour sensibiliser les jeunes (7,5/6,6). Plutôt que des grands équilibres, les jeunes attendent qu’on leur explique en quoi ce qu’ils font peut poser problème. C’est ainsi que leur préférence va vers ceux qui sont capables de parler de façon simple des conséquences de nos actions (7,5/6,7). De même, ils aimeraient mieux comprendre les effets de nos gestes pour l’environnement (8/7,2) ; ce qui pousse également à demander des campagnes d’information sur l’environnement avec des exemples concrets (7,8/6,4), ou encore les informations sur l’origine des produits (7,5/6,4). Il pourrait être utile de mettre l’environnement au programme, comme une manière d’intégrer des questions environnementales dans les cours (7,7/6,5). On peut aussi envisager des sorties et séjours scolaires sur l’environnement (7,7/6,3), dont on imagine l’efficacité grâce à leur aspect pratique… Les items des actions de sensibilisation sur l’environnement au lycée, des actions de sensibilisation sur l’environnement au collège et des actions de sensibilisation sur l’environnement en école primaire recueillent des scores très homogènes sur l’axe vertical (entre 7,7 et 7,8/10). Des missions de service civique pour les jeunes dans l’environnement (7,4/6,3) pourraient donner un cadre à un engagement collectif. En dépit de leurs préventions à l’égard des discours et de la difficulté avouée à changer d’habitudes, les jeunes placent haut le fait de s’engager pour l’environnement (8/6,7), tout comme le terme générique l’écologie (8,1/6,7), placé juste à côté. La sensibilisation est nécessaire, mais insuffisante. Orienté vers la démonstration et l’éducation, il peut s’avérer utile de montrer les économies réalisées grâce aux écogestes (7,9/6,6), ainsi que de montrer les risques et les catastrophes liées à l’environnement (7,8/6,6) ou encore de connaître son bilan carbone personnel (6,8/5,4). Les 15-18 ans se déclarent en attente de pouvoir discuter avec des scientifiques des questions environnementales (7,4/5,7), leur permettant de sortir de “l’ère du soupçon”. Il faut aussi donner à voir ce qui peut être gagné, par le fait de récompenser les actions en faveur de l’environnement (8/6,5), à travers des cadeaux qui seraient, en définitive, une reconnaissance. L’item mettre des amendes pour les comportements néfastes à l’environnement est également très bien jugé, bien que mis à distance sur l’axe horizontal (7,3/5,7). Les jeunes se veulent réalistes en estimant qu’on ne fera bouger les lignes qu’en présentant la situation par des images “choc”. L’idée vient de l’observation de la méthode utilisée pour la sécurité routière : privilégier des campagnes choc sur l’environnement (7,4/6,2). Habitués au langage des communicants, blasés par les leçons de morale, ces ados n’hésitent pas à demander qu’on leur parle avec les mots d’aujourd’hui, mélange de cynisme et d’humour, de connivence et de crédibilité : “Bouge-toi pour la planète” (7,9/6,7), ou encore “M ta terre” (7,5/6,4), dont le “wording” très “texto” convainc. Les 15-18 ans voient d’un bon oeil les émissions sur l’environnement à la télévision (7,2/5,9), ou encore des émissions sur l’environnement à la radio (6,8/5,3). Les cyber-campagnes pour sensibiliser à l’environnement recueillent de bons scores (7/5,6), tout comme ceux des médias classiques. Et cela ne choque pas d’envisager de passer par le format très court, voire quasi publicitaire, avec des spots télévisés sur l’environnement (6,9/5,9) et utiliser des gens célèbres pour sensibiliser à l’environnement (6,9/5,8). Dans le même registre, on peut envisager d’utiliser des groupes de musique pour sensibiliser à l’environnement (6,8/5,8). Casque d’écoute sur les oreilles, habits et accessoires reconnaissables, des fans aux mélomanes, la musique est un vecteur privilégié de découverte et de compréhension des codes et particulièrement dans les “années lycée”.